Autopromotion 402

Un auditeur de l’émission Plus on est de fous, plus on lit !, qu’anime Marie-Louise Arsenault à la radio de Radio-Canada, a une question : «Quelles sont les plus belles citations de la littérature québécoise ?»

C’est l’Oreille tendue qui s’y colle, entre 14 h et 15 h aujourd’hui.

 

[Complément du jour]

On peut (ré)entendre l’entretien ici.

Ci-dessous les phrases commentées en ondes (plus deux).

Des citations qui résument une œuvre, voire tout un auteur

Nelligan, «Soir d’hiver», dans Poèmes choisis, Montréal, Fides, coll. «Bibliothèque canadienne-française, 1966, 166 p. Présenté par Éloi de Grandmont et précédé d’une chronologie, d’une bibliographie et de jugements critiques. Édition originale : 1903.

Ma vitre est un jardin de givre (p. 60).

Saint-Denys Garneau, «Accompagnement», dans Œuvres, Montréal, Presses de l’Université de Montréal, coll. «Bibliothèque des lettres québécoises», 1970, xxvii/1320 p. Édition critique par Jacques Brault et Benoît Lacroix. Édition originale : 1937.

Je marche à côté d’une joie
D’une joie qui n’est pas à moi
D’une joie à moi que je ne puis pas prendre (p. 34).

Anne Hébert, «Le torrent», dans le Torrent. Nouvelles, Montréal, HMH, coll. «L’arbre», 1976, 173 p. Édition originale : 1950.

J’étais un enfant dépossédé du monde (p. 9).

Michel Tremblay, les Belles-Sœurs, Montréal, Leméac, coll. «Théâtre canadien», 1972, 156 p. Introduction d’Alain Pontaut. Édition originale : 1968.

Maudit cul ! (p. 102)

Michel Tremblay, À toi pour toujours, ta Marie-Lou, Montréal, Leméac, coll. «Théâtre canadien», 21, 1971, 94 p. Introduction de Michel Bélair.

Ben oui, j’m’en rappelle de tout ça, Manon, ben oui, ça m’a faite mal, à moé aussi ! C’est ben sûr que c’est pas vrai que j’ai toute oublié ! j’m’en rappelle comme toé ! Chus v’nue au monde dans’marde, pareille comme toé, Manon, mais au moins j’essaye de m’en sortir ! Au moins, j’essaye de m’en sortir ! (p. 70)

Des phrases reprises d’un auteur à l’autre

Louis Hémon, Maria Chapdelaine, Montréal, Boréal express, 1980, 216 p. Avant-propos de Nicole Deschamps. Notes et variantes, index des personnages et des lieux, par Ghislaine Legendre. Édition originale : 1916.

Autour de nous des étrangers sont venus, qu’il nous plaît d’appeler des barbares; ils ont pris presque tout le pouvoir; ils ont acquis presque tout l’argent; mais au pays de Québec rien n’a changé (p. 198).

Félix-Antoine Savard, Menaud maître draveur, Montréal, Fides, coll. «Bibliothèque canadienne-française», 1964, 213 p. Présentation d’André Renaud. Édition originale : 1937 — «des étrangers sont venus» (p. 32 et p. 213).

Hubert Aquin, Prochain épisode. Roman, Montréal, Cercle du livre de France, 1965, 174 p.

Cuba coule en flammes au milieu du lac Léman pendant que je descends au fond des choses (p. 7).

Mathieu Arsenault, la Vie littéraire, Montréal, Le Quartanier, «série QR», 76, 2014, 97 p. : «la littérature est fantastique elle coule en flammes au milieu du lac Léman» (p. 25).

Marie-Claire Blais, Une saison dans la vie d’Emmanuel, Montréal, Quinze, coll. «Roman», 1978, 175 p. Édition originale : 1965.

Les pieds de Grand-Mère Antoinette dominaient la chambre (p. 7).

Catherine Lalonde, la Dévorations des fées, Montréal, Le Quartanier, coll. «série QR», 112, 2017, 136 p. : «La p’tite vient s’asseoir aux pieds de l’aïeule, pose une main à son genou. La p’tite touche Grand-maman» (p. 122).

Des phrases reprises dans un contexte non littéraire

Gaston Miron, l’Homme rapaillé, Montréal, Presses de l’Université de Montréal, «Collection du prix de la revue Études françaises», 1970, 171 p.

Reprises sur des pancartes des carrés rouges en 2012.

Pancarte : «Nous sommes devenus les bêtes féroces de l’espoir» / Poème : «nous serons devenus des bêtes féroces de l’espoir» («La route que nous suivons», p. 31).

Pancarte : «Nous sommes arrivés à ce qui commence !» / Poème : «je suis arrivé à ce qui commence» («L’homme rapaillé», p. 5).

