Divergences transatlantiques 074

Affiche de la série télévisée Cerebrum, 2019

Le correspondant de l’Oreille tendue dans la Cité des Anges a récemment regardé, sur TV5, la série télévisée québécoise Cerebrum. Cette série en français était sous-titrée en français.

Dans les sous-titres, le verbe aviser («Je vais aviser mon équipe») était remplacé par informer.

La chose étonne un brin : tant le Petit Robert que le Larousse donnent aviser et informer comme synonymes. Pourquoi remplacer le premier par le second ?

Québécois et français seraient-ils séparés par une langue commune ?

P.-S.—En matière de sous-titrage, citons cette perle de Jérôme Garcin dans la livraison du 19 novembre 2023 de l’émission de radio le Masque et la plume : «Simple comme Sylvain est un film en québécois sous-titré en français.» Rappelons pour ceux qui auraient dormi durant la leçon qu’il n’existe aucune langue qui s’appellerait «le québécois».

Les zeugmes du dimanche matin et de Maylis de Kerangal

Maylis de Kerangal, Naissance d’un pont, éd. de 2020, couverture

«Sanche ne connaît ni le vertige ni la difficulté de travailler en solitaire dans un espace restreint, il a le sens de l’équilibre et des responsabilités, celui de la sécurité — les grues sont dangereuses sur un grand périmètre —, enfin il est doué d’une formidable capacité de concentration : il a trouvé sa place.»

«Sanche accourt à la table, zigzague dans la salle pleine et moite, parmi les fronts qui ruissellent, les bouches humectées d’alcool et d’allégations débiles […].»

Maylis de Kerangal, Naissance d’un pont, Paris, Gallimard, coll. «Folio», 5339, 2020, 336 p. Édition numérique. Édition originale : 2010.

 

(Une définition du zeugme ? Par .)

Autopromotion 743

«Anatomie», deuxième volume des planches de l’Encyclopédie, Paris, 1762, planche VI

La 593e livraison de XVIIIe siècle, la bibliographie de l’Oreille tendue, est servie.

La bibliographie existe depuis le 16 mai 1992. Elle compte 70 000 titres.

N.B.—Le moteur de recherche (ici) connaissait des ratés depuis quelque temps. C’est réparé.

Illustration : «Anatomie», deuxième volume des planches de l’Encyclopédie, Paris, 1762, planche VI

Accouplements 225

L’Oeil de l’ermite et l’Échiquier, couvertures, collage

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

La Charité, Claude, l’Œil de l’ermite. Fiction en pièces détachées, Longueuil, L’instant même, 2023, 237 p. Ill.

«Déjà enfant, j’aimais être seul. Quand on a annoncé la fermeture des universités le vendredi 13 mars, j’ai éprouvé la fébrilité des écoliers, tout à leur joie d’échapper à la classe à cause de — ou plutôt grâce à — la tempête de neige. Cette pandémie est tombée sur moi comme une bénédiction. Elle allait me libérer des contraintes de la vie sociale. Des réunions inutiles. Des discussions de couloir oiseuses. Des débats hystériques sur l’avènement de l’utopie en ce bas monde, à grand coups d’équité, de diversité et d’inclusion. […] Tout cela, j’allais enfin le laisser derrière moi, en claquant la porte. Pour me livrer à l’écriture de ma fiction sur l’ermite Toussaint Cartier» (p. 31-32).

Toussaint, Jean-Philippe, l’Échiquier, Paris, Éditions de Minuit, 2023, 244 p. Ill.

«De plus en plus souvent, j’ai conscience maintenant que, plus tard, dans quelques mois ou dans quelques années, je verrai cette période comme une période particulièrement heureuse de ma vie. Là où intervient la dualité de la pensée, c’est que ce bonheur supposé que j’imagine que je vais ressentir rétrospectivement en repensant à cette période, je ne le perçois pas pour le moment. Je sais que, plus tard, en repensant à ces journées de confinement, je me dirai que j’avais été heureux dans mon bureau à Bruxelles à travailler à ce nouveau livre, mais ce bonheur que je me promets depuis le futur, je n’en vois pas la couleur pour l’instant, je n’en éprouve aujourd’hui aucun des agréments.

En somme, depuis le début du confinement, je vis heureux sans le savoir» (p. 114-115).