L’oreille tendue de… Simenon

Georges Simenon, la Tête d’un homme, couverture

«Et le prisonnier tâtait le mur, s’arrêtait parce qu’il avait heurté un caillou, tendait l’oreille, tellement blême, tellement saugrenu, avec ses bras interminables qui battaient le vide, que partout ailleurs on l’eût pris pour un ivrogne.»

Georges Simenon, la Tête d’un homme, dans les Essentiels de Maigret, présentation de Benoît Denis, Paris, Omnibus, coll. «Tout Simenon», 2011, p. 99-200, p. 104. Édition originale : 1931.

Portrait électrique du jour

Ancien ampèremètre

«Radek n’était pas maigre, et pourtant il était maladif, peut-être parce qu’on sentait que ses chairs n’étaient pas fermes. De même le bourrelet des lèvres avait-il quelque chose de malsain.

Il s’énervait d’une façon toute particulière, curieuse pour un psychologue; pas un trait de son visage ne bougeait, mais ses prunelles semblaient soudain recevoir un ampérage plus fort, qui donnait au regard une intensité gênante.

— Que va-t-on faire de Heurtin ? questionna-t-il après cinq minutes de silence.

— Le décapiter ! grogna Maigret, les deux mains dans les poches du pantalon.

Et ce fut l’ampérage maximum. Radek émit un petit rire grinçant.»

Georges Simenon, la Tête d’un homme, dans les Essentiels de Maigret, présentation de Benoît Denis, Paris, Omnibus, coll. «Tout Simenon», 2011, p. 99-200, p. 177. Édition originale : 1931.

L’oreille tendue de… Simenon

Georges Simenon, Maigret et les vieillards, couverture

«Au moment où Maigret lui parlait, elle ne le regardait pas et elle sembla ne pas l’avoir entendu. Il répéta sa question, d’une voix plus forte. Cette fois, elle pencha la tête, tendant sa bonne oreille.»

Georges Simenon, Maigret et les vieillards, dans les Essentiels de Maigret, présentation de Benoît Denis, Paris, Omnibus, coll. «Tout Simenon», 2011, p. 733-832, p. 743. Édition originale : 1960.

Accouplements 214

Extrait d’un échange de textos entre l’Oreille tendue et un de ses fils

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Depuis au moins 1892, une anecdote circule au sujet de la correspondance de Victor Hugo. Voulant savoir si son roman les Misérables était un succès, il aurait envoyé un télégramme d’un seul signe typographique à son éditeur : «?» Réponse : «!» Tout allait bien.

La situation est plus (é)tendue dans La neige était sale, un roman de 1948 de Georges Simenon : «Dans l’enveloppe, une feuille de papier, avec un point d’interrogation au crayon et une signature : Sissy. / Parce qu’il ne lui a pas fait signe la veille ! Elle pleure» (éd. de 2003, p. 64).

Il y a «faire signe» et «faire signe».

P.-S.—Oui, c’était avant l’invention du texto.

 

Référence

Simenon, La neige était sale, dans Romans. II, édition établie par Jacques Dubois, avec Benoît Denis, Paris Gallimard, coll. «Bibliothèque de la Pléiade», 496, 2003, p. 1-199 et 1503-1519. Édition  originale : 1948.