Des nouvelles de l’École de la tchén’ssâ

 

À la Librairie Olivieri, hier soir, le magazine culturel Spirale lançait son 250e numéro (automne 2014). On y trouve un dossier intitulé «Territoires imaginaires», conçu par Martine-Emmanuelle Lapointe et Samuel Mercier-Tremblay.

L’Oreille tendue y publie un texte, «J’ai créé un monstre» (p. 33-34), où elle revient sur la «création» de l’École de la tchén’ssâ et sur sa fortune (voir ici, et là encore).

Au lancement, Martine-Emmanuelle Lapointe et Samuel Mercier-Tremblay ont interrogé Samuel Archibald sur son œuvre. Il a été question de l’École de la tchén’ssâ, mais pas seulement : on a aussi causé de «gothique boréal». L’Oreille a apprécié — la discussion et l’étiquette.

Notes de périple II

Suite du récit entrepris hier.

Trame onomastique

Une ferme qui s’appelle Philmardo ? Vraiment ?

À Coaticook, Moment Factory a créé Foresta Lumina. La langue abénaquise rencontre l’anglais et le latin. (Dans un ordre d’idées différent : le «tableau» final de cette création était fabuleux.)

Foresta Lumina, Coaticook, Québec, août 2014

Trame lexicale

Devant telle affiche, l’Oreille perd les siens.

Repère ou repaire ? (Coaticook, Québec, août 2014)

Trame poétique

Poésie syndicale :

Le gouvernement a aucune ouverture
I va comme un bulldozure
(Yves Francœur, Radio-Canada, 21 août)

Poésie banlieusarde (le long de l’autoroute 10, juste à l’extérieur de Montréal, ces trois œuvres) :

4-5-0
Boulot
Apéro

Maison
Réunion
Sans
Juron

Prospère
Repaire
D’affaires

Trame sonore

Ah ! le calme de la campagne ! Pour résumer (au risque de quelques oublis) : hors-bord, tondeuse, tchén’ssâ, marteau, voisins, cloueuse et son compresseur, taille-bordures, rétrocaveuse, enfants («Ah ! J’ai du sable dans les fesses !»). La sainte paix, quoi.

Heureusement qu’il y avait France Culture et ses baladodiffusions, notamment celles de Place de la toile. S’agissant de cette émission, l’Oreille avait un considérable retard. Elle a découvert des livraisons fascinantes : sur le bitcoin, la photo («Nous sommes devenus des touristes du quotidien», André Gunthert), le règne des logiciels (avec Lev Manovich), la propriété intellectuelle, l’inexistence du virtuel, beaucoup d’autres.

Elle regrettera cette série aujourd’hui disparue. La cloueuse, moins.

Trame gastronomique

Pourquoi et quand le spaghetti dit «italien» des restaurants servant des «mets canadiens» du Québec est-il devenu immangeable ?

Trame architecturale

Comment reconnaître une maison construite récemment au Québec ? Par l’absence d’arbres autour d’elle. C’est tellement pratique pour passer la tondeuse.

Comment mesurer l’analphabétisme au Québec ? Par l’absence d’éclairage adéquat pour lire dans les maisons de location.

Trame historique

Entourée d’une partie de sa famille, l’Oreille s’est livrée, en phosphorescence, à une partie de minigolf dans une église reconvertie. Décor ? Entre autres époques, la médiévale.

Minigolf médiéval, Coaticook, Québec, août 2014

Autopromotion 087

Le 14 février prochain, l’Oreille tendue participera à une activité pour mettre en lumière les travaux des chercheurs de son université. Elle y causera langue et tchén’ssâ.

Ci-dessous, description et programme.

Lettres ouvertes
La recherche en littérature et la création littéraire
à la Faculté des arts et des sciences de l’Université de Montréal

14 février 2014

La Faculté des arts et des sciences de l’Université de Montréal vous invite à découvrir la richesse des recherches de ses professeurs et de ses étudiants de lettres. Le 14 février, venez les entendre présenter en quelques minutes ce sur quoi ils travaillent. Vous serez étonnés !

