«La question se répétait, le ton montait, les mains aussi et pas pour lui expliquer avec des signes» (Marcello Vitali Rosati, «Milan», Navigations, 11 février 2013).
(Une définition du zeugme ? Par là.)
« Nous n’avons pas besoin de parler français, nous avons besoin du français pour parler » (André Belleau).
Soit la phrase suivante : Ça l’a l’air que c’est une chose à ne pas faire.
Comment désigner cette adjonction du «l» au verbe avoir après «ça» ?
S’agit-il d’une épenthèse ?
«Ling. Apparition à l’intérieur d’un mot d’un phonème non étymologique. L’épenthèse se produit pour adoucir des articulations inhabituelles. L’épenthèse du b dans nombre qui vient du latin “numerus”» (le Petit Robert, édition numérique de 2010).
Stricto sensu, non : le «l» ajouté à «a» («ça l’a») n’est pas «un phonème non étymologique» ajouté «à l’intérieur d’un mot» (l’Oreille tendue souligne).
Serait-ce un phonème éphelcystique ?
«Un phonème éphelcystique (du grec […], “attiré à la suite”) est, en phonétique, un phonème — la plupart du temps une consonne — ajouté à la fin d’un morphème ou d’un mot (c’est dans ce cas une paragoge) pour des raisons euphoniques, lesquelles sont le plus souvent la résolution de l’hiatus» (Wikipédia).
Exemples : «On tira-Z-à la courte paille (bis) pour savoir qui qui qui serait mangé (bis) (“Il était un petit navire”)» (@MrJeg57); «Il resta-T-au village, tout le monde l’aimait bien (“Le petit âne gris”)» (@MrJeg57).
Si «ça l’a» semble bien être lié à la «la résolution de l’hiatus», le «l» superfétatoire ne se situe pas «à la fin d’un morphème ou d’un mot» (bis).
Et si c’était, tout bêtement, une forme (fautive) de la prosthèse ?
«Ajout, au début [ter] d’un mot, d’une lettre ou d’une syllabe qui n’en modifie pas le sens : fr. populaire, un esquelette» (Dictionnaire des termes littéraires, p. 391).
Le débat reste ouvert.
Synonymes médiatiques
Pierre Foglia, dont c’est une des bêtes noires, parle de «lalaïsation», cette «lèpre» (la Presse, 4 octobre 2012, p. A10).
Antoine Robitaille, sur Twitter, propose «çalatisme» : «Karine Vallières, députée de Richmond, vient de nous sortir un joli “ça l’allait”.»
Référence
Van Gorp, Hendrik, Dirk Delabastita, Lieven D’hulst, Rita Ghesquiere, Rainier Grutman et Georges Legros, Dictionnaire des termes littéraires, Paris, Honoré Champion, coll. «Dictionnaires & références», 6, 2001, 533 p.
«Le jour est venu et moi aussi» (Patrick Bruel, «Place des grands hommes», 1990).
«A cottage built of lilacs and laughter» (Ella Fitzgerald, «Polka Dots and Moonbeams», 1974).
(Une définition du zeugme ? Par là.)
«Marge prit son courage à deux mains et cette bouteille de Tequila…»
«À bout de patience, elle lui a lancé des remarques désobligeantes, un camembert et une brique de cheddar doux…»
Josée Marcotte, Marge. En numérique : Saint-Cyr sur Loire, publie.net, coll. «Décentrements», 2010. En papier : Saint-Cyr sur Loire, publie.papier, 2013, 212 p.
(Merci à @ljodoin.)
(Une définition du zeugme ? Par là.)
Antonomase
Définition
«Une antonomase est une figure de style ou un trope, dans lequel un nom propre ou bien une périphrase énonçant sa qualité essentielle, est utilisé comme nom commun, ou inversement, quand un nom commun est employé pour signifier un nom propre. Certaines antonomases courantes finissent par se lexicaliser et figurent dans les dictionnaires usuels (“une poubelle”, “une silhouette”, “un don Juan”, “un harpagon”, “un bordeaux”, “le roquefort”, “le macadam”, “le gavroche”, etc.)» (Wikipédia).
Exemples, en trois tweets
«Station Villa-Maria : entendre un coup de klaxon puis voir passer un métro vide, qui ne s’arrête pas. Étrangeté de la vie souterraine de Mtl» (@benoitmelancon).
«au fait, @benoitmelancon, savais-tu que klaxon est une antonomase ? http://fr.wikipedia.org/wiki/Avertisseur_sonore» (@david_turgeon).
«@benoitmelancon @david_turgeon Surprenant ! Klaxon dans le même ensemble que Frigidaire, Jell-O et Post-it !» (@Lectodome).
Remarque
Twitter est (aussi) un formidable observatoire linguistique.