Autopromotion 291

Mediapart, 8 avril 2017, manchetteMediapart a récemment envoyé à Montréal le journaliste Antoine Perraud pour essayer de comprendre l’«ontologie du “justintrudeauïsme”». Son article vient de paraître. On peut y lire quelques propos de l’Oreille tendue sur la langue du premier ministre du Canada. (Ce n’est pas la première fois qu’elle se livre à l’exercice.)

Pas de «gentleman trappeur» ici, ni de confusions comme celles de la journaliste française (fictive) Sandrine Rambalde-Cochet de l’émission À la semaine prochaine : Antoine Perraud a bien fait ses devoirs.

P.-S. — On a longtemps pu entendre Antoine Perraud à France Culture. L’Oreille pleure encore la disparition de son émission Tire ta langue.

Le pogo de Manon Massé

Boîte de pogos

Le gouvernement du Québec déposait hier son budget. Manon Massé, la députée de la circonscription de Sainte-Marie–Saint-Jacques pour Québec solidaire, n’a pas été convaincue (euphémisme) par ce qu’elle a découvert, d’où cette déclaration :

Ça prend pas le pogo le plus dégelé de la boîte pour comprendre qu’après avoir mis le feu dans la bâtisse, ce n’est pas un coup de peinture et des nouveaux rideaux qui vont changer les choses.

«Ça prend pas le pogo le plus dégelé de la boîte» ? Traduction libre : pas besoin d’être spécialement allumé. (Pogo ? Par ici.) Synonyme (ancien) : ça prend pas la tête à Papineau.

La langue de Donald Trump regorge d’expressions de même nature (source) :

Not the sharpest knife in the drawer.

Got into the gene pool while the lifeguard wasn’t watching.

A room temperature IQ.

Got a full 6-pack, but lacks the plastic thingy to hold it all together.

A gross ignoramus — 144 times worse than an ordinary ignoramus.

A photographic memory but with the lens cover glued on.

A prime candidate for natural deselection.

Bright as Alaska in December.

One-celled organisms out-score him in IQ tests.

Donated his body to science before he was done using it.

Fell out of the family tree.

Gates are down, the lights are flashing, but the train isn’t coming.

Has two brains; one is lost and the other is out looking for it.

He’s so dense, light bends around him.

If brains were taxed, he’d get a rebate.

If he were any more stupid, he’d have to be watered twice a week.

If you give him a penny for his thoughts, you’d get change.

If you stand close enough to him, you can hear the ocean.

It’s hard to believe that he beat out 1,000,000 other sperm.

One neuron short of a synapse.

Some drink from the fountain of knowledge; he only gargled.

Takes him 1 1/2 hours to watch 60 minutes.

Was left on the Tilt-A-Whirl a bit too long as a baby.

Wheel is turning, but the hamster is dead.

Variante : «No one is asking him to bring the potato salad to the Mensa picnic» (merci à @catheoret).

Le pogo dégelé est en bonne compagnie.

 

[Complément du jour]

@maxdenoncourt (merci) indique à l’Oreille tendue deux autres occurrences de l’expression, l’une dans la Presse+, l’autre sur Twitter, les deux datant de l’automne 2016.

 

[Complément du 2 avril 2017]

Variation radiophonique, entendue tout à l’heure à l’émission La soirée est (encore) jeune, à Radio-Canada, dans la bouche de Jean-Sébastien Girard : «Pas besoin d’être le condom le plus lubrifié dans la boîte.»

 

[Complément du 10 septembre 2019]

Emploi romanesque, dans Querelle de Roberval, de Kevin Lambert, en 2018 : «C’est pas le pogo le plus dégelé de la boîte, la Kathleen, Christian le dit quand elle est pas là, il la connaît depuis la maternelle, elle vient de Mashteuiatsh elle aussi : quand elle se met à boquer sur quelque chose, il y a rien à faire» (p. 28).

 

[Complément du 24 octobre 2019]

Le pogo peu dégelé n’est pas très brillant, d’où la variation suivante, tirée de la Presse+ du 22 octobre : «Disons que l’ex bellâtre Kevin Fontaine, ruiné et déprimé sexuellement, n’est pas le tube le plus fluorescent du lit de bronzage.»

 

[Complément du 28 novembre 2020]

Sur le plan politique, cela peut donner «Les crayons les moins aiguisés de l’isoloir», chez les excellents David Robichaud et Patrick Turmel (2020, p. 37).

 

Références

Lambert, Kevin, Querelle de Roberval. Fiction syndicale, Montréal, Héliotrope, 2018, 277 p.

Robichaud, David et Patrick Turmel, Prendre part. Considérations sur la démocratie et ses fins, Montréal, Atelier 10, coll. «Documents», 18, 2020, 103 p. Ill.

Fil de presse 023

Logo, Charles Malo Melançon, mars 2021

Quelques livres récents en matière de langue, en ordre géographique…

Amsterdam

Van Strien-Chardonneau, Madeleine et Marie-Christine Kok Escalle (édit.), French as Language of Intimacy in the Modern Age. Le français, langue de l’intime à l’époque moderne et contemporaine, Amsterdam, Amsterdam University Press, 2017, 238 p. Compte rendu : http://contagions.hypotheses.org/951.

Lille

Humboldt, Wilhelm von et Jean-Pierre Abel-Rémusat, Lettres édifiantes et curieuses sur la langue chinoise, Lille, Presses universitaires du Septentrion, coll. «Problématiques philosophiques», 2017, 338 p. Édition de Jean Rousseau et Denis Thouard.

