In memoriam : Bernard Beugnot (1932-2023)

Photo de Bernard Beugnot jeune

Il a été un grand dix-septiémiste, qui a influencé nombre de parcours; en témoignent les deux volumes d’hommages qui lui ont été offerts, le premier en 1999, le deuxième en 2013. On lui doit notamment des travaux fondateurs sur la retraite à l’âge classique.

Spécialiste d’histoire de la littérature, de génétique littéraire et d’édition critique, il a édité aussi bien Guez de Balzac que Hubert Aquin, Francis Ponge et Jean Anouilh.

L’automne dernier, à 90 ans, il publiait un court essai, «À l’écoute du singulier : paysages littéraires, paysages intérieurs», dédié «À [ses] anciens étudiants», dans lequel il livrait sa conception de la littérature.

Faire l’apologie de la littérature, sans ignorer qu’elle a aussi servi de mauvais maîtres, c’est revendiquer la liberté de penser, d’écrire, de parler, la possibilité de parcourir et de découvrir le monde dans l’espace d’une chambre, de refuser la pensée unique, la mode, la brièveté à la place de la méditation, la dévoration du temps à la place de sa dégustation. C’est aussi affirmer que le legs du futur s’accumule sur le legs du passé (p. 176).

Il a été le premier à engager l’Oreille tendue à ce qui s’appelait encore le Département d’études françaises de l’Université de Montréal.

Il a présidé son jury de thèse, en 1991, sur la correspondance de Diderot, car il a beaucoup écrit sur la pratique de la lettre.

Bernard Beugnot est mort au début de cette semaine.

Après Gilles Marcotte, Laurent Mailhot, Réal Ouellet et Jacques Brault, c’est un autre défenseur essentiel des études littéraires québécoises qui n’est plus.

 

P.-S.—Sur le site Fabula, Patrick Dandrey publie un «Hommage à Bernard Beugnot».

P.-P.-S.—Au cours des années 1980, Bernard Beugnot a remporté — si la mémoire de l’Oreille est bonne — le troisième prix du magazine culinaire Sel & poivre pour son coulis de framboises. Ses étudiants de l’époque avaient été un brin étonnés.

 

[Complément du 13 mars 2023]

La Société des lecteurs de Francis Ponge a rendu hommage à Bernard Beugnot .

 

[Complément du 27 juin 2023]

Pour l’Association des professeures et professeurs retraités de l’Université de Montréal, l’Oreille tendue a aussi rédigé ceci (PDF).

 

[Complément du 11 juillet 2023]

Des amis à lui ont mis à jour le site de Bernard Beugnot. On y trouvera plusieurs autres hommages.

 

Références

Beugnot, Bernard, «À l’écoute du singulier : paysages littéraires, paysages intérieurs», dans Pascal Bastien (édit.), Notre première modernité. Éloge des humanités en onze parcours, Montréal, Leméac, coll. «Domaine histoire», 2022, p. 171-185.

Martel, Jacinthe et Robert Melançon (édit.), Inventaire, lecture, invention. Mélanges de critique et d’histoire littéraires offerts à Bernard Beugnot, Montréal, Université de Montréal, Département d’études françaises, coll. «Paragraphes», 18, 1999, 447 p. Ill.

Van der Schueren, Éric et Matthieu Fortin (édit.), De la permanence. Études offertes à Bernard Beugnot pour son quatre-vingtième anniversaire, Paris, Hermann, «Collections de la République des lettres», 2013, 260 p.

Bouteille (hockeyistique) à la mer

Article du Petit Journal du 18 juin 1939 sur la tournée européenne des Canadiens de Montréal

«Le commissaire de la Ligue nationale [de hockey], Gary Bettman, a ouvert la porte récemment à un séjour du Canadien en Europe dans les prochaines années», écrit Alexandre Pratt dans la Presse+ du jour. Le journaliste évoque alors sept villes qui pourraient accueillir l’équipe et demande à ses lecteurs des suggestions d’autres villes intéressantes. Au passage, il rappelle qu’elle a joué à Paris en 1938.

L’Oreille tendue, en 2011, a consacré quelques lignes à la tournée de 1938.

À leur retour d’une tournée européenne, des joueurs des Canadiens de Montréal et des Red Wings de Détroit — c’est du hockey — signent une lettre qu’ils mettent dans une bouteille. Ils jettent celle-ci à la mer, du pont de l’Aurania, le 20 mai 1938. Un douanier la retrouve à Hendaye, au Pays basque, un an et trois jours plus tard. Le Petit Journal du 18 juin 1939 s’en réjouit, carte maritime à l’appui. Voilà un mode de communication fiable, encore qu’un peu lent.

Si les Canadiens retournent bientôt en Europe, peuvent-ils prendre le bateau et relancer cette pratique ? Ce serait bienvenu.

P.-S.—En effet, il a déjà été question de bouteilles à la mer ici.

 

Référence

Melançon, Benoît, Écrire au pape et au Père Noël. Cabinet de curiosités épistolaires, Montréal, Del Busso éditeur, 2011, 165 p. Le texte sur l’Aurania se trouve p. 79.

Benoît Melançon, Écrire au pape et au Père Noël, 2011, couverture

Curiosité sportivo-épistolaire du jour

L’Oreille tendue est épistologue : elle s’intéresse à toutes les formes de la lettre, notamment à la carte postale.

L’Oreille tendue travaille aussi sur les représentations culturelles du sport, particulièrement sur celles de Maurice Richard.

L’Oreille tendue a donc réfléchi aux correspondances des sportifs, par exemple à celles d’Andre Agassi et de Jean Béliveau.

