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Avec Pierre Popovic, nous proposions, dans le Village québécois d’aujourd’hui (2001), puis dans le Dictionnaire québécois instantané (2004), la définition suivante du mot souche : «A longtemps désigné ce que le bûcheron laissait derrière lui. Désigne maintenant le bûcheron lui-même.»

En 2004, nous définissions coupe (sentir la ~) ainsi : «Archaïsme hockeyistique. Rappelle le temps où la flanelle était sainte et les glorieux glorieux.»

Husqvarna fabrique, entre autres choses, des tronçonneuses. Sa plus récente publicité télévisée ? «Ça sent la coupe.»

Où le bûcheron rejoint l’amateur de hockey, autour d’une souche.

P.-S. — Pour les non-autochtones, un mot d’explication n’est peut-être pas inutile : l’équipe de hockey de Montréal s’appelle les Canadiens; on dit également la sainte flanelle et les Glorieux. Il fut un temps où cette équipe remportait plus souvent qu’à son tour la Coupe Stanley. Ce n’est plus le cas, malgré une brève fièvre collective printanière : alors, pour quelque jours, «Ça sent la coupe». L’expression a donné son titre à un roman de Matthieu Simard (2004).

 

Références

Melançon, Benoît et Pierre Popovic, le Village québécois d’aujourd’hui. Glossaire, Montréal, Fides, 2001, 147 p.

Melançon, Benoît, en collaboration avec Pierre Popovic, Dictionnaire québécois instantané, Montréal, Fides, 2004 (deuxième édition, revue, corrigée et full upgradée), 234 p. Illustrations de Philippe Beha. Édition de poche : Montréal, Fides, coll. «Biblio-Fides», 2019, 234 p.

Simard, Matthieu, Ça sent la coupe. Roman, Montréal, Stanké, 2004, 270 p. Rééd. : Montréal, 10/10, 2008, 256 p.

Benoît Melançon, avec la collaboration de Pierre Popovic, Dictionnaire québécois instantané, 2004, couverture

Chnoutte ? Vous avez dit schnoutte ?

Titre potentiellement sibyllin dans la Presse du 27 mars 2010 : «Le NTE dans la schnoutte» (cahier Arts et spectacles, p. 14). Mais qu’est-il donc arrivé au Nouveau théâtre expérimental ? Qu’est-ce que cette schnoutte ?

Première remarque : la graphie du mot n’est pas fixée. À côté de schnoutte, il y a, au moins, chnoutte.

Deuxième remarque : la chose désignée n’est pas unique, mais une caractéristique unit ses diverses incarnations : la viscosité (plus ou moins grande).

C’est clair dans le spectacle la Fin du NTE tel que décrit dans la Presse : Daniel Brière, le metteur en scène, use «d’une substance semi-liquide aux propriétés étonnantes : une matière malléable, presque vivante et extrêmement salissante que l’équipe de production a affectueusement baptisé la “schnoutte”. Durant le spectacle, il en coulera sur le décor, sur l’aire de jeu et… sur les acteurs.»

Composé d’un «mélange de fécule de maïs et d’eau, augmenté d’un additif utilisé pour conserver l’uniformité des mélanges de yogourt», ce «curieux coulis» a «quelque chose d’incontrôlable et d’organique».

«Incontrôlable» ? Cela vient du fait que la schnoutte est plus ou moins liquide. C’est la raison pour laquelle le mot est parfois utilisé en météorologie : «Aujourd’hui, il va tomber de la schnoutte» (radio de Radio-Canada).

«Organique» ? Voilà pourquoi on peut dire à quelqu’un de manger de la schnoutte, voire un char de schnoutte.

Vu sa polysémie, on utilisera le mot avec sobriété.

P.-S. — Comme le fait remarquer Ephrem Desjardins, chnoutte peut aussi être une interjection. Traduction libre : «Merde !»

 

[Complément du 5 février 2015]

Graphie rare : «schenoutte» (@_URBANIA).

 

[Complément du 10 avril 2019]

Le mot peut aussi servir de synonyme à pacotille : «En plus, c’était un magasin qui vendait juste d’la schnout !» (Centre d’achats, p. 68)

 

Références

Desjardins, Ephrem, Petit lexique de mots québécois à l’usage des Français (et autres francophones d’Europe) en vacances au Québec, Montréal, Éditions Vox Populi internationales, 2002, 155 p.

Jimenez, Emmanuelle, Centre d’achats, Montréal, Atelier 10, coll. «Pièces», 18, 2019, 127 p. Ill. Suivi de David Robichaud, «Contrepoint. Chercher le bonheur, trouver une robe jaune à paillettes».

Citation transatlantique du jour

Danielle Phaneuf, la Folle de Warshaw, 2004, couverture«Un Français l’avait larguée pour des raisons grammaticales. Scandalisé par sa parlure, il lui reprochait, ainsi qu’à l’ensemble des Québécois, son inaptitude à accorder les compléments d’objet direct avec l’auxiliaire avoir. Désaccordée, la Folle avait rompu les relations franco-québécoises en quittant brusquement la couche de l’académicien.»

Danielle Phaneuf, la Folle de Warshaw. Roman, Montréal, Marchand de feuilles, 2004, 193 p., p. 78.

Géographie urbaine

Il n’y a pas que le Plateau Mont-Royal dans la vie (montréalaise). Il y a aussi Notre-Dame-de-Grâce.

Ce quartier est souvent désigé par les lettres NDG prononcées à l’anglaise : enne-di-dji. C’est plus à l’Ouest, plus anglophone — et nettement plus exotique. La narratrice de Flora Balzano l’a bien vu : «Elle habitait N’Didji — ça m’avait plu. Ça me rappelait mon pays» (p. 97). Ce pays ? L’Algérie.

 

[Complément du 26 septembre 2015]

Il fut un temps où certains prétendaient que «NDG» signifiait «No Damn Good». À l’ère du hipster, on peut se demander s’il ne renvoie pas plutôt à «No Damn Gluten».

 

[Complément du 6 février 2016]

Version illustrée et romanesque (à paraître).

Nathalie Petrowski, Un été à NDG, 2016, couverture

(Merci à @revi_redac.)

 

[Complément du 24 juin 2019]

L’environnement est moins exotique dans le Suzanne Travolta d’Élisabeth Benoit (2019) :

Je suis entré dans à peu près toutes les maisons de la rue Oxford entre Côte-Saint-Antoine et Notre-Dame-de-Grâce, c’était partout pareil, toutes les maisons étaient en ordre. Les gens avaient un peu d’argent, ils avaient tous une femme de ménage, les maisons étaient en ordre, c’était comme ça (p. 74).

 

[Complément du 6 septembre 2019]

L’exotisme de François Hébert, dans Miniatures indiennes (2019), n’est pas celui de Flora Balzano : «Amis indiens [entendre : de l’Inde], c’est au Canada, à Montréal. Vous diriez probablement Enndidji» (p. 23).

 

[Complément du 16 mai 2023]

Publicité d’une agence immobilière locale : «Nid Douillet Garanti.»

 

Références

Balzano, Flora, Soigne ta chute, Montréal, XYZ, coll. «Romanichels», 1991, 120 p.

Benoit, Élisabeth, Suzanne Travolta. Roman, Paris, P.O.L, 2019, 251 p.

Hébert, François, Miniatures indiennes. Roman, Montréal, Leméac, 2019, 174 p.

Petrowski, Nathalie, Un été à No Damn Good, Montréal, Boréal, 2016, 288 p.