«Il tendit l’oreille. Il avait justement la bouteille à la main. C’était la dernière gorgée.»
Georges Simenon, les Fantômes du chapelier, Paris, Presses de la Cité, 1986 [1949], 189 p., p. 145.
« Nous n’avons pas besoin de parler français, nous avons besoin du français pour parler » (André Belleau).
«Il tendit l’oreille. Il avait justement la bouteille à la main. C’était la dernière gorgée.»
Georges Simenon, les Fantômes du chapelier, Paris, Presses de la Cité, 1986 [1949], 189 p., p. 145.
Soit la phrase suivante, tirée du plus récent ouvrage de Daniel Pennac :
Et je me revois empruntant le vocabulaire famélique de Tobias, adoptant cette espèce de maniérisme commercialo-administratif auquel Mélimé et lui nous ont habitués dès nos premiers jours (des histoires où l’on ne «tombe» pas mais où l’on «chute», où l’on ne «fait» pas mais où l’on «effectue», où l’on ne «meurt» pas mais où l’on «décède», où les «occasions» sont des «opportunités», où les événements ne vous «touchent» pas mais vous «impactent…», où l’on ne vous «répond» pas mais où l’on «revient vers vous»).
Merci à Luc Jodoin d’avoir tendu l’oreille et d’avoir repéré cette citation. Il a eu raison de penser que l’Oreille tendue allait se régaler.
Référence
Pennac, Daniel, le Cas Malaussène. I. Ils m’ont menti, Paris, Gallimard, 2016. Édition numérique.
Les fêtes de fin d’année sont parfois l’occasion de débats enflammés.
C’est arrivé à l’Oreille tendue le 1er janvier, comme cela lui était arrivé l’an dernier à pareille date et, en l’occurrence, dans les mêmes lieux et avec les mêmes personnes.
De quoi s’agissait-il cette année ? De la proposition de l’Oreille de créer un moratoire sur les œuvres romanesques racontées par un enfant.
Certains se sont mis à évoquer Fantasia chez les ploucs, d’autres l’œuvre de Réjean Ducharme, pour défendre cette pratique (caduque). Il s’en est même trouvé pour louanger Émile Ajar; c’est dire.
Précisons : l’Oreille ne souhaite pas censurer les romans à narrateur enfantin déjà publiés. Elle demande seulement qu’on s’abstienne d’avoir recours à ce procédé éculé à l’avenir.
Il n’est pas sûr qu’elle ait été entendue hier ni qu’elle le soit dans un futur proche.
(Accouplements : une rubrique où l’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)
Dans la Septième Fonction du langage de Laurent Binet (2015), le commissaire Jacques Bayard enquête sur l’accident dont a été victime Roland Barthes en 1980, et dont le célèbre critique mourra. Cela l’entraîne à Vincennes, où, dans la cafétéria de l’université, il entend une bande de «jeunes fans rassemblés autour [d’un] homme aux bottes de lézard mauve» scander «Spinoza encule Hegel ! Spinoza encule Hegel ! À bas la dialectique !» (éd. de 2016, p. 50)
Comment ne pas penser à la nouvelle de 1983 de Jean-Bernard Pouy intitulée «Spinoza encule Hégel» (accent aigu certifié d’origine) ?
P.-S. — Spinoza et Hegel se recroiseront chez Binet (p. 178), mais ils garderont leurs distances.
Sources des images : Wikipédia et Hegel Society of Great Britain
Références
Binet, Laurent, la Septième Fonction du langage. Roman, Paris, Librairie générale française, coll. «Le Livre de poche», 34256, 2016, 477 p. Édition originale : 2015.
Pouy, Jean-Bernard, «Spinoza encule Hégel», dans Patrick Raynal et Jean-Bernard Pouy, Very Nice, Paris, Albin Michel, coll. «Sanguine», 16, 1983, p. 169-250.
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