L’art du portrait notarié

Jean Echenoz, Au piano, 2003, couverture

«Ce personnage était de taille moyenne, étroitement habillé de gris bon marché, son long visage cireux dénotant une alimentation mal équilibrée, ses yeux chassieux larmoyaient. Il arborait un air soucieux de clerc de notaire sous-payé, dépressif, plus désolé que mécontent d’être soucieux mais à cela résigné.»

Jean Echenoz, Au piano. Roman, Paris, Éditions de Minuit, 2003, 222 p., p. 114.

Puisque vous le dites

Samuel Cantin, Phobies des moments seuls, 2011, p. 147

Soit les deux échanges suivants, sur Twitter.

1.

@oniquet : «Fred n’est plus très jeune, mais il est une force de la nature.»

@kick1972 : «Fred a à peu près mon âge donc IL EST TRÈS JEUNE TU SAURAS.»

2.

@TigrouMalin : «S’asseoir sur la banquette du passager un pied sur le gaz en plus.»

@kick1972 : «J’étais passager vous saurez !».

Donc : l’expression tu sauras / vous saurez.

Écartons d’abord une chose : ce n’est pas un lagacisme, même si elle est utilisée dans les deux exemples ci-dessus par la même personne, Patrick Lagacé (@kick1972).

Il s’agit d’une expression commune. Elle marque la contradiction, et une contradiction forte. Traduction libre : Vous croyez cela ? Eh bien, vous vous trompez pas à peu près.

C’est toujours bon à savoir.

 

[Complément du 16 juillet 2013]

Existe aussi sous la forme si tu veux savoir. Exemple, tiré d’Alexis, plonge et compte ! d’Yvon Brochu (1989) : «…je suis plus fort que tu penses, si tu veux savoir !» (p. 26).

 

[Complément du 17 juillet 2023]

Exemple romanesque, dans Kukum (2019), de Michel Jean : «Tu crois qu’on se tourne les pouces au campement ? On travaille autant que vous autres, tu sauras» (p. 65).

 

Illustration : Samuel Cantin, Phobies des moments seuls. Les carnets du docteur Marcus Pigeon, Montréal, Éditions Pow Pow, 2011, 157 p., p. 147.

 

Références

Brochu, Yvon, Alexis, plonge et compte !, Saint-Laurent, Pierre Tisseyre, 1989, 145 p. Illustrations de Daniel Sylvestre.

Jean, Michel, Kukum, Montréal, Libre expression 2019, 222 p.

Dictionnaire des séries 43

Au début d’une séquence de jeu, la rondelle est déposée sur la glace; c’est la mise au jeu. Il importe de la gagner, «c’est-à-dire, comme l’explique Simon Grondin dans le Hockey vu du divan, ramener la rondelle vers l’arrière afin de prendre possession de celle-ci et de contrer la possibilité d’une attaque immédiate» (p. 166).

L’expression s’emploie bien évidemment pour décrire les matchs.

Dès la mise au jeu
On a saisi la rondelle
Tricotant tous deux
Comme de vrais professionnels
(Les Jérolas, «Le sport», chanson, 1967)

Mais déjà, c’est l’heure de la mise au jeu
L’arbitre s’penche entre les joueurs de centre
(Mononc’ Serge, «Un team qui gagne», chanson, 2012)

Il existe au moins aussi un cas où elle est prise métaphoriquement.

La terre est mise au jeu au milieu de la Voie lactée
(Diane Dufresne, «La joute des étoiles», chanson, 1973)

P.-S. — Le Grand dictionnaire terminologique de l’Office québécois de la langue française accepte aussi bien mise au jeu que mise en jeu et qu’engagement (?).

 

[Complément du 5 février 2014]

Les 57 textes du «Dictionnaire des séries» — repris et réorganisés —, auxquels s’ajoutent des inédits et quelques autres textes tirés de l’Oreille tendue, ont été rassemblés dans le livre Langue de puck. Abécédaire du hockey (Montréal, Del Busso éditeur, 2014, 128 p., illustrations de Julien Del Busso, préface de Jean Dion, 978-2-923792-42-2, 16,95 $).

En librairie le 5 mars 2014.

Langue de puck. Abécédaire du hockey (Del Busso éditeur, 2014)

 

Référence

Grondin, Simon, le Hockey vu du divan, Québec, Presses de l’Université Laval, 2012, xvi/214 p. Ill.

Dictionnaire des séries 42

Bâton et ruban gommé

Un passe bien réussie doit se retrouver sur la palette du bâton de celui qui la reçoit.

Osti qu’c’est beau passe su’a palette
(Les Dales Hawerchuk, «Dale Hawerchuk», chanson, 2005).

Mieux encore : drette sur la palette.

Un gardien alerte
Des bonnes mises en échec
Des passes drette sur la palette
Pis des lancers précis et secs
(Loco Locass, «Le but», chanson, 2008)

 

[Complément du 20 décembre 2022]

L’expression peut être utilisée métaphoriquement : «Ma mère n’a jamais attendu que la vie lui fasse une passe sur la palette. Elle s’est toujours créé l’opportunité de scorer sans bâton ni rondelle» (Montréal-Nord, p. 139).

 

[Complément du 5 février 2014]

Les 57 textes du «Dictionnaire des séries» — repris et réorganisés —, auxquels s’ajoutent des inédits et quelques autres textes tirés de l’Oreille tendue, ont été rassemblés dans le livre Langue de puck. Abécédaire du hockey (Montréal, Del Busso éditeur, 2014, 128 p., illustrations de Julien Del Busso, préface de Jean Dion, 978-2-923792-42-2, 16,95 $).

En librairie le 5 mars 2014.

Langue de puck. Abécédaire du hockey (Del Busso éditeur, 2014)

 

Référence

Mazza, Mariana, Montréal-Nord, Montréal, Québec Amérique, coll. «QA récit», 2022, 204 p.