Programme

9 h – 9 h 45 : «Les (non-)frontières du littéraire»

Ugo Dionne, «L’invention du suspense, de Marianne à Buffy»

Michael Sinatra, «Repenser les revues scientifiques»

Marcello Vitali-Rosati, «La littérature des robots»

10 h – 10 h 45 : «La langue maganée»

Francis Gingras, «Un roi blessé dans le bas du corps et la coupe Stanley : l’ancien français vu de Montréal»

Benoît Melançon, «Parler avec l’École de la tchén’ssâ»

Élisabeth Nardout-Lafarge, «La langue de Réjean Ducharme»

11 h – 12 h : «L’histoire du livre»

Joyce Boro, «Lire autour du texte ou quand l’habit fait le moine et la couverture fait le livre»

Gabriele Giannini, «Lire le manuscrit médiéval»

Nikola von Merveldt, «Plus vrai que nature : de la nature au livre et au-delà»

Benjamin Victor, «La transmission de textes classiques»

14 h – 14 h 45 : «Littérature et démocratie : la sociocritique»

Anne-Marie David, «Le travail dans la littérature française contemporaine»

Pierre Popovic, «Thathamauzauskayakutès et le taux de diplomation»

Bernabé Wesley, «Une oubliothèque : le passé dans la trilogie allemande de L.-F. Céline»

14 h – 15 h : atelier de déclamation classique avec Jeanne Bovet

Dix places. Inscription obligatoire.

15 h – 16 h 15 : «Nous, les autres»

Anahi Alba de la Fuente, «Montréal parle espagnol»

Gilles Dupuis, «Les écritures migrantes»

Simon Harel, «Les chauffeurs de taxi, “hommes-récits” montréalais»

Martine-Emmanuelle Lapointe, «Le Mordecai Richler des Québécois francophones»

Robert Schwartzwald, «La littérature et les visages multiples de la ville»

15 h 15 – 16 h 15 : atelier théâtral avec Jean-Marc Larrue

Vingt places. Inscription obligatoire.

16 h 30 – 17 h

Claire Legendre, «Deux histoires vraies (qui mentent)»

17 h : cocktail de clôture

Toutes les activités sont gratuites et ouvertes à tous. Elles se déroulent au Carrefour des arts et des sciences de la Faculté des arts et des sciences de l’Université de Montréal (pavillon Lionel-Groulx, 3150, rue Jean-Brillant; http://www.umontreal.ca/plancampus/index.html).

Renseignements :

Francis Gingras (f.gingras@umontreal.ca)

Benoît Melançon (benoit.melancon@umontreal.ca)

 

[Complément du 24 février 2014]

Le doyen de la Faculté des arts et des sciences, Gérard Boismenu, et un journaliste de Forum, Mathieu-Robert Sauvé, ont rendu compte de l’événement.

Moi, ce personnage

William Messier, Dixie, 2013, couverture

L’Oreille tendue rougit. Deux fois, elle est devenue personnage de fiction (en quelque sorte).

La première fois, c’était en 2000, sous la plume de Bernard Andrès, dans l’Énigme de Sales Laterrière :

— Une rhétorique où élocution et invention rhétoriques s’entremêlent, une elocutio fondée sur l’encyclopédie des savoirs, toute une triade des figurae ad docendum, ad delectandum et ad movendum ! s’enflamme Bernier sous l’œil goguenard de Melançon.

Mais Marc-André n’a que faire des sourires en coin. Il persiste et signe en renchérissant sur les idées de son ancien professeur :

— Messieurs, ce n’est pas une université que nous devrions avoir dans la province, mais au moins deux ! Ou trois ? Une à Québec, pour détrôner le Séminaire, une autre à Montréal, pour damer le pion aux sulpiciens et, pourquoi pas, une autre aux Trois-Rivières ?

— Comme vous y allez, Maître Bernier ! lance d’Estimauville qui connaît la fougue et les ambitions de la jeunesse lettrée. Et où recruterions-nous nos enseignants par ici ?

— Mais n’en voilà-t-il pas un devant nous ? répond benoîtement Melançon.

— Eh bien, pourquoi pas, mon ami ? reprend l’autre. Vous à Montréal et moi aux Trois-Rivières.

— La devision [sic] du petit monde universitaire ! plaisante Gamelin (p. 518-519).

