La télévision au Moyen Âge

Francis Gingras, un collègue, et néanmoins ami, de l’Oreille tendue, donnait samedi dernier une grande conférence à Paris. Quelques heures (!) plus tard, une revue numérique publiait ce texte passionnant sur ce que représente et sur ce qu’a représenté le Moyen Âge en Amérique du Nord. Il est en libre accès ici.

Les sous-titres de «Un autre Moyen Âge et le Moyen Âge des autres : les études médiévales vues d’Amérique» sont particulièrement réjouissants : «Les belles histoires des pays d’antan», «Le temps d’une paix», «Moi et l’autre». Les amateurs de télévision québécoise apprécieront.

P.-S. — Ce qui prédispose les médiévistes à travailler pour la CIA est expliqué au paragraphe 41.

P.-P.-S. — L’Oreille a déjà dit un mot du Québec et du Moyen Âge; c’était .

 

Référence

Gingras, Francis, «Un autre Moyen Âge et le Moyen Âge des autres : les études médiévales vues d’Amérique», article électronique, Perspectives médiévales. Revue d’épistémologie des langues et littératures du Moyen Âge, 37, 2016. https://doi.org/10.4000/peme.11022

Le hockey, sport maritime

Dans son livre sur le lexique du hockey, Langue de puck (2014), l’Oreille tendue signalait que ce sport a une forte dimension liquide : on peut faire prendre une tasse de café à un adversaire, l’embouteiller dans sa zone, même si son coup de patin est fluide, sans avoir besoin de se paqueter un club.

Le hockey a aussi une dimension maritime.

L’équipe perdante baisse pavillon. Le filet du gardien de but pourrait sortir de ses amarres (mais c’est un contresens : le filet n’est pas retenu par un cordage). D’un cerbère qui s’agite, étendu, généralement à l’embouchure de sa cage, on dit qu’il nage. Bien qu’il ne soit pas possible de faire une passe dans le courant, on peut en faire une à contre-courant; il ne faut cependant pas qu’elle soit flottante. On s’attend à un effort constant de tous les membres de l’équipe : pas de passager, décrète-t-on.

Tout cela sur la glace, ce qui est un brin paradoxal.

 

Référence

Melançon, Benoît, Langue de puck. Abécédaire du hockey, Montréal, Del Busso éditeur, 2014, 128 p. Préface de Jean Dion. Illustrations de Julien Del Busso.

Langue de puck. Abécédaire du hockey (Del Busso éditeur, 2014), couverture

Fortune du Rocket

[Tu causes, tu causes, puis arrive le jour où tu publies le 2500e billet de ton blogue. Ce jour, c’est aujourd’hui.]

Il y a deux lustres, l’Oreille tendue faisait paraître un ouvrage sur le plus célèbre joueur (Maurice Richard, 1921-2000) de la plus célèbre équipe de hockey (les Canadiens de Montréal). Une question traversait l’ouvrage : comment expliquer la pérennité de ce mythe ?

La question reste d’actualité si l’on en croit un article paru aujourd’hui dans le quotidien québecquois le Soleil. Sous le titre «René Lévesque, icône du Québec», la journaliste Patricia Cloutier présente les travaux d’une équipe de chercheurs de l’Université Laval et du Musée de la civilisation de Québec en interviewant deux de ses membres, Jocelyn Létourneau et Johanne Daigle.

Soixante photos ont été soumises à 427 personnes, à qui on posait la question suivante : «Parmi les 60 images proposées, choisissez les 10 images que vous considérez comme les plus représentatives du Québec et de son histoire, et les 5 images que vous considérez comme les moins représentatives du Québec et de son histoire.» La troisième image la plus souvent choisie, dans la première catégorie, est celle de Richard (par 45 % des répondants), derrière le portrait de René Lévesque (55 %) et une photo illustrant le référendum sur la souveraineté-association de 1980 (47 %).

Richard serait «associé à l’identité “canadienne-française rebelle”. Choisi autant par les anglophones que par les francophones, il véhicule le mythe du héros et touche à notre sport national, décrit comme la “religion moderne” des Québécois par un répondant.»

Le Rocket ne risque pas de disparaître du panthéon québécois à court ou à moyen terme.

P.-S. — Les résultats détaillés de l’enquête ont été publiés dans la revue Histoire sociale.

 

Références

Létourneau, Jocelyn, Claire Cousson, Lucie Daignault et Johanne Daigle, «Le mur des représentations : images emblématiques et inconfortables du passé québécois», Histoire sociale / Social History, 48, 97, novembre 2015, p. 497-548. https://doi.org/10.1353/his.2015.0043

Melançon, Benoît, les Yeux de Maurice Richard. Une histoire culturelle, Montréal, Fides, 2006, 279 p. 18 illustrations en couleurs; 24 illustrations en noir et blanc. Nouvelle édition, revue et augmentée : Montréal, Fides, 2008, 312 p. 18 illustrations en couleurs; 24 illustrations en noir et blanc. Préface d’Antoine Del Busso. Traduction : The Rocket. A Cultural History of Maurice Richard, Vancouver, Toronto et Berkeley, Greystone Books, D&M Publishers Inc., 2009, 304 p. 26 illustrations en couleurs; 27 illustrations en noir et blanc. Traduction de Fred A. Reed. Préface de Roy MacGregor. Postface de Jean Béliveau. Édition de poche : Montréal, Fides, coll. «Biblio-Fides», 2012, 312 p. 42 illustrations en noir et blanc. Préface de Guylaine Girard.

Les Yeux de Maurice Richard, édition de 2012, couverture

Le niveau baisse ! (1841)

(«Le niveau baisse !» est une rubrique dans laquelle l’Oreille tendue collectionne les citations sur le déclin [supposé] de la langue. Les suggestions sont bienvenues.)

 

«On ne sait presque plus le français, on ne l’écrit plus, on ne le parle plus. Si la décadence continue, cette belle langue deviendra une sorte de jargon à peine intelligible.»

Source : Félicité Robert de Lamennais, Discussions critiques et pensées diverses sur la religion et la philosophie, Paris, Pagnerre, éditeur, 1841, 293 p., p. 230.

 

Pour en savoir plus sur cette question :

Melançon, Benoît, Le niveau baisse ! (et autres idées reçues sur la langue), Montréal, Del Busso éditeur, 2015, 118 p. Ill.

Benoît Melançon, Le niveau baisse !, 2015, couverture