Ce matin, elle découvre ceci, sur eBay : une carte postale de Maurice Richard à sa femme, envoyée de Spokane en 1961.

Carte postale de Maurice Richard à sa femme, Spokane, Washington, 1961, recto

Carte postale de Maurice Richard à sa femme, Spokane, Washington, 1961, verso

Tout est dans tout, et réciproquement, comme le disait si justement le journaliste sportif Jean Dion.

 

Références

Melançon, Benoît, «Le cabinet des curiosités épistolaires. Le courrier des sportifs», Épistolaire. Revue de l’AIRE (Association interdisciplinaire de recherche sur l’épistolaire, Paris), 33, 2007, p. 279-283; repris, sous le titre «Sportifs épistolaires», dans Écrire au pape et au Père Noël. Cabinet de curiosités épistolaires, Montréal, Del Busso éditeur, 2011, p. 81-89. [Sur la correspondance des sportifs]

Melançon, Benoît, «Le cabinet des curiosités épistolaires», Épistolaire. Revue de l’AIRE (Association interdisciplinaire de recherche sur l’épistolaire, Paris), 43, 2017, p. 171-173. [Sur la carte postale à l’ère du numérique]

Benoît Melançon, Écrire au pape et au Père Noël, 2011, couverture

Le zeugme du dimanche matin et de Mme de Sévigné

Timbre français à l’effigie de Mme de Sévigné

«Je leur dirais : “Madame, voyons donc à quoi nous en sommes; faut-il vous reconduire ? Ne m’en empêchez donc point, et ne perdons pas notre temps et notre poumon.”»

Mme de Sévigné à Mme de Grignan, lettre du 8 avril 1671, dans madame de Sévigné, Lettres, introduction, chronologie, notes et archives par Bernard Raffalli, Paris, Garnier-Flammarion, coll. «GF», 282, 1976, 448 p., p. 95.

 

(Une définition du zeugme ? Par .)

Autopromotion 668

Épistolaire, 48, 2022, couverture

Depuis la nuit des temps, l’Oreille tendue collabore à Épistolaire, la revue de l’Association interdisciplinaire de recherches sur l’épistolaire. De sa chronique, «Le cabinet des curiosités épistolaires», elle a tiré un recueil en 2011, Écrire au pape et au Père Noël.

La 48e livraison d’Épistolaire vient de paraître (2022, 267 p., ill., cahier couleurs, ISSN : 0993-1929). L’Oreille y parle des lettres déchirées et découpées, donc de mode féminine.

 

Table des matières

Haroche-Bouzinac, Genevière, «Avant-propos», p. 5-6.

«Dossier. Épistolaire et biographie»

Simonet-Tenant, Françoise, «Introduction. Les lettres et le “secret de vie…», p. 9-18.

Diaz, José-Luis, «“Il est tout entier dans sa correspondance…” Usages biographiques de l’épistolaire dans la seconde moitié du XIXe siècle», p. 19-32.

Haroche-Bouzinac, Geneviève, «Réflexions sur un papier à lettres», p. 33-41.

Genand, Stéphanie, «L’épistolaire comme trace mémorielle chez le marquis de Sade et Germaine de Staël», p. 43-49.

Hovasse, Jean-Marc, «La vie et les lettres de Victor Hugo», p. 51-60.

Dufief, Pierre-Jean, «Les Goncourt au confessionnal de la correspondance», p. 61-71.

De Vita, Philippe, «La lettre dans les biographies de Jean Renoir : un document subjectif», p. 73-86.

Gestern, Hélène, «Armen Lubin, une vie à écrire», p. 87-98.

«La lettre dans l’univers de la biographie», p. 99-103. Entretien avec Dominique Bona. Propos recueillis par Geneviève Haroche-Bouzinac.

«Perspectives»

Rizzoni, Nathalie, «Écrans nouveaux et petite poste de Paris au début des années 1760», p. 107-128. Ill.

Guiot, Tristan, «Une correspondance au statut problématique : enjeux historiques, théoriques et critiques des Lettres de Renée Vivien à Kérimé», p. 129-141.

Allorant, Pierre, «Jeanne Jozon (1868-1946) artiste “art nouveau”. Aspects d’une correspondance inédite», p. 142-161. Ill.

Obitz-Lumbroso, Bénédicte, «L’édition numérique de correspondances : pour quoi, pour qui ? Réflexions autour de l’édition de la correspondance de Beaumarchais», p. 163-173.

«Chroniques»

Melançon, Benoît, «Le cabinet des curiosités épistolaires», p. 177-179.

Vanackere, Mathilde, «État présent des études sur la correspondance de Bussy-Rabutin», p. 181-188.

Rouch, Marine, «Simone de Beauvoir “épistolière” : état de la question», p. 189-203.

«La revue Plumes, une aventure éditoriale singulière. Entretien avec Marianne Vic», p. 205-208. Propos recueillis pas Geneviève Haroche-Bouzinac.

«Recherche»

Forner, Fabio, «Présentation du Centre de recherche sur les correspondances de Vérone, Centro di ricerca sugli epistolari del settecento (C.R.E.S.)», p. 211-215.

Biron, Caroline, «L’émergence du roman épistolaire en France au XVIIe siècle. Thèse de doctorat en Langue et littérature françaises, soutenue à l’université de Nantes le 19 novembre 2021, sous la direction de Mme Nathalie Grande», p. 217-219.

«Comptes rendus», p. 221-259.

«Table des figures», p. 261-262.

«Résumés», p. 263-267.

Benoît Melançon, Écrire au pape et au Père Noël, 2011, couverture