Générons de nouveau

Moulinette à légumes, 2008

L’Oreille tendue avait presque oublié qu’elle a un jour créé une rubrique «Générateurs de textes». Alimentons-la.

Vous en voulez en français ?

Ambroise Garel offre deux services : du Lovecraft; de la cuisine.

De ce côté (Twitter, Mastodon), vous obtiendrez, grâce à l’Académotron, d’étranges règles grammaticales.

Ici, on répond à une question complexe : «C’est de gauche ou de droite ?»

Vous préférez l’anglais ?

Là, c’est de la littérature canadienne.

La prose universitaire se prêterait bien à l’exercice : premier exemple; deuxième exemple.

À votre service.

Chantons la langue avec Jean Lapointe

Jean Lapointe, «Mon oncle Edmond», 1976, disque

(Il n’y a pas que «La langue de chez nous» dans la vie. Les chansons sur la langue ne manquent pas. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Jean Lapointe, «Mon oncle Edmond», 1976

 

Dans la famille du côté d’ma mère y avait mon oncle Edmond
Y était ben smatte y parlait l’anglais surtout quand y était rond
Y faisait des pit pit do you speak English me I can talk faster than you
Wanna hamburger moutarde relish pis y était lousse quand y était saoul
Do you want a shot yes why not

Un bon matin sans dire un mot Edmond a sacré l’camp
Il est parti pour l’Ontario ouvrir un restaurant
Y faisait des pit pit do you speak English me I can talk faster than you
Wanna hamburger moutarde relish pis y était lousse quand y était saoul
Do you want a shot yes why not

Vingt ans plus tard riche à craquer Edmond nous est r’venu
Les poches ben pleines et pis la tête carrée on le r’connaissait plus
Y faisait des pit pit do you speak English me I can talk faster than you
Mais là c’était vrai pis c’en était triste pis y était même pas saoul
Do you want a shot yes why not

Par une journée ensoleillée Edmond est disparu
Requiescat in pace pis on l’a jamais r’vu
Y faisait des pit pit do you speak English me I can talk faster than you
Wanna hamburger moutarde relish pis y était lousse quand y était saoul
Do you want a shot yes why not

Quand Edmond est mort y parlait l’anglais
Edmund passed away sometimes au mois d’mai

 

Chantons la langue avec Sylvain Lelièvre

Sylvain Lelièvre, «Lettre de Toronto», 1978, disque

(Il n’y a pas que «La langue de chez nous» dans la vie. Les chansons sur la langue ne manquent pas. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Sylvain Lelièvre, «Lettre de Toronto», album Sylvain Lelièvre, 1978

 

Salut Sylvain, comment ça va vieux frère
Tu m’excuseras si j’ai pas trouvé l’temps
D’t’écrire avant, mais y s’passe trop d’affaires
Pis Toronto c’est pas la rue Saint-Jean
Ça fait six mois que j’fais partie d’un groupe
J’joue les claviers, pis c’est plus que tripant
Faut dire qu’icitte, la musique est au boutte
Pus rien à voir avec nos shows d’avant

Prends pas ça mal, j’aime encore tes poèmes
Mais c’est fini l’trip des boîtes à chansons
Faut penser gros pour détruire le système
Pis les Anglais, y a rien à faire, ils l’ont
Si tu voyais le stock qu’on déménage
Just’ pour te dire : ça nous prend deux camions
Pus rien qui manque quand on part en voyage
Pis pus jamais d’maudits problèmes de son

J’t’envoye les mots d’une toune que j’viens d’écrire
C’est pas d’ma faute, chus meilleur en anglais
Mais si des fois tu pouvais m’la traduire
Ben entendu, c’est moi qui la chanterais
On vient d’signer cinq ans chez CBS
Y nous ont dit que tout c’qui nous manquait
C’t’une toune française pour le marché de l’Est
Sont forts à CHOM, t’inquiète pas du succès

Le mois prochain, on part pour Los Angeles
Vu qu’not’ gérant est en Californie
On a compris qui c’qui tire les ficelles
Et si des soirs je m’ennuie d’mes amis
Mon seul pays maintenant, c’est la musique
Pis la musique, c’est les États-Unis
Viens faire un tour avant d’être folklorique
Tu verras ben si c’est vrai c’que j’te dis

 

Chantons la langue avec La Bolduc

Timbre canadien représentant Mary Travers, dite La Bolduc

(Il n’y a pas que «La langue de chez nous» dans la vie. Les chansons sur la langue ne manquent pas. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

La Bolduc, «La chanson du bavard», 1931

 

