La clinique des phrases (109)

La clinique des phrases, Charles Malo Melançon, logo, 2020

(À l’occasion, tout à fait bénévolement, l’Oreille tendue essaie de soigner des phrases malades. C’est cela, la «Clinique des phrases».)

Soit une première phrase, tirée d’un éditorial de presse :

C’est pourtant la voie qu’a choisie le ministère de la Santé et des Services sociaux en publiant, le 16 décembre dernier, un avis enjoignant aux enseignants, aux bibliothécaires et aux libraires à bannir le roman Le garçon aux pieds à l’envers : Les chroniques de Saint-Sévère, de l’auteur François Blais.

Soit une seconde, dans un (excellent) ouvrage sur le français :

Le livre cite des femmes célèbres dans tous les domaines (les arts, la morale mais aussi la guerre) et exalte leurs pouvoirs intellectuels en les enjoignant à sortir de leur dépendance aux hommes grâce à l’éducation.

Un seul verbe, enjoindre, pour deux constructions : enjoindre à quelqu’un à faire quelque chose; enjoindre quelqu’un à faire quelque chose.

Les deux constructions sont fautives, ainsi que le rappelle le gouvernement du Canada; il aurait fallu enjoindre à quelqu’un de faire quelque chose.

Donc :

enjoignant aux enseignants, aux bibliothécaires et aux libraires de bannir;

leur enjoignant de sortir.

À votre service.

P.-S.—C’est Gilles Marcotte qui n’aurait pas été content.

Le zeugme du dimanche matin et de Tristan Saule

Tristan Saule, Jour encore, nuit à nouveau, 2023, couverture

«OK, comme tu veux, dit Fabian, laissant Loïc avec son mensonge et son sandwich, dont on se demande bien où il va le manger.»

Tristan Saule [pseudonyme de Grégoire Courtois], Jour encore, nuit à nouveau. Roman. Chroniques de la place carrée. III, Montréal, Le Quartanier, coll. «Parallèle», 04, 2023, 293 p., p. 84.

P.-S.—L’Oreille tendue apprécie fort le travail de cet auteur. Voir ceci, par exemple.

 

(Une définition du zeugme ? Par .)

L’oreille tendue de… Tristan Saule

Tristan Saule, Jour encore, nuit à nouveau, 2023, couverture

«Au feu rouge, il s’assied sur le banc, dos au massif de fleurs et au parterre de gazon qui embellissent ce carrefour passant où des semi-remorques freinent et redémarrent dans un grondement assourdissant. Loïc n’y prête pas attention. Les voix ne s’arrêtent pas. Il lui suffit de tendre l’oreille et d’écrire» (p. 63).

«Loïc gare sa Golf dans la cour des parents. Le bruit des roues dans les gravillons l’apaise. Quand il sort de l’habitacle, il sent l’odeur des vaches, de leur bouse, qui fait enrager les Parisiens, et que ceux qui vivent ici ne sentent même plus. Il tend l’oreille machinalement. Quand il était enfant, le grésillement de la trayeuse était comme une horloge. Quand il se taisait, c’était l’heure de rentrer. Aujourd’hui, si la trayeuse ne fait plus de bruit, c’est parce que les voisins ont cessé d’élever des vaches laitières. Ils avaient une cinquantaine de têtes, pas assez pour que ce soit rentable, avec le cours des prix du lait. Ils se contentent des céréales» (p. 145-146).

«Plusieurs fois, Loïc a demandé au docteur Somard et à Nini s’ils avaient des nouvelles de Cloque. Ils n’en avaient pas. Tous deux lui conseillaient de cesser de penser à cet individu, de se concentrer sur lui-même, sur sa propre guérison. Loïc a dit : “Oui.” Loïc a dit : “D’accord.” Mais le soir, dans sa chambre, Loïc tend l’oreille, il pose sa main bien à plat sur la cloison et écoute. Peut-être qu’on lui ment» (p. 293).

Tristan Saule [pseudonyme de Grégoire Courtois], Jour encore, nuit à nouveau. Roman. Chroniques de la place carrée. III, Montréal, Le Quartanier, coll. «Parallèle», 04, 2023, 293 p.

 

P.-S.—L’Oreille tendue apprécie fort le travail de cet auteur. Voir ceci, par exemple.

L’oreille tendue de… Sophie Montreuil

Logo de l’Association francophone pour le savoir (Acfas)

À l’Acfas, «Nous travaillons pour une cause : faire connaître et apprécier les travaux des chercheuses et des chercheurs francophones, qui se mènent à l’échelle de la planète. Si cette cause est embrassée par des partenaires au Canada, en Europe ou ailleurs, et si nos idées se diffusent et sont reprises, nous sommes ravis. C’est une stratégie de développement naturelle qui se met en place par parenté de missions. À plusieurs, on sert mieux la cause et on accentue nos rayonnements respectifs. Travailler de concert nous donne donc un gain de visibilité, notamment auprès des politiques qui tendent mieux l’oreille en apprenant nos liens avec des organismes en France.»

«Promouvoir les sciences en français est un travail de tous les jours», entrevue avec Sophie Montreuil, CNRS info, 29 novembre 2022.