Il y a fumée et fumée

«Loi 101 autochtone : un “show” de boucane ?», la Presse+, 8 mai 2023, titre

On le sait : la boucane, au Québec, c’est de la fumée (incendie, cigarette, pétard, etc.).

Il y a aussi le show de boucane.

Il avait surtout une signification automobile :

Un gars faisait crisser les pneus de sa Chevrolet Nova en faisant un show de boucane qui embaumait l’air d’un parfum de pneu brûlé (Attaquant de puissance, p. 157).

Il existe maintenant une variante politique. Justin Trudeau, le chef du Parti libéral du Canada, annonce, par médias interposés, qu’il a déjà fumé du pot. Titre de la Presse ? «Show de boucane» (23 août 2013, p. A3).

P.-S. — La marche tenue dans le cadre du Week-end pour vaincre les cancers féminins est une noble cause; cela ne se conteste pas. Qu’elle se soit terminée le 24 août, sous les fenêtres de l’Oreille tendue, par un show de boucane (à motos) accable toutefois un brin.

 

[Complément du 28 octobre 2023]

Dans un essai revigorant, les Déclinistes. Ou le délire du «grand remplacement», Alain Roy consacre un chapitre à l’omnicommentateur québécois Mathieu Bock-Côté. Sous-titre : «Show de boucane». Explication en note : «cette expression québécoise, dont la traduction littérale serait “spectacle de fumée”, signifie “esbroufe”, “chiqué”, “flafla”» (p. 65 n. 1).

 

Références

Hotte, Sylvain, Attaquant de puissance, Montréal, Les Intouchables, coll. «Aréna», 2, 2010, 219 p.

Roy, Alain, les Déclinistes. Ou le délire du «grand remplacement», Montréal, Écosociété, coll. «Polémos. Combattre, débattre», 2023, 149 p.

N’appelez pas la Société protectrice des animaux (ni la police)

Du cochon et de la tirelire

Soit la phrase suivante, tirée du roman Panache. 1. Léthargie de Sylvain Hotte (2009) :

J’ai sorti les trois cents dollars que j’avais arrachés à mon cochon et je les ai tendus à Normand (p. 155).

Le narrateur ne vient pas, qu’on se rassure, de voler son porc. Il a simplement pris de l’argent dans sa tirelire.

C’est confirmé, une fois de plus : tout est bon dans le cochon.

 

Référence

Hotte, Sylvain, Panache. 1. Léthargie, Montréal, Les Intouchables, coll. «Aréna», 1, 2009, 230 p.

Les zeugmes du sport et du dimanche matin

François Gravel, OK pour le hockey !, 2011, couverture

«il quitte les gradins, la tête entre les jambes, emportant son porte-voix et ses mauvaises odeurs avec lui» (OK pour le hockey !, p. 38).

«“On est encore en vie… et en pause !” s’exclame-t-elle après une 1re manche-marathon, exténuée par la chaleur accablante» (@JeanSylvainDube).

«Je vais lever des fonds et des haltères pendant un mois» (@OlivierB2, via @desrosiers_j).

«J’ai des enfants sportifs. Ma fille joue au soccer, mon fils au baseball et les deux ensemble jouent avec mes nerfs !» (@Yaneau)

«“Il boxe pour l’adrénaline et pour arrondir ses fins de mois” Splendide #zeugme @DansLeChampL» (@PimpetteDunoyer).

«En 60 minutes, les Montréalais ont perdu leurs bagarres, leur fierté et aussi le match» (@lapresseplus, 6 mai 2013).

 

Référence

Gravel, François, OK pour le hockey !, Québec, Éditions FouLire, coll. «Les histoires de Zak et Zoé», 3, série «Sports extrêmes», 2011, 62 p. Illustrations de Philippe Germain.

 

(Une définition du zeugme ? Par .)

Autobiographie des objets du hockey

Lecture, l’autre jour, de Lance et Klonk (1994) de François Gravel et découverte de ceci :

Et puis tu te souviens sûrement de ce chronométreur, au Forum de Montréal, qui s’organisait toujours pour que l’horloge arrête sur un chiffre pair. Les amateurs de hockey pariaient sur le temps du dernier but en achetant des billets…
— Sur lesquels il n’y avait que des chiffres impairs, je me souviens, oui. Mais il y a longtemps de ça, non ? (éd. de 1995, p. 51)

L’Oreille tendue se souvient, elle aussi. Mais il manque quelque chose à la description de François Gravel.

Cela est chez Michel Lefebvre dans Je suis né en 53… Je me souviens (2005) :

je me souviens des billets de loterie clandestine de hockey à 25 ¢, pliés en deux et agrafés, sur lesquels était inscrit un temps de 0:01 à 19:59 qui devait correspondre, pour qu’il soit gagnant, au temps du premier but ou à celui du dernier; je me souviens aussi qu’on avait mis au jour la passe : s’il n’y avait jamais beaucoup de gagnants, c’est que le chronométreur officiel arrêtait le cadran du forum sur un temps pair ou impair selon le gros des billets émis pour une partie donnée (p. 70).

Se souvenir parfaitement de ces billets dans les mains de son grand-père et d’une photo des joueurs des Canadiens de Montréal, sur leur banc, regardant sans comprendre le tableau indicateur.

Vouloir relire l’Autobiographie des objets de François Bon.

P.-S. — Dans un ordre d’idées semblable, sur Twitter, continuer à suivre la série #trackMég de @reneaudet.

 

Références

Bon, François, Autobiographie des objets, Paris, Seuil, coll. «Fiction & Cie», 2012, 244 p.

Gravel, François, Lance et Klonk, Montréal, Québec/Amérique Jeunesse, coll. «Bilbo», 53, 1995, 128 p. Illustrations de Pierre Pratt. Édition originale : 1994.

Lefebvre, Michel, Je suis né en 53… Je me souviens, Montréal, Hurtubise HMH, coll. «amÉrica», 2005, 132 p.

Expression non caniculaire

Il fait très chaud ces jours-ci à Montréal. L’Oreille tendue lit beaucoup de livres sur le hockey. (Ceci n’a aucun rapport avec cela.)

Elle tombe sur la phrase suivante, dans Sophie lance et compte (1991) de Louise Leblanc : «Les garçons s’arrêtent net-fret-sec, les yeux gelés d’étonnement» (p. 23).

«Net-fret-sec» ? Immédiatement, au Québec. «Fret» (à prononcer fret’) ? Froid. Dans le cas qui nous occupe, il s’agit donc de s’arrêter d’un coup, à froid, «les yeux gelés d’étonnement».

C’est possible, même en ces temps de canicule.

 

Référence

Leblanc, Louise, Sophie lance et compte, Montréal, La courte échelle, coll. «Premier roman», 22, 1991, 62 p. Illustrations de Marie-Louise Gay.