Soit la phrase suivante, tirée du Devoir du 23 décembre 2013 : «Pas de souci, ça électrise en titi […]» (p. B8).
En titi ?
On trouvait deux fois la même expression dans le deuxième tome de Motel Galactic (2012), la bande dessinée de Francis Desharnais et Pierre Bouchard, dont une fois sur une pancarte (p. 9; voir aussi p. 8).

On l’entendait également dans une publicité télévisée récente d’une chaîne de restaurants. Une mère la suggérait à son jeune fils, qui était horrifié à l’idée de l’utiliser.
Son sens ? Le contraire du (pe)ti(t) : beaucoup, très, et voire même très beaucoup.
On comprend le jeune garçon : l’expression est bien faible en terre de sacres. (Elle est faible en titi.)
P.-S. — Le Petit Robert (édition numérique de 2014) connaît cette «locution adverbiale» régionale («Canada»), mais pas son étymologie. Il paraît peu plausible de la chercher du côté du «nom masculin» titi, «Gamin déluré et malicieux», d’essence parisien.
[Complément du 2 janvier 2014]
Débat animé sur Twitter l’autre jour au sujet de l’origine de l’expression en titi. Tous s’entendaient pour dire qu’il s’agit d’un superlatif et d’une euphémisation — mais de quoi ?
@PimpetteDunoyer, dans les commentaires ci-dessous, penchait pour «en estie», forme elle-même euphémisée de «en hostie». @beloamig_ cita le Dictionnaire québécois-français. Mieux se comprendre entre francophones de Lionel Meney : «ce serait une variété atténuée de “en maudit”» (p. 1739). Appuyée sur la tradition familiale, Anne Marie Messier, aussi dans les commentaires, proposait «en sapristi», expression venue, elle, de «sacristi», sans «e» (le Petit Robert, édition numérique de 2014).
(Sur un registre plus léger, @Voluuu évoquait «en ouistiti» et @desrosiers_j, «Nefertiti».)
Cela mène à d’autres interrogations. Utiliser un euphémisme à la place de «en estie» peut se comprendre. C’était peut-être vrai aussi, mais à une autre époque, de «en maudit». Mais on ne voit guère pourquoi un euphémisme serait nécessaire à la place de «en sapristi».
Au risque de la répétition : tant de questions existentielles, si peu d’heures.
Références
Desharnais, Francis et Pierre Bouchard, Motel Galactic. 2. Le folklore contre-attaque, Montréal, Éditions Pow Pow, 2012, 101 p.
Meney, Lionel, Dictionnaire québécois-français. Mieux se comprendre entre francophones, Montréal, 1999 et 2003.