Accouplements 216

Anonyme, Pot à moutarde et bock, Japon, circa 1690-circa 1730

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

«L’inquiétude et la mélancolie sont des condiments à l’écriture» (Jean-Philippe Toussaint, France Inter, 26 octobre 2023).

«La morale est la sauce de l’ame» (Jean-Jacques Rutlidge, le Bureau d’esprit, Londres, 1777, seconde édition, revue, corrigée, et augmentée, 144 p., p. 13).

 

P.-S.—Oui, ce Rutlidge-là.

 

Illustration : Anonyme, Pot à moutarde et bock, Japon, circa 1690-circa 1730, Rijksmuseum, Amsterdam

Accouplements 215

Collage des couvertures des livres de Claire Legendre et de Capucine Delattre

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Croyez-le ou non : l’Oreille a déjà été petite. Étudiante, elle entendait autour d’elle la phrase «Le privé est politique». Puis, jeune professeure, elle a pensé donner un cours sur les incipits romanesques. L’accouplement du jour — le mot est de circonstance — marie ces deux souvenirs.

Legendre, Claire, Vérité et amour. Roman, Paris, Grasset, 2013, 302 p.

«Sarkozy a été élu et nous avons cessé de faire l’amour» (p. 9, incipit).

Delattre, Capucine, Un monde plus sale que moi, Montreuil, La ville brûle, 2023, 280 p.

«La première fois que j’ai fait l’amour, j’avais 17 ans et deux mois, c’était l’automne, et Harvey Weinstein était en une du New York Times» (incipit).

Accouplements 214

Extrait d’un échange de textos entre l’Oreille tendue et un de ses fils

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Depuis au moins 1892, une anecdote circule au sujet de la correspondance de Victor Hugo. Voulant savoir si son roman les Misérables était un succès, il aurait envoyé un télégramme d’un seul signe typographique à son éditeur : «?» Réponse : «!» Tout allait bien.

La situation est plus (é)tendue dans La neige était sale, un roman de 1948 de Georges Simenon : «Dans l’enveloppe, une feuille de papier, avec un point d’interrogation au crayon et une signature : Sissy. / Parce qu’il ne lui a pas fait signe la veille ! Elle pleure» (éd. de 2003, p. 64).

Il y a «faire signe» et «faire signe».

P.-S.—Oui, c’était avant l’invention du texto.

 

Référence

Simenon, La neige était sale, dans Romans. II, édition établie par Jacques Dubois, avec Benoît Denis, Paris Gallimard, coll. «Bibliothèque de la Pléiade», 496, 2003, p. 1-199 et 1503-1519. Édition  originale : 1948.

Accouplements 213

Philippe Didion, «note palindrome, Épinal (Vosges), 6 décembre 2014»

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Le premier collectionne les tickets de caisse. Le second, les grammaires.

«Grâce aux moyens de communication dont on dispose aujourd’hui, on finit toujours par apprendre que quelqu’un est allé plus loin que soi dans n’importe quel domaine, quelle que soit l’originalité dont on pensait avoir fait preuve en croyant le découvrir ou l’inventer. C’est magique» (Philippe Didion, Notules dominicales de culture domestique, 10 septembre 2023).

«Le plus étonnant est que ce vice solitaire, dont je crains qu’il ne déclenche des réactions d’exaspération parmi les linguistes (une bibliothèque d’autodidacte comme la mienne n’a sans doute aucun sens pour eux), peut créer ou renforcer des liens. Avec un peu de temps et d’énergie, il serait tout à fait possible de lancer un club, une franc-maçonnerie, une mafia, une secte — l’une des leçons qu’on apprend à force de fréquenter Internet, c’est qu’aucun cinglé n’est seul de son espèce» (Jean-Pierre Minaudier, Poésie du gérondif. Vagabondages linguistiques d’un passionné de peuples et de mots, Le Rayol Canadel, Le Tripode, 2014, 157 p., p. 13).

Le premier ? Par ici.

Le second ? Par .

Accouplements 212

Moshe Safdie, If Walls Could Speak, 2022, couverture

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Safdie, Moshe, If Walls Could Speak. My Life in Architecture, New York, Grove Atlantic, 2022, 352 p. Ill.

«By five o’clock, I am back at my desk [au siège social de son entreprise d’architecure à Somerville, Massachusetts]. Emails have begun to accumulate, and some need an immediate response — queries from our field offices in Singapore, Shanghai, and Jerusalem. At any given moment, our firm has projects worth several billion dollars in some phase of development. The projects are spread across twelve time zones» (p. 6-7).

Lambert, Kevin, Que notre joie demeure, Montréal, Héliotrope, 2022, 381 p.

«Céline partageait aujourd’hui son temps entre le siège social de Montréal et les studios de Taipei, de New York, de Tokyo, de Vancouver, de Miami, de Chicago, de Londres, d’Abu Dhabi, de Paris et de Los Angeles (où elle vivait, il est vrai, la moitié de l’année), œuvrant dans le domaine architectural, qui demeurait son secteur prioritaire, tout en adaptant son approche créative à des domaines aussi variés (et dans lesquels elle ne s’impliquait parfois que de très, très loin) que l’urbanisme, l’architecture de paysage, le design, le graphisme, le dessin industriel, la production de mobilier résidentiel et urbain, la création d’images et de maquettes, la scénographie et, depuis une dizaine d’années, les applications pour téléphones portables et la production télévisuelle. Dans son dernier palmarès, Forbes […] la plaçait au 203e rang des milliardaires internationaux et au 16e dans la liste composée de femmes, estimant sa fortune à 7,2 milliards de dollars. Une des plus imposantes au Canada (p. 124-125).

 

P.-S.—Une autre citation de Kevin Lambert, plus longue encore ? Ici.