Les zeugmes du dimanche matin et de Robert Melançon

Robert Melançon, le Paradis des apparences, 2004, couverture

«L’étendue que déploie le printemps,
S’étale dans le parc et dans la mémoire,
Sous les pas et sous le crâne — verte.

On marche dans la rue que le soleil
Repeuple de promeneurs et dans l’idée
Qu’on se forme d’une rue en avril.

On passe à tout instant de la chambre
Qu’on édifie de souvenirs vrais ou faux,
À l’entassement des faits minuscules

Dont se fabrique chaque instant : le va-et-vient
Des voitures, le vent, le vol des oiseaux,
Qui ne porte d’augure que si on y tient.»

Robert Melançon, le Paradis des apparences. Essai de poèmes réalistes, Montréal, Éditions du Noroît, 2004, 144 p., p. 62

 

(Une définition du zeugme ? Par .)

Autopromotion 732

«Anatomie», deuxième volume des planches de l’Encyclopédie, Paris, 1762, planche I

La 584e livraison de XVIIIe siècle, la bibliographie de l’Oreille tendue, est servie.

La bibliographie existe depuis le 16 mai 1992. Elle compte 68 894 titres.

Illustration : «Anatomie», deuxième volume des planches de l’Encyclopédie, Paris, 1762, planche I

Non merci, Google

Google, publicité québécoise, 2023, «Économise 22 % de gaz»

Publicité de Google dans un quotidien québécois : «Google Maps aide les gens à prendre des décisions plus durables grâce à l’option d’itinéraires écoénergétiques.» Illustration : «Économise 22 % de gaz.»

Même programme en France : «Économisez 27 % d’essence.»

Au Québec, on tutoierait tout le monde, pas en France.

Au Québec, on utiliserait «gaz», au lieu d’«essence», dans la langue publique.

Non et non, Google. Vous pouvez les vouvoyer et utiliser «essence»; les Québécois comprendront.

En effet, ils parlent français.

P.-S.—Ce n’est pas la première fois que l’Oreille tendue râle contre la langue des publicitaires.

Google, publicité française, 2023, «Économisez 27 % d’essence»

Accouplements 218

J.-H. Bernard, Manuel de diction. Parlons bien, 1905, p. 9

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Vinzenz Rohrer est joueur de hockey.

«C’est difficile, toutes les règles pour prononcer les mots. En espagnol, si je vois un mot, je sais comment le prononcer. Mais en français, il y a tellement de règles.» Il cite les mots «chien» et «Autrichien», et clairement, la prononciation nasale lui donne des difficultés. «Ça sonne comme du chinois pour moi ! Je peux rouler les “r”, on le fait en allemand. Mais ce son est difficile. C’est comme le “a” et le “u” deviennent un “o”. Et la dernière lettre d’un mot, est-ce que je la prononce ? Comment suis-je censé le savoir ?» (la Presse+, 9 novembre 2023)

Maria Candea est linguiste.

Pendant longtemps, l’écriture a été dissociée de l’orthographe. On apprenait d’abord à écrire et puis ensuite, éventuellement, à «mettre l’orthographe» en lien avec l’étude du latin et du grec. À l’époque, jusqu’au XIXe-XXe, l’orthographe n’est vraiment pas destinée à tous : c’est une pratique de distinction sociale. Cela a posé beaucoup de problèmes quand, à la fin du XIXe, avec la démocratisation de l’enseignement, il s’est agi d’enseigner à tout le monde quelque chose qui avait justement été inventé pour ne pas être pour tout le monde. On souffre actuellement de cette situation-là dans l’enseignement, par rapport à d’autres langues romanes comme l’espagnol, dont l’orthographe respecte bien davantage la prononciation et non l’étymologie (Ballast, 8 septembre 2017).

Vinzenz Rohrer et Maria Candea disent la même chose.