Sa deuxième transsubstantiation est plus récente. Dans Dixie (2013), de William S. Messier, elle lit :

Il y a même le vieux Melançon qui scande les vers de la chanson en rinçant le moteur de sa chainsaw (p. 139).

(Les lecteurs de l’École de la tchén’ssâ reconnaîtront l’allusion.)

Si jamais elle meurt, l’Oreille mourra heureuse.

 

[Complément du 6 septembre 2019]

L’ami et ex-collègue François Hébert publie Miniatures indiennes. Cela a beau se dire Roman, on y croise des êtres de chair(e). La scène se déroule pendant la période des initiations de début d’année :

Il y a du tapage dans le corridor. Des rois passent, des médecins sadiques, des collègues, des vampires au menton dégoulinant de ketchup, des bagnards enchaînés, des démarcheurs, les professeurs Melançon et Mélancon, des chiens forcés de japper, des clowns, des Hare Krishna, des mendiants, des courtisanes à demi nues (p. 65).

Le lecteur qui connaît l’Université de Montréal n’aura pas de mal à reconnaître l’Oreille dans le premier des deux M., et Robert Mélançon dans le second.

 

[Complément du 13 juin 2022]

L’Oreille a longtemps donné à l’Université de Montréal un cours d’histoire de la littérature. Elle y a aussi donné des cours de littérature française du XVIIIe siècle. Or, lisant l’Amour des maîtres (2011), de Mélissa Grégoire, elle tombe sur ces deux passages :

Aucun cours n’était aussi brillant, substantiel, provocant que celui de Julien Élie, aucun professeur ne lui arrivait à la cheville, sauf un peut-être qui semblait se passionner pour l’histoire littéraire mais dont l’enseignement, donné dans un grand amphithéâtre, avait quelque chose d’impersonnel (p. 102).

Le lendemain, dans le cours de Littérature du XVIIIe siècle, Louis s’est assis à côté de moi […]. […] tandis que le professeur Beauchamp entrait dans la classe, j’ai continué de chuchoter à son oreille : «À l’avenir, parle donc pour toi !» Le professeur s’est assis, en faisant craquer sa chaise, a ouvert son livre et a commencé à lire son exposé d’une voix monocorde : «Madame de Staël se méfie de la solitude, elle insiste sur la nécessité de la conversation…» (p. 127)

Une «voix monocorde», vraiment ?

 

Références

Andrès, Bernard, l’Énigme de Sales Laterrière, Montréal, Québec Amérique, 2000, 871 p.

Grégoire, Mélissa, l’Amour des maîtres, Montréal, Leméac, 2011, 245 p.

Hébert, François, Miniatures indiennes. Roman, Montréal, Leméac, 2019, 174 p.

Messier, William S., Dixie. Roman, Montréal, Marchand de feuilles, 2013, 157 p. Ill.

Fortune de la tchén’ssâ, ter

William S. Messier, Twitter

Le 19 mai 2012, l’Oreille tendue donnait naissance, en quelque sorte, à l’École de la tchén’ssâ. Depuis, cette école littéraire québécoise a connu une étonnante fortune (il en a été question ici et ).

Six ajouts à ce rayonnement inattendu.

Dans la revue Liberté, sous la plume de Jonathan Livernois («Un shack à soi. De la permanence tranquille ou pourquoi craindre la disparition», numéro 300, été 2013, p. 18).

Jonathan Livernois, Liberté, 300

 

Dans un tweet de @david_turgeon le 6 juin 2013.

David Turgeon, Twitter

Dans l’hebdomadaire Voir, chez Dominic Tardif («8 raisons de marcher jusque chez le libraire», 5 septembre 2013).

Dominic Tardif, Voir

 

Dans le quotidien le Devoir, quand Christian Desmeules rend compte de Dixie de William S. Messier («William S. Messier, maître brasseur», 7-8 septembre 2013, p. F2).

Le Devoir, Christian Desmeules

Dans un modeste Tumblr lancé par un ami de l’Oreille, Chicks With Chainsaws.

Chicks with Chainsaws

Sur le blogue Ils sont partout, le 25 septembre 2013.

Blogue Ils sont partout

Jusqu’où cela s’arrêtera-t-il ?