Guy Lafleur, gourou

Yves Tremblay, Guy Lafleur. L’homme qui a soulevé nos passions, 2013, couverture

Guy Lafleur, l’ancien joueur des Canadiens de Montréal — c’est du hockey —, a fait couler beaucoup d’encre. Biographes, journalistes, paroliers, dramaturges, romanciers, poètes, nouvellistes ont écrit sur lui. L’Oreille tendue elle-même ne s’est pas gênée pour parler du «Démon blond»; voir ici et .

L’automne 2013 a donné lieu à deux nouvelles publications : Guy Lafleur. La légende, de Pierre-Yvon Pelletier, que l’Oreille n’a pas encore lu, et Guy Lafleur. L’homme qui a soulevé nos passions, d’Yves Tremblay.

L’amateur de hockey n’apprendra pas grand-chose dans le livre de Tremblay, cette hagiographie rédigée par un ami de Guy Lafleur — ami qui emploie Lafleur comme porte-parole publicitaire.

L’ouvrage brosse un portrait de Lafleur en apôtre de la pensée «positive». Lafleur aurait traversé des difficultés hors de la glace — aucune n’est décrite dans l’ouvrage, alors que les journaux ont beaucoup parlé des épreuves familiales que le mari et le père a traversées au fil des ans —, mais il s’en serait sorti grâce à son attitude. En résumé :

Plus que des souvenirs, ce livre intemporel et unique, autorisé par Guy Lafleur, deviendra une source de motivation pour tous, jeunes et moins jeunes (quatrième de couverture);

Vingt-cinq ans après ce retour tant médiatisé de la superstar, Yves [l’auteur parle alors de lui-même à la troisième personne du singulier] se rappelle cette expérience de vie et, avec le recul, il constate pour la première fois que parmi tous ceux qu’il a côtoyés, la vie professionnelle de Guy Lafleur, devenu lui-même une pure légende, est une application «vivante» et «positive», et le modèle par excellence des principes des plus grands théoriciens de l’épanouissement personnel et du succès, tels que Napoleon Hill, Anthony Robbins, Jack Canfield, Dale Carnegie, Joseph Murphy et compagnie (p. 208).

Guy Lafleur et la croissance personnelle : même combat.

 

Références

Pelletier, Pierre-Yvon, Guy Lafleur, la légende. L’album photo du démon blond, Montréal, Editions de l’Homme, 2013, 206 p. Ill.

Tremblay, Yves, Guy Lafleur. L’homme qui a soulevé nos passions, Brossard, Un monde différent, 2013, 208 p. Ill. Préface de Guy Lafleur.

L’Oreille tendue souhaite vous tâter…

…en tout bien tout honneur.

Au printemps 2013, du premier au dernier jour des séries éliminatoires de la Ligue nationale de hockey, l’Oreille a publié ici même les 57 entrées d’un «Dictionnaire des séries». Il y était question, jour après jour, match après match, de la langue du hockey.

En février 2014, ces textes, revus et augmentés, accompagnés de quelques inédits, présentés dans un nouvel ordre, paraîtront à Montréal chez Del Busso éditeur. L’ouvrage à paraître sera généreusement illustré.

L’Oreille a proposé à son éditeur et néanmoins ami, Antoine Del Busso, le titre suivant : Petit lexique illustré à l’usage de l’amateur de notre beau sport national, titre qui a reçu son aval.

Puis, un jour, hésitation éditoriale. En effet, l’Oreille ayant intitulé, sans trop y réfléchir, un de ses courriels «Langue de puck», l’éditeur a été séduit par la formule, au point de se demander s’il ne tenait pas là un meilleur titre de livre que Petit lexique illustré à l’usage de l’amateur de notre beau sport national.

Qu’en pensent les bénéficiaires de l’Oreille tendue ? Quel titre préfèrent-ils ?

Langue de puck ?

Petit lexique illustré à l’usage de l’amateur de notre beau sport national ?