Des phrases étonnantes ou paradoxales

André Belleau, «Langue et nationalisme», Liberté, 146 (25, 2), avril 1983, p. 2-9; repris, sous le titre «Pour un unilinguisme antinationaliste», dans Y a-t-il un intellectuel dans la salle ? Essais, Montréal, Primeur, coll. «L’échiquier», 1984, p. 88-92; repris, sous le titre «Pour un unilinguisme antinationaliste», dans Surprendre les voix. Essais, Montréal, Boréal, coll. «Papiers collés», 1986, p. 115-123; repris, sous le titre «Langue et nationalisme», dans Francis Gingras (édit.), Miroir du français. Éléments pour une histoire culturelle de la langue française, Montréal, Presses de l’Université de Montréal, coll. «Espace littéraire», 2014 (troisième édition), p. 425-429; repris, sous le titre «Pour un unilinguisme antinationaliste», dans Surprendre les voix. Essais, Montréal, Boréal, coll. «Boréal compact», 286, 2016, p. 113-121. https://id.erudit.org/iderudit/30467ac

Nous n’avons pas besoin de parler français, nous avons besoin du français pour parler (p. 6).

P. Landry, cité par Plume Latraverse sur son disque Plume pou digne, 1974.

Il mangeait peu, mais mal.

Des phrases qui marquent

Réjean Ducharme, l’Avalée des avalés. Roman, Paris, Gallimard, 1966, 281 p.

Tout m’avale. Quand j’ai les yeux fermés, c’est par mon ventre que je suis avalée, c’est dans mon ventre que j’étouffe (p. 7).

Réjean Ducharme, Le nez qui voque. Roman, Paris, Gallimard, 1967, 247 p.

Je ne suis pas un homme de lettre. Je suis un homme (p. 8).

Le soir de la reddition de Bréda, Roger de la Tour de Babel, avocat au Châtelet, prit sa canne et s’en alla. En 1954, à Tracy, Maurice Duplessis, avocat au Châtelet, mourut d’hémorragie cérébrale; célèbre et célibataire (p. 9).

Gabrielle Roy, la Détresse et l’enchantement, Paris, Arléa, 1986, 505 p. Préface de Jean-Claude Guillebaud. Avertissement de François Ricard. Édition originale : 1984.

Quand donc ai-je pris conscience pour la première fois que j’étais, dans mon pays, d’une espèce destinée à être traitée en inférieure (p. 11).

Autopromotion 400

François Legault et Emmanuel Macron, Paris, janvier 2019

Aujourd’hui, vers 13 h 30, l’Oreille tendue sera à l’émission Là-haut sur la colline d’Antoine Robitaille, sur Qub radio, pour parler de la langue du premier ministre du Québec, François Legault.

Ce n’est pas la première fois qu’elle se penche sur la question; voir les textes du 28 août 2012, du 21 mars 2014, du 24 mars 2014, du 28 mars 2014 et du 14 septembre 2018.

 

[Complément du jour]

On peut (ré)entendre l’entretien ici (segment «Mots et maux de la politique»).

Sur les «éléments de langage», on peut lire ceci :

Krieg-Planque, Alice et Claire Oger, «Eléments de langage», article électronique, Publictionnaire. Dictionnaire encyclopédique et critique des publics, 2 avril 2017. http://publictionnaire.huma-num.fr/notice/elements-de-langage/

Autopromotion 399

Portrait de Jackie Robinson par Charles Malo Melançon

L’Oreille tendue aime beaucoup écrire sur Jackie Robinson (voyez ici, par exemple).

Ce soir, elle parlera de lui à la radio de Radio-Canada, au micro de Jacques Beauchamp, à l’émission Aujourd’hui l’histoire. C’est à 20 h.

Illustration : Charles Malo Melançon

 

[Complément du jour]

On peut (ré)entendre l’entretien ici.

Mémoire(s) de puck

Jay Baruchel, Born into It, 2018, couverture

«This is ours; all are welcome, but this is ours.»

Il y a plusieurs livres dans Born into It. A Fan’s Life de Jay Baruchel (2018).

Il y a, en effet, la vie de Jay Baruchel, le fan des Canadiens de Montréal — c’est du hockey. Élevé à Montréal, revenu dans cette ville après quelques années à Oshawa (Ontario), vivant aujourd’hui à Toronto, le comédien, scénariste et réalisateur est, tel Obélix, tombé dans la potion magique quand il était petit : il ne peut pas s’imaginer autrement qu’en partisan de cette équipe, lui qui ne pratique aucun sport. Faisant le récit de sa vie (il est né en 1982), il témoigne régulièrement de son amour pour sa mère. Avec son père (criminel, alcoolique, drogué, mort d’une overdose à 49 ans), c’est plus compliqué. Il ne dore pas la pilule : «a mess like I am» (p. 174).

Il y a de longs passages sur le hockey comme religion : «My father was Jewish, my mother, Catholic, and I was raised a Habs fan» (p. 15-16). Le théologien Olivier Bauer, le spécialiste par excellence de la dimension religieuse du hockey montréalais, trouverait à boire et à manger dans Born into It.

