L’art de bien (se) conduire

C’est de notoriété publique : l’Oreille s’intéresse depuis fort longtemps (voir ci-dessous) aux représentations de la fornication dans les moyens de transport.

Elle n’a donc pu que se tendre devant ce tweet :

S’accoupler dans un véhicule («a couple engaged in coitus»), elle voit à peu près comment. Mais en conduisant («while driving») ? Voilà qui n’est pas banal, foi d’Oreille.

P.-S. — L’Oreille est furieuse contre elle-même. Il y a jadis naguère, elle a lu une scène de fornication en moto, pendant que la moto roulait, dans un roman policier français. (Quelqu’un finissait décapité, si son souvenir est bon.) Elle est infoutue de retrouver le titre de ce roman. Elle s’en veut gros.

 

Référence

Melançon, Benoît, «Faire catleya au XVIIIe siècle», Études françaises, 32, 2, automne 1996, p. 65-81. https://doi.org/1866/28660

Le zeugme du dimanche matin et de Lesage

«Je leur representai que rien n’étoit plus facile que de nous rendre maîtres du vaisseau, si nous en attaquions l’équipage la nuit & à propos : qu’après cela nous reprendrions aisément nos propres Vaisseaux, & peut-être même la fregate Angloise.»

Alain-René Lesage, les Avantures de Monsieur Robert Chevalier, dit de Beauchêne, capitaine de flibustiers dans la nouvelle France, Paris, Ganeau, 1732, t. II, p. 259.

 

(Une définition du zeugme ? Par .)

De Proust à Voltaire et Updike, en autobus

Portrait de Marcel Proust en 1900

Il est déjà arrivé à l’Oreille tendue de parler de lecture à haute voix, parfois en contexte génital, parfois non.

L’autre jour, elle y a repensé en lisant le roman la Fiancée américaine d’Éric Dupont (2012) :

[Marcel Truchon, alias Bruno-Karl d’Ambrosio] n’avait pas terminé sa première semaine d’études [à l’École nationale de théâtre de Montréal] qu’un soir, assis dans l’autobus qui le ramenait chez lui, il commença à lire À la recherche du temps perdu à voix haute. Comme ça. «Longtemps je me suis couché de bonne heure. Parfois, à peine ma bougie éteinte…» et ne s’arrêta pas avant d’être arrivé chez lui. Il paraît qu’au début, les gens l’insultaient, lui ordonnaient de se taire. Tu t’imagines ? Proust dans l’est de Montréal pendant les années 1980 ? Des perles aux pourceaux ! Mais à force de persévérance, certains pourceaux finirent par prendre goût aux perles. Son initiative attira vite l’attention de journalistes qui se sont mis à réaliser des reportages depuis l’autobus 27 […]. Peu à peu, Bruno-Karl d’Ambrosio a attiré dans l’autobus 27 un public désireux d’entendre lire Proust à voix haute — et avec l’accent correct — de sorte que les passagers qui s’étaient montrés réfractaires à cette invasion de la culture dans leur quotidien se sont faits à cette lecture. Il paraît qu’il y avait des gens qui prenaient le 27 juste pour entendre un bout de Proust. C’est ce que j’appelle de la passion. Il ne fallut que quelques jours pour que son idée soit imitée dans les quatre coins de la ville. Sur le circuit 51, on se mit à lire du Voltaire. Les anglophones, pour ne pas être en reste, décidèrent d’assommer les passagers du circuit 144 avec une lecture de John Updike. Partout dans les autobus de Montréal, on se mit à lire. Bientôt, l’idée fut reprise à Toronto et aux États-Unis (éd. de 2015, p. 602-603).

 

Référence

Dupont, Éric, la Fiancée américaine. Roman, Montréal, Marchand de feuilles, 2015, 877 p. Édition originale : 2012.