Langue de puck. Petit lexique illustré à l’usage de l’amateur de notre beau sport national ?

Autre chose ?

Elle et lui vous remercient à l’avance.

P.-S. — On ne confondra évidemment pas poque et puck.

 

[Complément du 29 janvier 2014]

Finalement, ce sera Langue de puck. Abécédaire du hockey et ça paraîtra au début de mars. (Pourquoi ce changement de sous-titre ? Le premier — Petit lexique illustré à l’usage de l’amateur de notre beau sport national — correspondait parfaitement au graphisme initial de l’ouvrage. Ce graphisme ayant complètement changé, Abécédaire du hockey fait mieux l’affaire.)

Ci-dessous, une première maquette de la couverture.

Langue de puck. Abécédaire du hockey (Del Busso éditeur, 2014)

Histoire de pont et de hockey

La Presse+, 16 décembre 2013

«notre nom est Maurice Richard»
(Roch Carrier, le Rocket, 2000)

 

Montréal est une île. Pour y accéder ou pour en sortir, il faut donc des ponts (et un tunnel). Parmi ceux-ci, le pont Champlain n’est pas le plus ancien (il date de la fin des années 1950), mais il est le plus abîmé. On doit le remplacer. On s’attellera à la tâche sous peu.

On discute déjà coût, calendrier, architecture — et nom. Pour des raisons assez obscures, certains aimeraient rebaptiser le pont Champlain. Les suggestions ne manquent pas, comme le révèle la Presse+ du 16 décembre : pont Lemoyne, pont Kondiaronk, pont Hochelaga, pont Maurice-Richard.

Maurice Richard ? Un célèbre joueur de hockey des Canadiens de Montréal, de 1942 à 1960. (L’Oreille tendue a écrit une «histoire culturelle» de celui qu’on appelle «Le Rocket», le mythique numéro 9.) Des villes, une province et un pays l’ont déjà beaucoup encensé. Doit-on faire plus ?

À Montréal, Maurice Richard a droit à son aréna, dans l’Est de Montréal, qui a pendant quelques années hébergé un musée en son honneur. À son parc, voisin de l’endroit où il habitait, rue Péloquin, dans l’arrondissement Ahuntsic-Cartierville. À son restaurant, le 9-4-10, au Centre Bell. À son étoile de bronze sur la promenade des Célébrités, rue Sainte-Catherine, à côté de celle de la chanteuse Céline Dion. (Il a aussi sa place sur le Walk of Fame du Madison Square Garden de New York et sur le Canada’s Walk of Fame de Toronto.) À quatre statues : devant l’aréna qui porte son nom, à côté du Centre Bell, au rez-de-chaussée des cinémas AMC-Forum-Pepsi, dans le Complexe commercial Les Ailes. À son gymnase, celui de l’école Saint-Étienne.

Il y a un lac Maurice-Richard, dans la région de Lanaudière, au nord-ouest de Saint-Michel-des-Saints. Il y a le lac et la baie du Rocket près de La Tuque. Il y a une rue Maurice-Richard et une place Maurice-Richard, à Vaudreuil-Dorion, en banlieue de Montréal.

Le Canada n’est pas en reste. L’État fédéral a érigé une statue de Maurice Richard devant le Musée canadien des civilisations, celui où a été montée en 2004 l’exposition, devenue itinérante depuis, «Une légende, un héritage. “Rocket Richard”. The Legend — The Legacy». Il a émis un timbre à l’effigie du hockeyeur et il lui fait allusion, par Roch Carrier interposé, sur les billets de banque de 5 $. L’Oreille s’est laissé dire que, à Calgary, une «Richard’s Way» (ou serait-ce une «Richard’s Road» ?) l’aurait honoré. Du temps où les affaires allaient moins mal, il y avait une salle Maurice-Richard au siège social de Research in Motion (le Blackberry), à Waterloo; peut-être y est-elle toujours.

