Fil de presse 053

Charles Malo Melançon, logo, mars 2021

 

Parutions linguistiques chaudes, pour temps froid.

Bergounioux, Gabriel, les Origines de la sémantique de Franz Bopp à Michel Bréal, Limoges, Éditions Lambert-Lucas, coll. «Linguistique et sociolinguistique», 2024, 168 p.

Cahiers de lexicologie, 125, 2025, 249 p. Dossier «La connotation et la dénotation en terminologie», sous la direction de Rute Costa et Federica Vezzani.

Durand, Jacques et Chantal S. Lyche, Paul Passy, un linguiste révolutionnaire. Réforme de l’orthographe, didactique des langues, alphabet phonétique international, Limoges, Éditions Lambert-Lucas, coll. «Linguistique et sociolinguistique», 2024, 368 p.

Études de linguistique appliquée, 212, octobre-décembre 2023, 126 p. Dossier «Aux origines de la lexicographie. Pierre Richelet».

Etudes de linguistique appliquée, 214, 2024, 128 p. Dossier «Les interjections dans les dictionnaires monolingues, bilingues, spéciaux et de spécialité», sous la direction de Valerio Emanuele, Francesco Paolo, Alexandre Madonia et Danguole Melnikien.

Etudes de linguistique appliquée, 215, 2024, 128 p. Dossier «Langue française et F/francophonie : vecteurs d’employabilité et de développement ? Regards sur l’Afrique et l’Asie», sous la ditrection dIsabelle Bokhari et Danh-Thành Do-Hurinville.

European Journal of Language Policy, 16, 2, 2024.

Fàbregas i Alegret, Immaculada et Mercè Pujol Berché (édit.), Antoni Badia i Margarit. La llengua per damunt de tot. La langue par-dessus tout, Perpignan, Presses universitaires de Perpignan, coll. «Joan Lluís Vives», 2024, 120 p.

Finegan, Edward et Michael Adams (édit.), The Cambridge Handbook of the Dictionary, Cambridge, Cambridge University Press, 2024.

Le Français préclassique, 26, 2024, 190 p. Dossier «La terminologie à la Renaissance».

Garner, Bryan A. et Jack Lynch, Hardly Harmless Drudgery. A 500-Year Pictorial History of the Lexicographic Geniuses, Sciolists, Plagiarists, and Obsessives Who Defined the English Language, Jaffrey, David R. Godine, Publisher, 2024, 520 p.

GLAD ! Revue sur le langage, le genre, les sexualités, 17, 2024. Dossier «Langues de vipères ! Genre, animalité et langage», sous la direction de Perrine Beltran, Jeanne Mousnier-Lompré, Clara Lyonnais-Voutaz et Joséphine Guichard.

Journal of English Lexicology, special issue, 3, 2024. Dossier «The Impact of Multilingualism on the Vocabulary and Stylistics of Medieval English».

Khanh Dang, Hong (édit.), Variations francophones. Vers une Francophonie renouvelée, Paris, Éditions du Félin, 2024, 416 p.

Král, Françoise, la Colère des langues. Imaginaires polyglottes à l’ère de la mondialisation, Paris, Classiques Garnier, coll. «Littérature, histoire, politique», 61, 2024, 205 p.

Le Pipec, Erwan, Quel breton parle-t-on à l’école ? Enquête dans une classe bilingue de cycle 3, Paris, L’Harmattan, coll. «Enfance éducation et société», 2024, 330 p.

Meney, Lionel, la Sociolinguistique entre science et idéologie, Limoges, Éditions Lambert-Lucas, coll. «Linguistique et sociolinguistique», 2024, 128 p.

Mise au point, 19, 2024. Dossier «Langues minoritaires à l’écran : mémoires et revendications», sous la direction de Patricia Caillé et Florence Martin.

Mots. Les langages du politique, 136, 2024. Dossier «Les mots des “guerres culturelles”. Entre enjeux discursifs et visées argumentatives», sous la direction de Alma-Pierre Bonnet, Denis Jamet-Coupé et Cédric Passard.

Pruvost, Jean, 100 mots latins pour bien écrire 1000 mots français, Paris, Les Belles Lettres, coll. «Les petits latins», 19, 2024, 168 p. Illustrations de Djohr.

Ratcliff, Marc J., le Tournant linguistique du XVIIIe siècle. Études d’histoire de la langue scientifique, Genève, Droz, coll. «Travaux d’histoire éthico-politique (Bibliothèque des Lumières)», 2024, 496 p.

Salazar, Philippe-Joseph, Contre la rhétorique. Comment les mots des démagogues prennent le pouvoir, Paris, Éditions du Cerf, 2024, 192 p.

Schang, Béatrice, Enseigner la grammaire au collège. De la préparation de la séance de langue à sa mise en œuvre, Paris, Dunod, 2024, 240 p.

Siouffi, Gilles, Paris-Babel. Histoire linguistique d’une ville-monde, Arles, Actes Sud, 2025, 368 p.

