Conseil impératif du jour

Alexandre Vialatte, Un abécédaire, 2014, couverture

«N’ayant pas le temps d’être bref, je serai peut-être un peu long, mais je donnerai des conseils utiles.

Et d’abord, pour les verbes en er : jamais d’s à l’impératif.

N’écrivez pas : aimes, accueilles, ou pardonnes. Mais tue, étripe, écorche, assomme, fusille. Vous posséderez la vérité.»

Alexandre Vialatte, «Problèmes du mois», la Montagne, 5 juin 1962, cité dans Un abécédaire, choix des textes et illustrations par Alain Allemand, Paris, Julliard, 2014, 266 p., p. 233.

P.-S. — Le début de la citation vous fait penser à la seizième des Provinciales de Pascal ? Vous avez l’oreille : «Je n’ai fait celle-ci plus longue que parce que je n’ai pas eu le loisir de la faire plus courte.»

 

[Complément du 16 février 2015]

P.-P.-S.—L’Oreille tendue a présenté ce texte de Vialatte le 16 février 2015.

Pascal et le P. Noël

L’Oreille tendue a eu l’occasion de montrer que le fait de mettre une majuscule là où il faut une minuscule, ou l’inverse, risque de troubler les lecteurs.

Exemple récent, découvert sur Gallica.

On y trouve les Pensées, fragments et lettres de Blaise Pascal, publiés pour la première fois conformément aux manuscrits originaux en grande partie inédits, par M. Prosper Faugère (Paris, Andrieux, 1844, 2 vol.). En appendice, le «Catalogue des ouvrages de M. Pascal, tant imprimés que manuscrits, dont j’ai (le P. Guerrier) connaissance» contient une «Lettre de M. Pascal au R. P. Noël, jésuite, touchant le vide» (XXII). Celle-ci est suivie d’une «Lettre de M. Pascal à M. Lepailleur, au sujet de sa dispute avec le père Noël» (XXIII).

Une majuscule à «Père Noël» aurait fait désordre.

P.-S. — Le moment est venu : une catégorie «Typographie» existe désormais, là, en bas, à droite.

 

[Complément du 19 décembre 2012]

«Arrive un âge où les enfants, vaguement dubitatifs quant à l’existence du Père Noël, semblent se raccrocher au pari de Pascal», écrit Éric Chevillard dans le blogue l’Autofictif le 17 décembre 2012. (Merci à @david_turgeon.)

Pauvre vieux

Portrait de Fontenelle

Parler d’air du temps ou d’esprit de l’époque ferait plouc : la chronique s’intitule donc «Zeitgeist». C’est dans le Devoir, sous la plume de Josée Blanchette.

Son article du 28 janvier s’intitule «Quand vieux rime avec heureux. Le bonheur, c’est comme l’eau» (p. B10). Il est précédé d’une citation : «Le plus grand secret pour le bonheur, c’est d’être bien avec soi.» C’est signé «Bernard Fontenelle».

Qui est ce «Bernard Fontenelle» ? S’agirait-il de Bernard Le Bovier de Fontenelle, né à Rouen en 1657, mort à Paris en 1757 à quelques jours de son centenaire ?

Oui, c’est lui. La phrase que le Devoir lui attribue se trouve bel et bien dans son traité Du bonheur (p. 49).

Il eut été fort marri de se voir devenu, comme n’importe quel quidam, un Bernard Fontenelle.

 

Référence

Fontenelle, Du bonheur par M. de Fontenelle suivi d’Aphorismes et de l’Essai sur l’histoire, Paris, Éditions d’art Édouard Pelletan, Helleu et Sergent, éditeurs, coll. «Philosophes et moralistes», 7, 1926, xxi/148 p. Ill. Préface de Luc Benoist. Portrait d’après Rigaud. Ornements de G. Corvel.