N’est-ce pas suffisant pour celui qui disait de lui-même «Chus juste rien qu’un joueur de hockey» ? L’Oreille aurait tendance à le croire.

P.-S. — On a souvent comparé «la diva de Charlemagne» à Maurice Richard. Est-ce à dire qu’il faudra un jour penser baptiser un pont Céline-Dion ? Ce serait une bonne raison de ne pas renommer le pont Champlain. Ne créons pas de précédent dangereux.

P.-P.-S. — Ce n’est pas la première fois qu’une pareille opération toponymique est évoquée. Il en été question dans la Presse du 6 octobre 2011, sous la plume de Stéphane Laporte, et dans le Devoir du 20 juin 2012, dans une caricature de Garnotte. Celui-ci fait dire au ministre fédéral responsable du projet, Denis Lebel : «En son honneur, je songe à un pont… suspendu !» Maurice Richard a en effet, au cours de sa carrière, été suspendu plusieurs fois.

 

[Complément du 1er novembre 2014]

Le Parti conservateur de Stephen Harper, au pouvoir au gouvernement fédéral canadien à Ottawa, en fait une obsession. «Exclusif. Le Rocket aura son pont», affirme le quotidien la Presse en une aujourd’hui : «Le pont Champlain cédera sa place au pont Maurice-Richard, a tranché Ottawa. Le gouvernement Harper devrait en faire l’annonce le 9 décembre, un clin d’œil au numéro de la légende du Canadien.» En page 3, en titre : «Maurice Richard déloge ChamplainL’Oreille n’en croit pas ses oreilles.

 

[Complément du 5 novembre 2014]

Dans la Presse+ de ce matin, l’Oreille tendue découvre qu’un «corridor emprunté par le quart des vols en partance ou à destination de Montréal» porte, depuis 2012, le nom MORIC (pour Maurice Richard). Plus précisément, il s’agit d’«un point de cheminement en haute altitude situé au nord-ouest de Montréal». Maurice Richard au / dans le ciel.

P.-S. — Le Rocket n’est pas seul :

En 2012, les contrôleurs de Montréal guidant les pilotes ont commencé à utiliser les points de cheminement MORIC (pour Maurice Richard), LFLER (Guy Lafleur), BLIVO (Jean Béliveau) et ARVIE (Doug Harvey), tandis que GAINY (Bob Gainey) était le nom d’une procédure d’arrivée vers les pistes de l’aéroport Pierre-Elliott-Trudeau, à Dorval — YUL pour les aviateurs. Ces cinq anciens joueurs sont membres du Temple de la Renommée du hockey. De plus, le principal corridor en direction ouest, vers Chicago et Toronto, a été baptisé HABBS, qui a la même sonorité que le vénérable surnom du Canadien, «Les Habitants», prononcé à l’anglaise. […] Les Expos sont aussi dans le ciel montréalais : deux procédures de départ dans le corridor arrivant des États-Unis s’appellent CARTR, en l’honneur du receveur Gary Carter, membre du Temple de la renommée du baseball majeur. […] Une position de départ de l’aéroport Jean-Lesage, à Québec, s’appelle NORDIK.

 

Référence

Melançon, Benoît, les Yeux de Maurice Richard. Une histoire culturelle, Montréal, Fides, 2006, 279 p. 18 illustrations en couleurs; 24 illustrations en noir et blanc. Nouvelle édition, revue et augmentée : Montréal, Fides, 2008, 312 p. 18 illustrations en couleurs; 24 illustrations en noir et blanc. Préface d’Antoine Del Busso. Traduction : The Rocket. A Cultural History of Maurice Richard, Vancouver, Toronto et Berkeley, Greystone Books, D&M Publishers Inc., 2009, 304 p. 26 illustrations en couleurs; 27 illustrations en noir et blanc. Traduction de Fred A. Reed. Préface de Roy MacGregor. Postface de Jean Béliveau. Édition de poche : Montréal, Fides, coll. «Biblio-Fides», 2012, 312 p. 42 illustrations en noir et blanc. Préface de Guylaine Girard.

