Accouplements 101

Jean-Simon DesRochers, les Inquiétudes, 2017, couverture

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

La langue nous arrive souvent chargée de préjugés ethniques, auxquels nous ne prêtons peut-être pas toujours l’attention nécessaire. Ci-dessous, on trouvera trois occurrences tirées de lectures de l’Oreille, deux récentes, l’une plus ancienne, d’expressions québécoises que l’on pouvait encore récemment entendre, l’une évoquant les Chinois, l’autre, les Juifs. Le travail des romanciers est de les faire entendre; le nôtre, de leur résister

Tremblay, Michel, Survivre ! Survivre !, dans la Diaspora des Desrosiers, Montréal et Arles, Leméac et Actes sud, coll. «Thesaurus», 2017, 1393 p., p. 1101-1251. Préface de Pierre Filion. Édition originale : 2014.

«La chose se produit avec une telle rapidité que Victoire n’a pas le temps de réfléchir à ce qu’elle fait. Elle voit la tête de son mari rebondir avant de comprendre qu’elle vient de lui donner une claque chinoise (si tu restes pas tranquille, moman va te donner une claque chinoise en arrière de la tête pis tu vas rester empesée pour le reste de la journée) dans ses cheveux gras et humides» (p. 1174).

DesRochers, Jean-Simon, les Inquiétudes. L’année noire – 1. Roman, Montréal, Les Herbes rouges, 2017, 591 p.

«Aimée, c’est toi qui as pris le sucre en poudre ?
Non, maman, c’est pas moi.
Pourquoi tu as du sucre en poudre autour de la bouche, d’abord ?
Parce que c’est Ovide qui m’en a donné.
Arrête de conter des menteries !
Mais…
Tais-toi ! Pis baisse les yeux !

Mettre ça su’l dos de ton p’tit frère qui est au ciel… Ça, ma p’tite Juive, tu l’f’ras pas deux fois… Attends que j’le dise à ton père, ma noire !» (p. 492)

Gottheil, Allen, «Nancy Neamtan», dans les Juifs progressistes au Québec, Montréal, Éditions par ailleurs…, 1988, p. 269-296.

«Lorsque j’habitais Saint-Henri, j’étais liée d’amitié avec une famille québécoise qui comptait trois jeunes filles, dont Huguette. Quand la petite gamine faisait des coups et que ses parents se fâchaient, ils l’apostrophaient d’une épithète que je ne comprenais pas, même après l’avoir entendue plusieurs fois. Un jour, j’ai pigé ce qu’ils grondaient : “Fais pas ta petite Juive !” Ça m’a surprise mais je ne savais trop comment réagir. Ça m’a pris du temps, peut-être un mois ou deux, avant de pouvoir dire à ces gens que moi, j’étais Juive. J’étais trop gênée, et lorsque je leur ai dévoilé mes origines, il n’y a pas eu de grosses discussions sur ce que cela pouvait représenter. Après, ils ont continué de la traiter de “petite Juive” sans toutefois faire d’association entre l’expression et moi. Soulignons que l’incident n’a aucunement changé nos rapports» (p. 285-286).

 

[Complément du jour]

Exactement dans le même sens que ce qui précède, ceci, sur Twitter :

http://twitter.com/TuThanhHa/status/927618769819750400

 

[Complément du 28 novembre 2017]

L’Oreille tendue a été interrogée plus tôt aujourd’hui par la journaliste Maya Johnson, du réseau de télévision CTV, sur l’utilisation de l’expression «travailler comme un nègre» par un député du parlement québécois, François Gendron. Ça se trouve ici.

Autopromotion (brève et indirecte) 321

Il y a quelques années, l’Oreille tendue a eu le plaisir de publier un court livre de Marc Zaffran / Martin Winckler, Profession médecin de famille. Sur ce blogue, elle a abordé le statut du français populaire du Québec dans un de ses romans policiers, les Invisibles. Depuis quelques années, elle et lui se croisent à l’occasion à Montréal.

Quand le romancier lui a demandé de lire quelques passages d’un roman (alors) à paraître, histoire de voir ce qu’il en était du français québécois d’un des personnages, l’Oreille n’allait évidemment pas refuser.

C’est de cela qu’il est brièvement question à la quinzième minute de cette vidéo présentant les Histoires de Franz.

P.S.—Il arrive aussi à MZ / MF de pratiquer le zeugme.

 

Références

Winckler, Martin, les Invisibles, Paris, Fleuve noir, 2011, 277 p.

Winckler, Martin, les Histoires de Franz, Paris, P.O.L, 2017, 528 p.

Zaffran, Marc, Profession médecin de famille, Montréal, Presses de l’Université de Montréal, coll. «Profession», 2011, 72 p.

Autopromotion (encyclopédique) 290

Application Encyclopédie pour tablette

Cela ne se voit peut-être pas à l’œil nu, mais l’Oreille tendue vient du XVIIIe siècle, plus précisément de Diderot, le codirecteur de l’Encyclopédie. Cela ne l’empêche pas d’avoir un pied fortement ancré dans le numérique; il lui est même arrivé d’écrire sur Wikipédia (ici et ).

Quand son collègue et néanmoins ami Marcello Vitali-Rosati lui a demandé de participer à une table ronde intitulée «Le projet encyclopédique à l’époque du numérique», elle ne pouvait donc pas refuser.

Cela se tiendra le 6 avril 2017, à 16 h, à l’Université de Montréal, dans le cadre d’une journée d’étude avec Jeffrey Schnapp.

L’invitation est lancée.

Renseignements ici.

 

[Complément du 5 avril 2017]

Une diffusion vidéo est prévue à https://www.youtube.com/watch?v=_AVUsqjtvZ4.

Autopromotion 287

L’Oreille tendue a beaucoup écrit sur Maurice Richard et, nécessairement, sur l’émeute du 17 mars 1955 qui a suivi la suspension de ce joueur, le plus célèbre des Canadiens de Montréal — c’est du hockey.

Elle en a aussi souvent parlé. C’est encore le cas aujourd’hui.

 

[Complément du jour]

 

Référence

Melançon, Benoît, les Yeux de Maurice Richard. Une histoire culturelle, Montréal, Fides, 2006, 279 p. 18 illustrations en couleurs; 24 illustrations en noir et blanc. Nouvelle édition, revue et augmentée : Montréal, Fides, 2008, 312 p. 18 illustrations en couleurs; 24 illustrations en noir et blanc. Préface d’Antoine Del Busso. Traduction : The Rocket. A Cultural History of Maurice Richard, Vancouver, Toronto et Berkeley, Greystone Books, D&M Publishers Inc., 2009, 304 p. 26 illustrations en couleurs; 27 illustrations en noir et blanc. Traduction de Fred A. Reed. Préface de Roy MacGregor. Postface de Jean Béliveau. Édition de poche : Montréal, Fides, coll. «Biblio-Fides», 2012, 312 p. 42 illustrations en noir et blanc. Préface de Guylaine Girard.

Les Yeux de Maurice Richard, édition de 2012, couverture