Histoire vague

La foule faisant la vague à la Coupe des confédérations à Francfort en 2005

Quiconque a déjà fréquenté un stade sait qu’y arrive souvent un moment où les spectateurs sont appelés à faire la vague (se mettre debout, une section après l’autre, en levant les bras, histoire de donner l’impression qu’une vague se déplace dans le stade).

L’origine de ce mouvement est obscure.

En anglais, Wikipédia donne ceci : «While there is general disagreement about the precise origin of the wave, most stories of the phenomenon’s origin suggest that the wave first started appearing at North American sporting events during the late 1970s and early 1980s.»

En français, c’est différent et pas plus probant : «Les avis divergent sur l’origine des olas. Elle semble être introduite à l’occasion d’un match universitaire de football américain au Michigan Stadium en 1983. L’année suivante, la première “vague” est signalée dans un stade de baseball de Ligue majeure à Détroit lors d’un match éliminatoire. / Le phénomène prend une notoriété planétaire lors de la Coupe du monde de football qui a lieu au Mexique en 1986. C’est d’ailleurs à cette occasion qu’elle prend son nom espagnol de ola, alors que les Américains la nomment the Wave (the Mexican wave en anglais britannique).»

Compliquons un peu les choses et allons au théâtre avec Françoise de Graffigny, au XVIIIe siècle. Que font les spectateurs au parterre ? Voici ce qu’elle écrit dans une lettre à François «Panpan» Devaux : «Ils ont fait des ondes tant qu’ils ont pu. Il y avoit de la place de reste; cependant ils avoient resolu d’aplatir ceux qui touchoient l’orquestre, mais ils n’ont pas reussit car ils etoient aussi fort — et les ondes d’aller» (Correspondance de Madame de Graffigny, vol. I, p. 369).

Charlotte Simonin, qui cite ce passage, le commente en ces termes : «les spectateurs imitent le mouvement de la mer en ondulant comme des vagues» (p. 106).

Aujourd’hui, une vague; jadis, des ondes.

À votre service.

 

Illustration : La foule faisant la vague à la Coupe des confédérations à Francfort en 2005, photo déposée sur Wikimedia Commons

 

Référence

Simonin, Charlotte, «Le théâtre dans le théâtre ou le spectacle de la salle à travers la correspondance de Mme de Graffigny», Lumen. Travaux choisis de la Société canadienne d’étude du dix-huitième siècle. Selected Proceedings from the Canadian Society for Eighteenth-Century Studies, XXII, 2003, p. 103-116. https://doi.org/10.7202/1012261ar

Accouplements 98

Anne-Renée Caillé, l’Embaumeur, 2017, couverture

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Denis Diderot à Sophie Volland, lettre du 15 octobre 1759 éditée par Jacques Chouillet dans Denis Diderot – Sophie Volland. Un dialogue à une voix, Paris, Librairie Honoré Champion, coll. «Unichamp», 14, 1986, 173 p., p. 169-173.

«Ceux qui se sont aimés pendant leur vie et qui se font inhumer l’un à côté de l’autre ne sont peut-être pas si fous qu’on pense. Peut-être leurs cendres se pressent, se mêlent et s’unissent. Que sais-je ? peut-être n’ont-elles pas perdu tout sentiment, toute mémoire de leur premier état» (p. 171).

Caillé, Anne-Renée, l’Embaumeur, Montréal, Héliotrope, «série K», 2017, 102 p.

«Deux corps brûlés en même temps, cela est arrivé, malgré ce qu’on dit, leurs cendres mélangées et mises dans une seule urne» (p. 69).

P.-S.—L’Embaumeur ? Par ici.

 

[Complément du 10 janvier 2019]

Le 17 juillet 1676, Mme de Sévigné, dans une lettre à sa fille, Mme de Grignan, aborde la circulation des cendres d’un point de vue un brin différent :

Enfin c’en est fait, la Brinvilliers est en l’air : son pauvre petit corps a été jeté, après l’exécution, dans un fort grand feu, et ses cendres au vent; de sorte que nous la respirerons, et que, par la communication des petits esprits, il nous prendra quelque humeur empoisonnante, dont nous serons tous étonnés (éd. Duchêne, vol. II, p. 342-343).

 

Référence

Sévigné, Mme de, Correspondance, Paris, Gallimard, coll. «Bibliothèque de la Pléiade», 3 vol., 1972-1978. Texte établi, présenté et annoté par Roger Duchêne.