Les zeugmes du dimanche matin et de Louis Hamelin

Louis Hamelin, Autour d'Éva, 2016, couverture

«Bercée par la faible houle et le reflux de ses souvenirs au bout du quai, Éva aperçoit, se détachant au loin sur le fond sombre de la forêt, une tache blanche qui lui semble être une nouveauté dans le décor» (p. 16).

«Il incarne désormais, aux yeux du commun, le contraire de l’artiste assis sur son succès et son steak» (p. 67).

«Au milieu des velours et des ors vénérables du vieux théâtre qui fait salle comble pour la triomphale première du Bordel de l’eau, Éva, dans la peau et le fauteuil de la compagne en titre, a l’occasion de se rattraper» (p. 216).

«Aux côtés de Dave et d’Aubert prennent place Éva avec son bac en linguistique et son chômage [etc.]» (p. 249).

«Lui non plus ne maîtrise pas son taux de sucre, ni toujours très bien ce qui se passe entre ses deux oreilles» (p. 399).

Louis Hamelin, Autour d’Éva. Roman, Montréal, Boréal, 2016, 418 p.

 

(Une définition du zeugme ? Par .)

La concaténation téléphonique

Jean Dubuffet, «Le supplice du téléphone», 1944, Metropolitan Museum of Art

Soit les phrases suivantes :

«Décroche, passe à un autre appel, reviens sur terre» (Vie d’Anne-Sophie Bonenfant, p. 240).

«Comment ne pas espérer que l’on passe à un autre appel ?» (le Devoir, 3 mars 2017, p. B3)

Passer à un autre appel, donc. Au Québec, l’expression renvoie à la nécessité de laisser tomber, de passer à autre chose.

Pourquoi cette dimension téléphonique (appel) ? À cause de l’habitude des animateurs de tribunes téléphoniques (les lignes ouvertes) d’annoncer la fin d’une conversation et le passage à une autre par la formule «On passe à un autre appel».

 

Illustration : Jean Dubuffet, «Le supplice du téléphone», 1944, Metropolitan Museum of Art, New York

 

Référence

Blais, François, Vie d’Anne-Sophie Bonenfant. Roman, Québec, L’instant même, 2009, 241 p.

L’oreille tendue de… Louis Hamelin

Louis Hamelin, Autour d'Éva, 2016, couverture«Manon et Dubois occupent seuls la longue table en bois installée à l’avant en guise de tribune. Par les fenêtres, on aperçoit les rangs serrés d’épinettes noires cachant le lac. La paix du soir est telle que la rumeur de voix et de crissements de pieds de chaise qui monte de l’assistance n’empêche nullement de suivre, sans avoir besoin de tendre l’oreille, l’arrivée de chaque nouveau véhicule motorisé débouchant dans le parking du chalet scout, couvert, comme le chemin d’accès, de sable fauve, de fin gravier et de poussière blanche.»

Louis Hamelin, Autour d’Éva. Roman, Montréal, Boréal, 2016, 418 p., p. 66.