Un nouveau membre de l’École de la tchén’ssâ

L’École de la tchén’ssâ

Le 19 mai 2012, l’Oreille tendue enfantait un mouvement littéraire, l’École de la tchén’ssâ. Ce texte a eu des échos inattendus (voir ici et ).

De quoi s’agit ? Rappel de la définition originale.

Cette école est composée de jeunes écrivains contemporains caractérisés par une présence forte de la forêt, la représentation de la masculinité, le refus de l’idéalisation et une langue marquée par l’oralité.

[…]

Il n’est pas nécessaire d’être un homme pour faire partie de l’École de la tchén’ssâ, mais plusieurs personnages que représentent ses membres sont des hommes, saisis dans un décor non urbain, souvent un fusil à la main. Parfois, ils se contentent d’une canne à pêche.

L’écriture réaliste des auteurs tchén’ssâ ne recule devant aucune matière. Le sang coule dans leurs textes au moins autant que l’huile à moteur. […] Ce réalisme n’est évidemment pas incompatible avec la création de mythologies personnelles ou avec des passages proches de la littérature fantastique.

Elle s’applique parfaitement au roman Panache. 1. Léthargie de Sylvain Hotte (né en 1972). Ça se déroule au Québec, dans un village anonyme de la Côte-Nord et dans la forêt qui l’entoure, où Alexandre McKenzie, le narrateur, croise un orignal au panache impressionnant. Ce jeune hockeyeur étoile de quinze ans découvre que la vie autour de lui n’est pas toujours rose (alcoolisme, toxicomanie, pauvreté, dépendance économique). Il est à la recherche de modèles masculins, entre son père autochtone à la merci des compagnies forestières et un ami mécanicien toujours en train de bidouiller voitures, bateaux, quatre-roues et ski-doos. Alexandre utilise constamment la langue populaire québécoise, avec ses particularismes (on rince ou on torche son moteur, quand on sort du chemin c’est pour prendre le clos) et son recours à l’anglais, adapté en français (chiller, shooter, spiner) ou pas (game, moves, net, wheely, weirdo, etc.).

Et il y a bien sûr ceci :

Je me suis assis sur un tréteau de bois pendant que Michel rangeait quelques outils. J’ai, évidemment, remarqué la nouvelle Miss Octobre du calendrier Stihl : une fille en maillot de bain rose tenant une grosse scie à chaîne, à cheval sur un tronc d’arbre (p. 44);

J’ai trouvé refuge dans le coin chasse et pêche [du Canadian Tire] où j’ai regardé quelques cannes en bambou. Vraiment belles. L’an prochain, je veux une belle canne à moucher pour aller au saumon (p. 147).

C’est trop beau pour être vrai.

 

Référence

Hotte, Sylvain, Panache. 1. Léthargie, Montréal, Les Intouchables, coll. «Aréna», 1, 2009, 230 p.

Sylvain Hotte, Panache. 1. Léthargie, 2009, couverture

Autopromotion 073

Spectacles sportifs, dispositifs d’écriture, 2013, couverture

L’ouvrage collectif Spectacles sportifs, dispositifs d’écriture vient de paraître. L’Oreille tendue y parle hockey et chanson.

Table des matières ci-dessous.

 

Diana, Jean-François (édit.), Spectacles sportifs, dispositifs d’écriture, Nancy, Questions de communication, série «Actes», 19, 2013, 357 p. Publié par les Presses universitaires de Lorraine. ISBN : 978-2-8143-0141-2; ISSN : 1633-5961.

Commandes en ligne : http://www.lcdpu.fr/revues/questionsdecommunication/

 

Diana, Jean-François, «Les écritures de sport», p. 7-16.

Privat, Jean-Marie, «La piscine… ou de l’écrit sans écriture», p. 17-24.

Féménias, Damien et Jean Maurice, «Le rugby tel qu’il se livre. 120 ans d’ouvrages de sport», p. 25-46.

Popovic, Pierre, «Poupou et Maître Jacques dans l’imaginaire social des années 60. Essai de sociocritique», p. 47-62.

Tétart, Philippe, «Les chants du sport, 1888-1928», p. 63-80.

Melançon, Benoît, «Chanter les Canadiens de Montréal», p. 81-92. https://doi.org/1866/28751

Valois-Nadeau, Fannie, «Quand “l’histoire se joue ici”», p. 93-108.

Borges Buarque de Hollanda, Bernardo, «Football, modernisme et musique populaire brésilienne. Remarques sur l’invention du “pays du football”», p. 109-121.

Segura M. Trejo, Fernando, «Diego Armando Maradona : vers une interprétation de la trajectoire de vie de l’icône», p. 123-135.

Villaret, Sylvain et Philippe Tétart, «La construction médiatique d’une icône sportive : Yannick Noah (1978-1991)», p. 137-153.

