Ta tête est mon vélo

Bixi est le système de vélos en libre-service de Montréal.

Une de ses publicités pourrait étonner le non-autochtone :

«Casse-toi pas le bicycle. Abonne-toi», publicité pour le Bixi, 2019

Qu’est-ce que ce «bicycle» qu’il ne faudrait pas «se casser» ?

Au cours d’une de nos aventures d’octobre 2018, nous avons vu que le mot «bicycle» fait partie d’une chaîne de synonymes qui renvoient tous au vélo. Ce n’est pas tout à fait de celui-là qu’on parle, même si l’association d’idées est évidemment voulue.

Au Québec, pour des raisons obscures, le «bicycle» peut aussi désigner la tête.

Bref, ne vous en faites pas, ne vous cassez pas la tête. Bixi est là pour vous.

Autopromotion 433

«Génocide industriel» (pancarte, Montréal, 2014)

Aujourd’hui, vers 13 h 15, l’Oreille tendue sera à l’émission Là-haut sur la colline d’Antoine Robitaille, sur Qub radio, pour parler langue et politique.

Il devrait être question d’énergie et de tutoiement, et peut-être aussi de la langue de Justin Trudeau. Vaste programme.

 

[Complément du jour]

On peut (ré)entendre l’entretien ici.

 

Références

Bosworth, Yulia, «The “Bad” French of Justin Trudeau : When Language, Ideology, and Politics Collide», American Review of Canadian Studies, 49, 1, 2019, p. 5-24. https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/02722011.2019.1570954

Tremblay, Frédéric, «Tutoiement, sacres et démocratie», la Presse+, 30 mai 2015. http://plus.lapresse.ca/screens/e45eea23-d33d-4b59-9e74-095b55fbe34e__7C___0.html. Réactions des lecteurs, 1er juin 2019 : http://plus.lapresse.ca/screens/c6e5c6b7-4959-436a-b11e-af08a6a56fa4__7C___0.html

Enbridge, publicité, le Devoir, 1er-2 juin 2019

Proposition de moratoire du lundi pluvieux

Logo de Netflix

Soit trois phrases tirées du quotidien le Devoir :

«Le géant de l’informatique [Apple] aligne les stars afin de rivaliser avec les Netflix de ce monde» (26 mars 2019, p. B7).

«On saura si les Netflix de ce monde ont reçu des traitements de faveur» (7 mai 2019).

«Qu’une star de ce calibre veuille se pencher sur un projet aussi délicat en apparence pouvait rassurer Hulu, une plateforme qui commence sérieusement à toiser les Netflix de ce monde […]» (18-19 mai 2019, p. 35).

Laissons Netflix tranquille, mais faisons un usage plus parcimonieux du syntagme «de ce monde».

Merci à l’avance.

Explication de texte du mardi matin

Jean-Philippe Baril Guérard, Royal, 2018, couverture

Soit la phrase suivante, tirée de Royal, de Jean-Philippe Baril Guérard (2016) :

Mon mec est en train de me domper. Ce savant mélange de québécois et de français que seule une Stanislasienne utiliserait (éd. de 2018, p. 153).

La phrase n’est peut-être pas compréhensible pour tous les lecteurs de l’Oreille tendue. Essayons d’y voir plus clair.

La Stanilasienne est une (ex)élève du Collège Stanislas de Montréal. Cet établissement offre «l’enseignement de programmes et l’emploi de méthodes pédagogiques conformes aux directives du ministère français de l’Éducation nationale, en les adaptant au contexte québécois et aux préalables nécessaires à l’admission dans les universités québécoises» (dixit «Stan» lui-même). On pourrait notamment y acquérir un «accent faussement français» (p. 29).

Le «québécois» serait une langue différente du «français». Ce n’est évidemment pas vrai : au Québec, on parle français, pas québécois.

Le «savant mélange» ferait se rencontrer du français réputé hexagonal («mec» : compagnon, conjoint) et un anglicisme du cru («domper», to dump : jeter, se débarrasser de, laisser tomber, abandonner).

Bref, c’est le récit, banal encore que montréalais, d’une rupture amoureuse en cours.

 

Référence

Baril Guérard, Jean-Philippe, Royal. Roman, Montréal, Éditions de Ta Mère, 2018, 287 p. Édition originale : 2016.