Sprenger-Charolles, Liliane, Anne Abeillé et Bernard Cerquiglini, Rationaliser l’orthographe du français pour mieux l’enseigner. Synthèse de la recherche et recommandations, Paris, ministère de l’Éducation nationale et de la jeunette, Conseil scientifique de l’éducation nationale, juin 2024, 38 p.

Danger !

Image de glaçons

Il peut arriver, au Québec, qu’il fasse froid (frette); c’est le cas ces jours-ci.

En pareille période, des choses, souvent liées à l’habitation, peuvent péter au frette, des clous, par exemple. Elles explosent.

Les emplois figurés de l’expression ne manquent pas. Deux exemples :

«Je lis donc beaucoup plus : des essais, des romans qui éclairent les enjeux actuels avec le recul nécessaire pour ne pas péter au frette» (la Presse+, 3 octobre 2023).

«Les notes de bas de page [dans Dis-moi Céline]devraient également provoquer des roulements d’yeux au Québec, plus précisément celles qui viennent expliquer chaque expression locale. Ainsi, on souligne que “beurrer épais” signifie “exagérer, en faire trop”, que “travailler fort en titi” veut dire “beaucoup, en grande quantité”, que “péter au frette” signifie “mourir, tomber d’épuisement”, qu’“avoir les yeux dans graisse de bines” veut dire “se lever fatigué”, et qu’une “toune” est synonyme de “chanson”» (la Presse+, 5 octobre 2023).

Pierre DesRuisseaux multiplie les synonymes : «Mourir subitement, crever de froid, abandonner, avoir perdu la raison, être éliminé» (p. 238).

Le Dictionnaire des francophones va dans le même sens que lui : «Se briser, cesser de fonctionner à cause du froid»; «Mourir, faire une crise cardiaque ou une crise de nerfs ou tomber d’épuisement à cause d’émotions fortes ou de surmenage»; «Projet, entreprise, objet qui cesse de fonctionner en raison d’une pression ou d’une tension trop grande.»

À votre (frigorifique) service.

 

Référence

DesRuisseaux, Pierre, Trésor des expressions populaires. Petit dictionnaire de la langue imagée dans la littérature et les écrits québécois, Montréal, Fides, coll. «Biblio • Fides», 2015, 380 p. Nouvelle édition revue et augmentée.

Quand la construction va…

Grue chinoise, Saint-Roch-de-l’Achigan, Québec, juillet 2016

«Personne physique ou morale qui donne un travail à un travailleur indépendant» : voilà la définition que donne le Grand dictionnaire terminologique du donneur d’ouvrage. Le GDT associe l’expression au monde de la traduction.

Sous donneur d’ordre(s), Usito propose ceci : «personne ou organisation qui commande l’exécution d’un travail en sous-traitance suivant un cahier des charges». On est dans le même univers de la délégation.

Au Québec, on voit fréquemment l’expression donneur d’ouvrage dans le domaine de la construction. On peut entendre alors doublement le mot ouvrage : l’ouvrage est ce que l’on construit; le mot désigne aussi le travail («Je me suis trouvé de l’ouvrage»), encore que cet emploi soit peut-être en déclin.

Jusqu’à la lecture de la Presse+ du 13 janvier, l’Oreille tendue ignorait que les motard criminels (pas criminalisés) pratiquaient la chose : «Ces gangs, qui rendaient autrefois des services aux Hells Angels, se sont affranchis, sont devenus des organisations criminelles autonomes et structurées, ont des contacts ailleurs au Canada ou à l’étranger, et défient maintenant, dans la violence, leurs anciens donneurs d’ouvrage motards.»

On n’arrête pas le progrès.

P.-S.—Oui, en effet, les Hells deux fois en une semaine, c’est inattendu.

Les rustines des Hells

Kevin Lambert, Tu aimeras ce que tu as tué, éd. de 2021, couverture

Soit la phrase suivante, tirée du premier roman de Kevin Lambert, Tu aimeras ce que tu as tué : «Toutes les bâtisses de Chicoutimi sont construites sur une faille patchée par du béton et de l’asphalte» (p. 191).

Cela peut être appliqué à la pompe sanguine : «mon cœur / Y est patché plein de trous», chantait Gerry Boulet, du groupe Offenbach, dans «Faut que j’me pousse» (1969).

Patché(e) ? Rapiécé(e), dans le français populaire du Québec. Le mot y est féminin : une patch.

Ce n’est pas tout. Le patch, en informatique, c’est la rustine. En médecine, un médicament. Le mot est alors masculin, du moins en français de référence. Pas au Québec, où on a surtout recours au féminin. (Oui, c’est une divergence transatlantique.)

Ne nous arrêtons pas en si bon chemin. Qui, dans la hiérarchie des motards criminels, qu’on dit parfois parfois et bizarrement criminalisés, grimpe les échelons gagne ses patchs. Le mot est dangereux.

À votre service.

 

Référence

Lambert, Kevin, Tu aimeras ce que tu as tué. Roman, Montréal, Héliotrope, «série P», 2021, 209 p. Édition originale : 2017.