Bauer, Thomas, «Grandeur et désillusion du boxeur : Toboggan (1934) d’Henri Decoin», p. 155-165.

«Iconographie», p. 167-170.

Huitorel, Jean-Marc, «Un artiste et le sport. Le cas de Roderick Buchanan», p. 171-179.

Hamers, Jeremy, «Football et art contemporain : exposition fragmentée et narration mosaïque», p. 181-189.

Chazaud, Pierre, «Les enjeux esthétiques et politiques du sport du XXe siècle», p. 191-197.

Lefevre, Betty, «Spectacles sportifs et performances artistiques : regards croisés sur le récit de la construction de soi», p. 199-212.

Dietschy, Paul, «Raconter la guerre, faire renaître le sport : les dilemmes de la presse sportive pendant la Grande Guerre», p. 213-226.

Souanef, Karim, «Sport et écriture journalistique : une rencontre sous tensions», p. 227-239.

Marcellini, Anne, Éric de Léséleuc et Estelle Lebel, «Les photographies de presse des athlètes handicapés. De l’analyse d’une “image-objet” à quelques réflexions sur sa réception», p. 241-251.

Diana, Jean-François, «Les écritures de l’émotion sportive. Le cas de la photographie de presse», p. 253-264.

Sizorn, Magali, «Les cérémonies d’ouverture des Jeux Olympiques : images sur paroles», p. 265-277.

Lenoir, Christophe, «Construction énonciative et qualification culturelle des spectacles sportifs. La fonction du commentaire», p. 279-293.

Bonnet, Valérie, «Tennis et écrans multiples : logique et esthétique de la fragmentation», p. 295-310.

Laborde, Barbara, «France/RFA 1982, France/Italie 2006 : lectures pragmatiques de fictions votives», p. 311-320.

Wille, Fabien, «Une modélisation de l’identité générique du spectacle sportif médiatisé», p. 321-334.

Montañola, Sandy, «Fictions et directs sportifs : le téléspectateur et les représentations de la boxe anglaise», p. 335-348.

Autobiographie des objets du hockey

Lecture, l’autre jour, de Lance et Klonk (1994) de François Gravel et découverte de ceci :

Et puis tu te souviens sûrement de ce chronométreur, au Forum de Montréal, qui s’organisait toujours pour que l’horloge arrête sur un chiffre pair. Les amateurs de hockey pariaient sur le temps du dernier but en achetant des billets…
— Sur lesquels il n’y avait que des chiffres impairs, je me souviens, oui. Mais il y a longtemps de ça, non ? (éd. de 1995, p. 51)

L’Oreille tendue se souvient, elle aussi. Mais il manque quelque chose à la description de François Gravel.

Cela est chez Michel Lefebvre dans Je suis né en 53… Je me souviens (2005) :

je me souviens des billets de loterie clandestine de hockey à 25 ¢, pliés en deux et agrafés, sur lesquels était inscrit un temps de 0:01 à 19:59 qui devait correspondre, pour qu’il soit gagnant, au temps du premier but ou à celui du dernier; je me souviens aussi qu’on avait mis au jour la passe : s’il n’y avait jamais beaucoup de gagnants, c’est que le chronométreur officiel arrêtait le cadran du forum sur un temps pair ou impair selon le gros des billets émis pour une partie donnée (p. 70).

Se souvenir parfaitement de ces billets dans les mains de son grand-père et d’une photo des joueurs des Canadiens de Montréal, sur leur banc, regardant sans comprendre le tableau indicateur.

Vouloir relire l’Autobiographie des objets de François Bon.

P.-S. — Dans un ordre d’idées semblable, sur Twitter, continuer à suivre la série #trackMég de @reneaudet.

 

Références

Bon, François, Autobiographie des objets, Paris, Seuil, coll. «Fiction & Cie», 2012, 244 p.

Gravel, François, Lance et Klonk, Montréal, Québec/Amérique Jeunesse, coll. «Bilbo», 53, 1995, 128 p. Illustrations de Pierre Pratt. Édition originale : 1994.

Lefebvre, Michel, Je suis né en 53… Je me souviens, Montréal, Hurtubise HMH, coll. «amÉrica», 2005, 132 p.

Expression non caniculaire

Il fait très chaud ces jours-ci à Montréal. L’Oreille tendue lit beaucoup de livres sur le hockey. (Ceci n’a aucun rapport avec cela.)

Elle tombe sur la phrase suivante, dans Sophie lance et compte (1991) de Louise Leblanc : «Les garçons s’arrêtent net-fret-sec, les yeux gelés d’étonnement» (p. 23).