Limoges

Gautier, Antoine, Sabine Pétillon et Fanny Rinks (édit.), la Ponctuation à l’aube du XXIe siècle. Perspectives historiques et usages contemporains, Limoges, Éditions Lambert-Lucas, 2016, 256 p.

Jacquet-Pfau, Christine et Jean-François Sablayrolles (édit.), la Fabrique des mots français. Colloque de Cerisy, Limoges, Éditions Lambert-Lucas, coll. «La lexicothèque», 2016, 384 p.

Londres

Leblanc, Jean-Marc, Analyses lexicométriques des vœux présidentiels, Londres, ISTE éditions, coll. «Sciences cognitives», 2016, 386 p.

Louvain-la-Neuve

Feuillard, Colette, Usage, norme et codification. De la diversité des situations à l’utilisation du numérique, Louvain-la-Neuve, EME éditions, coll. «Théorie et description linguistique», 2017, 256 p.

Paris

Boutet, Josiane, le Pouvoir des mots. Nouvelle édition, Paris, La Dispute, 2016, 256 p. Compte rendu : http://www.en-attendant-nadeau.fr/2016/08/31/langue-fasciste-boutet/.

Les Cahiers du dictionnaire, 8, 2016, 506 p. Numéro «Les mots de la Méditerranée dans le dictionnaire».

Cerquiglini, Bernard, Enrichissez-vous : parlez francophone !, Paris, Larousse, 2016, 178 p.

Schott, Ben, Schottenfreude. Il y a un mot pour tout, Paris, Éditions du sous-sol, 2016, 96 p. Traduction de Danielle Orhan.

Siouffi, Gilles (édit.), Modes langagières dans l’histoire, Paris, Honoré Champion, coll. «Linguistique historique», 7, 2016, 404 p.

Stepanova, Olga, l’Argot aux multiples visages dans le théâtre et le cinéma contemporains, Paris, L’Harmattan, coll. «Langue et parole», 2017, 242 p.

Zauberman, Yolande et Paulina Spiechowicz, Les mots qui nous manquent. Encyclopédie, Paris, Calmann-Lévy, 2016, 320 p.

Québec

Arrighi, Laurence et Annette Boudreau (édit.), Langue et légitimation. La construction discursive du locuteur francophone, Québec, Presses de l’Université Laval, coll. «Les voies du français», 2016, 246 p.

Rennes

Roynette, Odile, Gilles Siouffi et Agnès Steuckardt (édit.), la Langue sous le feu. Mots, textes, discours de la Grande Guerre, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. «Histoire», 2017, 272 p.

Toulouse

Sorlin, Sandrine, Convictions philosophiques et plaisirs linguistiques. Entretiens avec Jean-Jacques Lecercle, Toulouse, Presses universitaires du Midi, 2016, 176 p.

Entrée à saveur de lundi matin

«À saveur vintage», titre la Presse+ le 15 octobre 2016

À l’occasion (2009, 2010, 2011, 2013, 2014, 2015), l’Oreille tendue pratique un tri sélectif dans sa corbeille de à saveur, cette calamité québécoise.

L’expression peut être suivie par un nom.

«Moreau fait une offre finale à saveur d’ultimatum» (la Presse+, 24 février 2017).

«Kim Kardashian déclenche une controverse à saveur de médicament» (Radio-Canada, 7 août 2015).

«Une passe à saveur de jeu au sol» (Pierre Vercheval, Réseau des sports [RDS], 27 août 2015).

«Synode sur la famille : un revers à saveur de victoire pour le pape François» (le Devoir, 20 octobre 2014, p. A1).

«Une discussion à saveur Big Brother» (Marie-France Bazzo, Télé-Québec, 20 février 2014).

Le plus souvent, un adjectif fait l’affaire.

«Coup de circuit à saveur québécoise» (la Presse+, 17 octobre 2016).

«Une aventure fantastique à saveur québécoise par un auteur d’ici» (@QuebecBD).

«Environnement. Un début de mandat à saveur internationale» (la Presse+, 3 novembre 2015).

Un carnet Web «à saveur langagière» (le Devoir, 7 décembre 2003).

«une télé à saveur locale» (la Presse, 6 septembre 2013, cahier Affaires, p. 6).

Les épithètes en -ique sont particulièrement prisées.

«essais à saveur érotique» (le Devoir, 3-4 septembre 2016, p. F8).

«une fiction biographique à saveur psychanalytique» (le Devoir, 23-24 janvier 2016, p. F4).

«Mais de longs, longs textes, à saveur sociologique, ethnologique et journalistique» (la Presse, 5 décembre 2011, cahier Arts, p. 6).

«ses billets ironiques à saveur sociologique» (le Devoir, 19 août 2011, p. B10).

Stephen Harper en Colombie : «une visite à saveur économique» (Radio-Canada, 10 août 2011).

Ce qui est le plus souvent évoqué ? L’échéance électorale.

«Des millions à saveur électorale» (le Devoir, 28 juillet 2015, p. A2).

«Publicité à saveur électorale pour l’ex-ministre Penashue» (la Presse, 19 mars 2013, p. A14).

«Budget à saveur électorale à Washington» (la Presse, 13 février 2012, cahier Affaires, p. 4).

«Remaniement mineur à saveur électorale» (la Presse, 5 janvier 2011, p. A1).

«Déjà des pubs à saveur électorale» (la Presse, 23 mars 2011, p. A5).

À votre service.