Surplace

Contenant de mélasse

Qui pédale dans le couscous, la choucroute, la semoule, la purée ou le yaourt a du mal, en arrache. Foi de Petit Robert (édition numérique de 2018), cette personne se trouve à «faire des efforts désordonnés et vains, [à] se dépenser en pure perte».

Variation sur le même thème chez José Saramago, dans Histoire du siège de Lisbonne : «patiner dans de la mélasse» (p. 104).

On n’avance pas plus.

 

Référence

Saramago, José, Histoire du siège de Lisbonne. Roman, Paris, Seuil, coll. «Points», P619, 1992, 341 p. Traduction de Geneviève Leibrich. Édition originale : 1989.

Accouplements 249

Bière Candide, de la brasserie Bockale

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Saramago, José, Histoire du siège de Lisbonne. Roman, Paris, Seuil, coll. «Points», P619, 1992, 341 p. Traduction de Geneviève Leibrich. Édition originale : 1989.

«les mots ne peuvent être transmis à la légère de maintenant à jadis et de jadis à maintenant, il faut être prudent, sans quoi aussitôt quelqu’un dit, Je ne comprends pas» (p. 33).

Magnan, André, Voltaire. Candide ou l’Optimisme, Paris, Presses universitaires de France, coll. «Études littéraires», 18, 1987, 125 p.

«“Optimisme” ne dit plus, en 1987, que nos humeurs quotidiennes — l’optimisme raisonnable de M. le Ministre ou de la météo du week-end. “L’Optimisme” de 1759-1761 disait quelque chose comme le Meilleur-mondisme» (p. 11 n. 1).

«“Candide ou [candide est ?] l’Optimisme”. Risquons la transposition : “Nunuche ou le Leibnizianisme”» (p. 12).

Ironie (involontaire) à la Saramago

José Saramago, Histoire du siège de Lisbonne, 1992, couverture

Raimundo Silva, le personnage principal d’Histoire du siège de Lisbonne, de José Saramago, fait partie de «la gent correctrice» (p. 100) dans une maison d’édition de Lisbonne : «c’est un homme qui écrit lentement, veillant sans relâche aux concordances, avare d’adjectifs, sourcilleux sur le chapitre de l’étymologie, pointilleux en matière de points et autres signes de ponctuation» (p. 154).

Il aurait été marri de quelques fautes dans la traduction de ce roman. Il y est écrit que l’auteur «est né en 1992» (p. 3), au lieu de 1922. Une virgule inutile s’invite dans une note, quand est évoqué «un des personnages principaux du roman de José Saramago, Le Dieu manchot» (p. 96 n. 1) — virgule inutile, sachant que Saramago a publié plus d’un roman. En revanche, dans «nous ne occupons pas de cinéma, ni de théâtre ni même de la vie» (p. 108), une virgule supplémentaire, avant le troisième «ni», aurait été bienvenue. À «un vieillard à la mine vénérable qui l’enjoignait d’avoir bon courage» (p. 144), Raimundo Silva aurait opposé un «qui lui enjoignait» — d’autant que la construction avec enjoindre est correcte page 316. Page 174, un trait d’union superflu dépare le deuxième paragraphe. Des «martiens» et des «terriens» sont orphelins de leur majuscule initiale (p. 260). Les majuscules ne sont pas accentuées. «Oiseux» ne devrait pas être confondu avec «oiseaux» (p. 267).

Qu’aurait dit Raimundo Silva, cet «humble et banal correcteur» (p. 294), devant cela ? On n’ose l’imaginer.

 

Référence

Saramago, José, Histoire du siège de Lisbonne. Roman, Paris, Seuil, coll. «Points», P619, 1992, 341 p. Traduction de Geneviève Leibrich. Édition originale : 1989.

L’art de la cryptophonie

José Saramago, Histoire du siège de Lisbonne, 1992, couverture

«Au milieu de l’après-midi le téléphone sonna, Raimundo Silva alla répondre, c’était la maison d’édition, les espoirs de la femme de ménage furent déçus, une conversation de travail, Oui, je suis disponible, disait-il, faites-moi parvenir l’original quand vous voudrez, madame, ou si vous préférez, j’irai le chercher moi-même, et le reste de la conversation fut à l’avenant, correction, délais, des monologues comme celui-ci madame Maria en avait entendus très souvent, la seule différence était l’interlocuteur inaudible, avant c’était un certain Costa, maintenant une dame quelconque, c’était peut-être pour cela que la voix de Raimundo Silva avait pris ce ton langoureux, langoureux était le terme de madame Maria, ah ces hommes, mais malgré toute sa perspicacité il ne lui vint pas à l’esprit que Raimundo Silva pût être en train de parler précisément à la femme avec qui il avait couché la nuit dernière, savourant le plaisir ineffable d’employer des mots neutres qu’eux seuls étaient en mesure de traduire dans une autre langue, celle de l’émotion, si évocatrice de sens, où prononcer livre était entendre baiser, dire oui était comprendre toujours, entendre bonjour était interpréter je t’aime. Si madame Maria avait eu quelques notions de l’art de la cryptophonie, elle serait partie en ayant percé à jour leur secret, riant de celui qui croyait pouvoir se rire d’elle, c’est une exagération, bien sûr, et que seul le dépit explique, car ni Raimundo Silva ni Maria Sara n’imaginent qu’ils font souffrir madame Maria et s’ils le savaient ils ne se moqueraient pas d’elle, sinon ils ne seraient pas dignes de ce qui leur arrive» (p. 306-307).

José Saramago, Histoire du siège de Lisbonne. Roman, Paris, Seuil, coll. «Points», P619, 1992, 341 p. Traduction de Geneviève Leibrich. Édition originale : 1989.