«Net-fret-sec» ? Immédiatement, au Québec. «Fret» (à prononcer fret’) ? Froid. Dans le cas qui nous occupe, il s’agit donc de s’arrêter d’un coup, à froid, «les yeux gelés d’étonnement».

C’est possible, même en ces temps de canicule.

 

Référence

Leblanc, Louise, Sophie lance et compte, Montréal, La courte échelle, coll. «Premier roman», 22, 1991, 62 p. Illustrations de Marie-Louise Gay.

Modeste proposition de moratoire sportivo-littéraire

Le 1er avril dernier, rendant compte du livre le Hockey vu du divan (2012) de Simon Grondin, l’Oreille tendue évoquait un moratoire sur le découpage en trois périodes des ouvrages (ou des films) portant sur le hockey. Elle revient à la charge.

En effet, ce type de découpage est trop fréquent. Des exemples ?

Claude Dionne, Sainte Flanelle, gagnez pour nous ! (2012).

Alain M. Bergeron, la Coupe du hocquet glacé (2010).

Gaël Corboz, En territoire adverse (2006).

Luc Cyr et Carl Leblanc, Mon frère Richard (1999).

Raymond Plante, Jacques Plante (1996).

Michel Bujold, l’Amour en prolongation (1990).

André Simard, la Soirée du fockey (1972).

Cette liste est sûrement incomplète. Bref : on arrête svp.

 

[Complément du 17 août 2018]

Les trois prises du jour

Le Chandail de hockey / The Hockey Sweater (2006).

Bernard Pozier, Les poètes chanteront ce but (1991).

Yves Tremblay, Guy Lafleur. L’homme qui a soulevé nos passions (2013).

 

[Complément du 29 décembre 2018]

Deux autres ? Deux autres.

Catellier, Maxime, Mont de rien. Roman en trois périodes et deux intermèdes (2018).

Baruchel, Jay, Born into It. A Fan’s Life (2018).

 

[Complément du 5 novembre 2021]

Ce qui affectait les livres et les films touche maintenant les menus, par exemple à la magnifique exposition consacrée à Serge Lemoyne. Ce n’est pas mieux.

Café Québecor, Maison des beaux-arts du Québec, 5 novembre 2021

[Complément du 22 mars 2023]

On apprend, dans la Presse+ du jour, que le Cirque du Soleil est en train de concevoir un spectacle sur Guy Lafleur. Comment sera-t-il découpé ? «Guy ! Guy ! Guy ! sera structuré en suivant les trois périodes d’un match de hockey […]». Personne ne sera étonné.

 

Références

Baruchel, Jay, Born into It. A Fan’s Life, Toronto, Harper Avenue, 2018, 249 p.

Bergeron, Alain M., la Coupe du hocquet glacé. Miniroman de Alain M. Bergeron — Fil et Julie, Québec, Éditions FouLire, coll. «Le chat-ô en folie», 9, 2010, 45 p.

Bujold, Michel, l’Amour en prolongation. Poésies hérotiques, Montréal, Éditions d’Orphée, 1990, s.p.

Catellier, Maxime, Mont de rien. Roman en trois périodes et deux intermèdes, Montréal, L’Oie de Cravan, 2018, 123 p.

Le Chandail de hockey / The Hockey Sweater, cédérom, 3D Courseware/ Les Éditions 3D, 2006. Conception de Donna Mydlarski, Dana Paramskas, André Bougaïeff et Larry Katz.

Corboz, Gaël, En territoire adverse, Saint-Lambert, Soulières éditeur, coll. «Graffiti», 37, 2006, 164 p.

Cyr, Luc et Carl Leblanc, Mon frère Richard, documentaire de 53 minutes, 1999. Production: Ad Hoc Films.

Dionne, Claude, Sainte Flanelle, gagnez pour nous ! Roman, Montréal, VLB éditeur, 2012, 271 p.

Grondin, Simon, le Hockey vu du divan, Sainte-Foy (Québec), Presses de l’Université Laval, 2012, 214 p. Ill.

Plante, Raymond, Jacques Plante. Derrière le masque, Montréal, XYZ éditeur, coll. «Les grandes figures», 9, 1996, 221 p. Ill.

Pozier, Bernard, Les poètes chanteront ce but, Trois-Rivières, Écrits des Forges, coll. «Radar», 60, 1991, 84 p. Ill. Réédition : Trois-Rivières, Écrits des Forges, 2004, 102 p.

Simard, André, la Soirée du fockey. Le temps d’une pêche. Le vieil homme et la mort, Montréal, Leméac, coll. «Répertoire québécois», 40, 1974, 92 p. Préface de Normand Chouinard.

Tremblay, Yves, Guy Lafleur. L’homme qui a soulevé nos passions, Brossard, Un monde différent, 2013, 208 p. Ill. Préface de Guy Lafleur.