Écoutez mes bons amis la chanson que j’vas vous chanter
C’t à propos du radio je vas tout vous raconter
Il y en a qui prétendent que j’ai la langue paralysée
Et d’autres s’sont imaginé que j’avais l’nerf du cou cassé
Y en a qui sont jaloux
Y veulent mettre des bois dans les roues
Je vous dis tant que j’vivrai
J’dirai toujours moé pis toé
Je parle comme l’ancien temps
J’ai pas honte de mes vieux parents
Pourvu que j’mets pas d’anglais
J’nuis pas au bon parler français

[turlute]

Vous allez m’prendre pour une commère
Mais c’est mon désir le plus cher
On nous a toujours enseigné
De bien penser avant d’parler
Il y en a qui sont rigolos
Y ont la bouche comme un radio
Pour les empêcher d’parler
Faut leur zôter l’électricité

Y en a qui sont jaloux
Y veulent mettre des bois dans les roues
Je vous dis tant que j’vivrai
J’dirai toujours moé pis toé
Je parle comme l’ancien temps
J’ai pas honte de mes vieux parents
Pourvu que j’mets pas d’anglais
J’nuis pas au bon parler français

[turlute]

On a beau faire not’ ch’min droit
Et critiqué par plus bas que soi
C’est la faute des vieilles commères
Qui s’mêlent pas de leurs affaires
Il y en a à la belle journée
Qui passent leur temps à bavasser
Y devraient cracher en l’air
Et ça leur tomberait su’ l’nez

Y en a qui sont jaloux
Y veulent mettre des bois dans les roues
Je vous dis tant que j’vivrai
J’dirai toujours moé pis toé
Je parle comme l’ancien temps
J’ai pas honte de mes vieux parents
Pourvu que j’mets pas d’anglais
J’nuis pas au bon parler français

[turlute]

Y en a d’autres de leur côté
Qui m’trouvent pas assez décolletée
Essayer d’plaire à tout l’monde
J’vous dis que c’est dur en scie ronde
Je m’habille modestement
Pis mes chansons sont d’l’ancien temps
Mais partout j’vas turluter
J’ai pas honte de m’présenter

Y en a qui sont jaloux
Y veulent mettre des bois dans les roues
Je vous dis tant que j’vivrai
J’dirai toujours moé pis toé
Je parle comme l’ancien temps
J’ai pas honte de mes vieux parents
Pourvu que j’mets pas d’anglais
J’nuis pas au bon parler français

[turlute]

 

P.-S.—Vous ne rêvez pas : il a déjà été question ici d’une autre chanson de La Bolduc, d’ailleurs parue sur le même disque.

 

Chantons la langue avec Reney Ray

Album Reney Ray, 2018, pochette

(Il n’y a pas que «La langue de chez nous» dans la vie. Les chansons sur la langue ne manquent pas. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Reney Ray, «Le p’tit Reney», album Reney Ray, 2018

 

C’est la première écoute la pire
Après ça tu t’rends compte
Que t’es t’en train d’en rire
C’est un mélange d’vocabulaire
Si tu y penses ben fort
J’ai comme mon prop’ dictionnaire
Dans le p’tit Reney
Les si aiment ben les -rais
L’passé composé, chez nous y est imparfait
Le monde en Ontario y savent de quoi j’parle de
Chaque deux mots tu switches
À cause qu’ton brain y twitche
C’est weird un peu su’l coup
Mais tu get used to it
Tu catches que actuellement
Juste plus intelligent
Parce dans le p’tit Reney, tu parles deux langues à’ fois
Ça prend une bonne maîtrise pour le parler fluamment
(«Fluamment ça se dit-tu ?»)
So j’parle pas ben
J’sais ben
Ma bouche a fait des sons ben louches
C’pas bon
Y a un mélange de mots anglais
Que mon cerveau y prononce en français
(«Mais là j’viens de l’Ontario là
Give me a break
Au moins j’capable d’parler français
C’est déjà bien
C’est-tu mieux ça ?
J’te parle
J’peux-tu parler en français comme y faut ? [?]
Vas-tu répondre ? [?]
Le p’tit Reney»)
So j’parle pas ben
J’sais ben
Ma bouche a fait des sons ben louches
C’pas bon
Y a un mélange de mots anglais
Que mon cerveau y prononce en français
So j’parle pas ben
Malgré mes mots random
J’ai un p’tit cœur ben fin
Qui parle à sa façon à lui aussi
Écoute donc ce qu’il dit
Y a son langage à lui
Parce qu’dans le p’tit Reney
Parler c’est jamais compliqué