Facile à démêler

«Mêlant», dans une publicité de BMO

Soit les trois phrases suivantes :

«C’est pas mêlant, on dirait que tout le monde à Dallas occupe ses loisirs en tripotant des bambins» (Document 1, p. 15).

«C’est pas mêlant, ça me rend malade» («Le crime ne paie pas», p. 32).

«C’est pas mêlant, je l’aurais étampé» (le Chemin d’en haut, p. 115).

Pas mêlant, donc, dans le français populaire du Québec.

Définition d’Usito : «C’est certain, indiscutable; […] à l’évidence.»

À votre service.

P.-S.—Inversement : «on peut comprendre que ce soit mêlant, parfois» (À boutte, p. 56).

 

Références

Blais, François, Document 1. Roman, Québec, L’instant même, 2012, 179 p.

Chabot, J. P., le Chemin d’en haut. Roman, Montréal, Le Quartanier, «série QR», 171, 2022, 224 p.

Chassay, Jean-François, «Le crime ne paie pas», dans les Lieux du combat. Nouvelles, Montréal, Leméac, 2019, 179 p., p. 25-33, p. 32.

Grenier, Véronique, À boutte. Une exploration de nos fatigues ordinaires, Montréal, Atelier 10, coll. «Documents», 2022, 82 p. Ill.

Lançons-nous

Anne-Marie Beaudoin-Bégin, la Langue rapaillée, 2015, couverture

Le Petit Robert (édition numérique de 2018) connaît deux sens du mot garrocher, propre à la langue familière du Québec : lancer; se précipiter.

Lancer ? Exemple en titre de chronique : «De l’art de garrocher un livre» (le Romancier portatif, p. 89-92).

Se précipiter ? Exemple poétique chez Marie-Hélène Voyer ici. Exemple en prose : «on s’est tous garrochés» (Des histoires d’hiver, p. 10).

Ajoutons un troisième sens, proche du premier : jeter, voire se débarrasser de. Exemple romanesque : «Si j’avais deux cent mille de plus à garrocher en rénovations pis dix ans de ma vie à mettre là-dedans» (Arvida, p. 257).

Le mot a déjà cours au XIXe siècle, mais en un usage un brin différent : «Une gang s’est mise après moi et ils m’ont garoché avec des cailloux» (les Mystères de Montréal, p. 45).

À votre service.

P.-S.—Garocher ou garrocher ? Anne-Marie Beaudoin-Bégin propose une mise au point utile dans la Langue rapaillée (p. 60-62).

 

Références

Archibald, Samuel, Arvida. Histoires, Montréal, Le Quartanier, coll. «Polygraphe», 04, 2011, 314 p. Ill.

Beaudoin-Bégin, Anne-Marie, la Langue rapaillée. Combattre l’insécurité linguistique des Québécois, Montréal, Somme toute, coll. «Identité», 2015, 115 p. Ill. Préface de Samuel Archibald. Postface de Ianik Marcil.

Berthelot, Hector, les Mystères de Montréal par M. Ladébauche. Roman de mœurs, Québec, Nota bene, coll. «Poche», 34, 2013, 292 p. Ill. Texte établi et annoté par Micheline Cambron. Préface de Gilles Marcotte.

Dickner, Nicolas, le Romancier portatif. 52 chroniques à emporter, Québec, Alto, 2011, 215 p.

Robitaille, Marc, Des histoires d’hiver avec encore plus de rues, d’écoles et de hockey. Roman, Montréal, VLB éditeur, 2013, 180 p. Ill.

Autopromotion 763

André Belleau, «Plans — Notes —Ébauches», 1969-1984, couverture, Service des archives et de gestion des documents, Université du Québec à Montréal, cote 119P-025/2 T-5

Depuis des lustres, l’Oreille tendue lit et commente André Belleau.

Elle vient de publier son plus récent texte sur lui, «André Belleau nouvelliste». Merci à la revue Sens public de l’accueillir.

Melançon, Benoît, «André Belleau nouvelliste. Notes insatisfaisantes», Sens public, revue numérique, rubrique «Chroniques», 21 mai 2024. URL : https://www.sens-public.org/articles/1758/ (HTML); https://www.sens-public.org/static/git-articles/SP1758/SP1758.pdf (PDF); https://doi.org/1866/33268 (PDF).

Saga, encore

Stade olympique, Montréal, photographie de Bernard Brault

On l’a appris la semaine dernière : le Stade olympique de Montréal vient de se découvrir de nouveaux problèmes.

Rien là de bien neuf, comme l’avait vu Monique Proulx, en 1996, dans les Aurores montréales :

Et maintenant, dehors dans l’obscurité fraîche, Pierrot admire le Stade olympique, que les admirables Montréalais paient depuis des lustres sans rechigner. Cet édifice qui ressemble à un spoutnik périmé le remplit d’une joie aiguë, cet édifice est la ville dans laquelle il se glissera tel un rat expérimental, il ira voir des matches, il examinera de près le toit qui a donné naissance à cette saga dans les journaux — modeste et pitoyable saga sans doute, à la mesure des drames collectifs d’ici (p. 27).

«Modeste», «pitoyable» — mais coûteuse.

 

Référence

Proulx, Monique, les Aurores montréales. Nouvelles, Montréal, Boréal, coll. «Boréal compact», 85, 2016, 238 p. Édition originale : 1996.