Les Yeux de Maurice Richard, édition de 2012, couverture

Divergences transatlantiques 028

L’Oreille tendue s’intéresse à la langue du hockey.

Pour désigner le bagarreur, les expressions n’y manquent pas : armoire à glace, dur à cuire, homme fort, policier, matamore, gorille, batailleur, goon, bully (et donc boulé dans la langue de Pierre Bouchard, ex-justicier des Canadiens de Montréal). Par euphémisme, on dit parfois joueur robuste ou fougueux, gros bonhomme ou encore gros gaillard.

On dit aussi taupin : la créature humaine qui répond à ce nom est réputée plus forte, plus solidement bâtie, que la moyenne de ses congénères.

Le taupin québécois n’est donc ni un «Soldat qui pose des mines sous terre», ni un coléoptère, ni un «Élève qui se prépare à Polytechnique» (le Petit Robert, édition numérique de 2014).

Il ne faut pas confondre, surtout pas sur la glace.

P.-S. — Y a-t-il plus imposant qu’un taupin ? Évidemment : c’est le méchant taupin.

La bibliothèque idéale de l’amateur de hockey

Jeff Lemire, Essex County, 2009, couverture

Quels livres l’amateur de hockey devrait-il impérativement avoir dans sa bibliothèque ? Voici cinq suggestions de l’Oreille tendue, par ordre alphabétique d’auteur.

Ken Dryden, The Game (1983).

Un Canadien anglais en visite ethnographique chez les Québécois. Un cérébral du côté du corps.

Ce livre a été traduit en français sous le titre l’Enjeu (1983), puis sous le titre le Match (2008). Les (ré)éditions anglaises pullulent.

Ken Dryden, qui a été gardien de but pour les Canadiens de Montréal, a aussi écrit la préface à la pièce de théâtre les Canadiens de Rick Salutin (1977) et collaboré à un ouvrage avec Roy MacGregor, Home Game. Hockey and Life in Canada (1989), entre autres publications (livres, articles, etc.).

François Gravel, le Match des étoiles (1996).

François Gravel est un auteur prolifique, pour les jeunes et les autres. Plusieurs de ses livres portent sur le hockey. Le Match des étoiles est le plus fin, le moins appuyé.

Jeff Lemire, Essex County (2009).

La meilleure bande dessinée sur le hockey. En anglais.

Roy MacGregor, The Last Season (1983).

L’auteur est journaliste et l’auteur de plusieurs livres sur le hockey, seul ou avec d’autres. Il a notamment signé la série de romans pour la jeunesse «Screech Owls»; certains ont été traduits en français dans la collection «Carcajous» (Boréal).

The Last Season raconte la dernière saison d’un goon, Felix Batterinski, et bien plus encore.

(Roy MacGregor a préfacé la traduction anglaise d’un livre de l’Oreille.)

Marc Robitaille, Des histoires d’hiver, avec des rues, des écoles et du hockey. Récit (1987); nouvelle édition sous le titre Des histoires d’hiver avec encore plus de rues, d’écoles et de hocke. Roman (2013).

C’est un roman (la couverture le dit), sous la forme de souvenirs d’enfance (l’année scolaire et la saison de hockey 1966-1967 au Québec). Le hasard fait que ce pourraient être, en bonne partie, ceux de l’Oreille.

L’iconographie, en 2013 mieux encore qu’en 1987, est somptueuse.

Voir aussi le film qu’en a tiré François Bouvier en 1998, Histoires d’hiver.

Quelle serait la liste des lecteurs de l’Oreille ? Propositions bienvenues.

 

[Complément du 27 octobre 2014]

L’Oreille tendue, dans son panthéon, fera dorénavant place à Numéro six d’Hervé Bouchard (2014). Pourquoi ? Voyez ici.