Onomastique cruelle

Lors de son arrivée chez les Canadiens de Montréal, le gardien de but Carey Price était perçu comme le Sauveur, d’où son surnom : Jesus Price.

Depuis, les choses se sont un rien gâtées. Comment le surnomme-t-on dans les cours d’école montréalaises ? Caprice (CArey PRICE).

Les enfants sont cruels.

P.-S. — Heureusement pour le principal intéressé, on prononce peu son nom, ces jours-ci, dans les rues exaltées de Montréal.

Patinoires intérieures

Le gardien de but des Canadiens de Montréal a fait preuve d’une belle alacrité dans la victoire des siens ce lundi. Il a en effet éclipsé les (redoutables) marqueurs des Capitals de Washington.

À un moment, Benoît Brunet, un des commentateurs du match au réseau de télévision RDS, a affirmé sans hésitation : «Jaroslav Halak est en train de jouer dans la tête des joueurs des Capitals.» Traduction libre : il les arrête, il les arrête, il les arrête — à force de les arrêter, il va les faire réfléchir, et trop réfléchir, ce qui va leur nuire dans la suite des séries éliminatoires.

L’image est forte : Halak, avec tout son équipement (patins, jambières, masque, gant, biscuit, etc.), dans la tête d’Ovechkin. On imagine sans mal que ça puisse ralentir Alexandre le Grand.

À suivre ce soir.

P.-S. — Sur le même sujet, le Journal de Montréal titrait, le 27 avril, «Halak majstrovský» («magistral en slovaque», expliquait-on entre parenthèses). À défaut de journalistes, ce quotidien utilise Google traduction.

 

[Complément du 22 janvier 2016]

Il n’y a pas que les opposants à pouvoir jouer dans votre tête : «On jouait très bien, je pense à la partie contre Los Angeles où Jonathan Quick a été extraordinaire, mais les défaites se sont mises à nous jouer dans la tête» (la Presse+, 22 janvier 2016).

Regret sportif

Victoire des Canadiens hier soir. En troisième période, sauf erreur de la part de l’Oreille tendue, l’entraîneur de l’équipe, Jacques Martin, n’a pas fait jouer du tout Marc-André Bergeron et Sergei Kostitsyn, et presque pas Benoît Pouliot et Glen Metropolit. En termes de hockey, cela s’appelle couper son banc (ne pas se servir de tous les joueurs qui se trouvent sur icelui). Or aucun commentateur, à la télévision, n’a employé l’expression.

Les traditions se perdent.

 

[Complément du 26 avril 2010]

Claude Quenneville, à la radio de Radio-Canada, racontait tout à l’heure que Scotty Bowman, l’ex-entraîneur des Canadiens de Montréal, avait un jour demandé à un employé du Forum, là où jouait l’équipe, de raccourcir (à la scie) le banc de l’équipe adverse, les Bruins de Boston, histoire de les embêter pendant un match. Couper son banc, mais au sens littéral.

La banlieue à la ville

Carte du Québec adjacent, Dictionnaire québécois instantané, 2004

Tous les Québécois le connaissent : le Plateau Mont-Royal — plus simplement : le Plateau —, ce quartier montréalais autour duquel tournerait l’univers connu. Les Québecquois — les habitants de la ville de Québec — ne l’aimeraient pas, dit-on, car l’univers connu tournerait autour.

Sa composition serait en train de changer, si l’on en croit le quotidien la Presse de ce samedi : «La sociologie du Plateau change» (13 mars 2010, p. A10). Le monarcoplatal ne serait plus ce qu’il était : «Il y a trois sources d’immigration principales : les Français, les anglophones francophiles attirés par la culture du quartier et les plateausards, les gens qui sont en moyens et qui sont à gauche, mais une gauche un peu caviar.»

Plateausard ? Un banlieusard établi en ville. Il n’est pas sûr que ce soit un mélioratif.

 

Référence

Melançon, Benoît, en collaboration avec Pierre Popovic, Dictionnaire québécois instantané, Montréal, Fides, 2004 (deuxième édition, revue, corrigée et full upgradée), 234 p. Illustrations de Philippe Beha. Édition de poche : Montréal, Fides, coll. «Biblio-Fides», 2019, 234 p. La «Carte du Québec adjacent» reproduite ci-dessus se trouve p. 13.

Benoît Melançon, en collaboration avec Pierre Popovic, Dictionnaire québécois instantané, 2019, couverture

Extension du monarcoplatal

Carte du Québec adjacent, Dictionnaire québécois instantané, 2004

La Presse de ce samedi s’interroge : «Le prochain “Plateau”. Hochelaga-Maisonneuve ou le Sud-Ouest ?» (cahier Mon toit, p. 2)

La question n’est pas nouvelle : «Saint-Henri, nouveau plateau ?» (la Presse, 6 janvier 2004, cahier Arts et spectacles, p. 3); «Un Plateau à Longueuil ?» (la Presse, 3 octobre 2005, p. A15)

Plateau ? En fait, Plateau Mont-Royal : quartier de Montréal en demande, car jugé branché, jeune, pluri-tout. Constitue le centre de l’univers connu, et au-delà. A même droit à son mot — substantif et adjectif —, créé par Pierre Popovic : monarcoplatal.

On se l’arrache, intra et extra muros.

 

Références

Melançon, Benoît, en collaboration avec Pierre Popovic, Dictionnaire québécois instantané, Montréal, Fides, 2004 (deuxième édition, revue, corrigée et full upgradée), 234 p. Illustrations de Philippe Beha. Édition de poche : Montréal, Fides, coll. «Biblio-Fides», 2019, 234 p. La «Carte du Québec adjacent» reproduite ci-dessus se trouve p. 13.

Popovic, Pierre, Liberté, 280 (50, 2), avril 2008, dossier «Dictionnaire culturel & politique du Québec», p. 21-24. https://id.erudit.org/iderudit/34680ac