Il y a une déclaration d’amour à Montréal, malgré tous ses défauts. C’est un anglophone dont l’univers culturel est anglo-saxon qui parle, mais il fait montre d’ouverture envers la nature particulière de cette ville. Ça ne fait pas son affaire, mais il comprend pourquoi l’entraîneur des Canadiens doit parler français (p. 112). Il revient sans cesse sur le référendum de 1995 : il était du camp du Non, ce qui ne le pousse pas pour autant à diaboliser ses adversaires. Il reconnaît sans mal le caractère «distinct» du Québec (p. 114).

Il y a des textes de fiction : de faux courriels adressés aux équipes honnies (les Bruins de Boston, les Maple Leafs de Toronto, les Nordiques de Québec) et une longue nouvelle, «Fans», assez réussie, mettant en scène les deux interlocuteurs d’une tribune téléphonique de sport, qui discutent, entre autres sujet, des joueurs David Desharnais et Scott Gomez («Scott Gomez is a strong name», p. 136).

Il y un récit de l’intérieur de la création du film Goon (2011) : Baruchel a coscénarisé le film, avant de coscénariser et de réaliser sa suite, Goon. Last of the Enforcers (2017); de plus, il a joué dans les deux films. Le chapitre «On Fighting» est à la fois ce récit et une réflexion sur les raisons qui font que Baruchel aime les bagarres au hockey. (L’Oreille tendue n’est pas d’accord, qui souhaite depuis longtemps que les bagarres soient abolies au hockey.) Il prend acte de leur disparition, mais il les regrette : «Hockey fighting is dead, and its place is in history» (p. 180).

Il y une (interminable) description d’une des plus tristement célèbres bagarres du hockey moderne, «La bataille du Vendredi saint», entre les Canadiens de Montréal et les Nordiques de Québec, le 20 avril 1984.

Bref, c’est un livre composite.

Qu’en est-il des positions de Baruchel sur le hockey ? Il n’aime ni le plafond salarial que toutes les équipes de la Ligue nationale de hockey doivent respecter (p. 214-215), ni le président de la LNH, Gary Bettman, à cause de sa volonté d’exporter le hockey dans le désert états-unien : «Gary Bettman loves sand» (p. 217). Il ne manque pas une occasion de citer le nom du gardien de but Patrick Roy et il a pleuré l’échange de P.K. Subban à l’équipe de Nashville («my whole world threw up», p. 106). S’agissant des Canadiens de Montréal — et c’est peut-être le point de vue le plus original du livre —, Baruchel est dans une position difficile : il idolâtre une équipe perdante. Elle a certes eu ses heures de gloire, mais, depuis 1986, elle n’a remporté le championnat de la LNH que deux fois, elle qui l’a dominée pendant plus de deux décennies auparavant. La mémoire des triomphes du passé est dure à porter : «I think we remember too much, and it’s driving us mad» (p. 240).

Être fan, cette activité compliquée, belle et laide à la fois, ne va pas de soi : «This is fandom, in all of its complicated, beautiful ugliness» (p. 241), affirme l’auteur à la fin de son livre. Fan, il l’est et le reste.

P.-S.—Oui, le livre est divisé en trois périodes, mais fortement déséquilibrées, l’essentiel du livre se trouvant dans la deuxième.

P.-P.-S.—Le clin d’œil de Patrick Roy en 1993 n’était pas destiné à Wayne Gretzky (p. 61), mais à Tomas Sandström.

 

Références

Baruchel, Jay, Born into It. A Fan’s Life, Toronto, Harper Avenue, 2018, 249 p.

Bauer, Olivier et Jean-Marc Barreau (édit.), la Religion du Canadien de Montréal, Montréal, Fides, 2009, 182 p. Ill.

Bauer, Olivier, Une théologie du Canadien de Montréal, Montréal, Bayard Canada, coll. «Religions et société», 2011, 214 p. Ill.

Autopromotion 388

«Hostie», publicité du diocèse de Montréal, 2011

Un segment de l’émission Plus on est de fous, plus on lit !, qu’anime Marie-Louise Arsenault à la radio de Radio-Canada, est consacré à la définition de mots beaucoup présents dans l’espace public.

L’Oreille tendue a déjà eu l’occasion d’y réfléchir à débat, à expert, à authenticité, à porte-parole, à transparence, à mononcle et à touriste.

Cet après-midi, entre 14 h et 15 h, elle abordera le mot blasphème.

 

[Complément du jour]

On peut (ré)entendre l’entretien ici.

L’étude du Pew Research Center sur l’état du blasphème dans le monde en 2014 se trouve .

La référence au livre d’Alain Cabantous est la suivante :

Cabantous, Alain, Histoire du blasphème en Occident. XVIe-XIXe siècle, Paris, Albin Michel, coll. «Bibliothèque de l’évolution de l’humanité», 2015, 352 p. Édition originale : 1998.