Une secte ?

Les adolescents ont des accolades fortement ritualisées.

Les francs-maçons auraient une poignée de main secrète.

Que font les anciens joueurs des Canadiens de Montréal — c’est du hockey — pour se reconnaître les uns les autres ? Ils ne disent jamais Canadiens; ils disent toujours Club de hockey Canadien.

Oui, c’est de la langue de puck.

 

Référence

Melançon, Benoît, Langue de puck. Abécédaire du hockey, Montréal, Del Busso éditeur, 2014, 128 p. Préface de Jean Dion. Illustrations de Julien Del Busso.

Langue de puck. Abécédaire du hockey (Del Busso éditeur, 2014), couverture

Une leçon pour les zèbres

Chandail et sifflet d’arbitre

Uniforme oblige, les arbitres, au hockey, sont des zèbres. Ils ont un sifflet pour annoncer les punitions, dont ils se servent inégalement. Plus la saison avance, et plus un match avance, et moins ils l’utilisent, même quand les infractions sont évidentes. Pourquoi ? Ils veulent laisser jouer. Cela s’appelle ranger son sifflet.

Au football (au soccer), quand un arbitre (non zébré) laisse jouer, c’est que l’équipe A a péché contre l’équipe B, que l’équipe B a toujours la balle et que l’arbitre n’arrêtera pas le jeu — même s’il y a faute —, histoire de ne pas priver cette équipe B de l’avantage qu’elle pourrait avoir.

Sur la glace, en laissant jouer, en n’intervenant pas lorsqu’il le devrait, l’arbitre ne fait pas son travail. Sur la pelouse, en laissant jouer, il le fait.

Lettre à Pierre Houde

Cher Pierre Houde,

Au fil des ans, j’ai pris plaisir à vous entendre décrire les matchs de hockey à la télévision.

En suivant la Coupe du monde 2014 dans le poste, j’ai eu plusieurs réactions. Je vous en indique deux.

La première est que vous me manquez, notamment quand j’entends les présentateurs des matchs à Radio-Canada (Michel Chabot, René Pothier) affubler les joueurs de noms anglophones même s’ils ne sont pas anglo-saxons. Ils se surpassent dans les matchs de l’équipe des Pays-Bas, où plusieurs joueurs — Van Persie, Sneijder — semblent être devenus citoyens américains. Vous savez, vous, qu’il ne faut pas céder à «L’effet Derome», jadis décrié par André Belleau.

La seconde réaction qui me vient en écoutant les matchs de football (de soccer) à la télévision est que la langue du foot pourrait, à l’occasion, permettre à la langue de puck de se renouveler. Des exemples ?

Effacer un joueur, c’est mieux que simplement le déjouer, non ?

Percuter un adversaire a au moins autant de punch que de le mettre en échec.

Un joueur part en échappée ? C’est qu’on a ouvert un boulevard à ce joueur lancé.

Il y a des feintes sur la glace. Pourquoi ne pas les décrire, comme sur la pelouse, en parlant de petit pont et de grand pont ?

Le devant du filet, oui. Sa façade, aussi.

Le centre de la glace, oui. L’axe, également.

Votre collègue Martin McGuire a déjà adopté dribbler, mais pas vous. Vous préférez transporter le disque, contrôler la rondelle, voire tricoter. (Je n’ai rien contre.)

Partir en contre, c’est bien l’équivalent, en moins guerrier, de la contre-attaque ?

On souhaite que tous les tirs au but soient cadrés.

(Soyez rassuré : je ne souhaite pas que les joueurs des Canadiens se mettent à faire des bicyclettes ni que leurs partisans deviennent des hooligans. Les gardiens ne devraient pas boxer la rondelle, non plus.)

Ce ne sont là qu’une douzaine d’exemples, mais il me semble que cela donnerait de la variété à la description télévisuelle hockeyistique.

Au plaisir de continuer à vous entendre,

L’Oreille tendue

P.-S. — Vous me permettrez un (minuscule) reproche avant de terminer ? Non, tentativement n’existe pas en français. Sorry.

 

Références

Belleau, André, «L’effet Derome ou Comment Radio-Canada colonise et aliène son public», Liberté, 129 (22, 3), mai-juin 1980, p. 3-8; repris, sous le titre «L’effet Derome», dans Y a-t-il un intellectuel dans la salle ? Essais, Montréal, Primeur, coll. «L’échiquier», 1984, p. 82-85; repris, sous le titre «L’effet Derome», dans Surprendre les voix. Essais, Montréal, Boréal, coll. «Papiers collés», 1986, p. 107-114; repris dans Laurent Mailhot (édit.), l’Essai québécois depuis 1845. Étude et anthologie, Montréal, Hurtubise HMH, coll. «Cahiers du Québec. Littérature», 2005, p. 187-193; repris, sous le titre «L’effet Derome», dans Surprendre les voix. Essais, Montréal, Boréal, coll. «Boréal compact», 286, 2016, p. 105-112. https://id.erudit.org/iderudit/29869ac

Melançon, Benoît, Langue de puck. Abécédaire du hockey, Montréal, Del Busso éditeur, 2014, 128 p. Préface de Jean Dion. Illustrations de Julien Del Busso.

Langue de puck. Abécédaire du hockey (Del Busso éditeur, 2014), couverture

Modeste contribution à un dictionnaire des synonymes journalistiques

Dans l’ordre habituel (21 caractères) : de gauche à droite (18 caractères)

Affaires (vraies ~) (Québec) : argent

Asseoir (s’) (Québec) : parler

Boulon : plus petit commun dénominateur du mythe

Capitale : ville, village, hameau où se tient une activité

Citoyens : voir société civile

Énigmatique : Russie (voir steppes)

Historique : première occurrence cette semaine d’un événement

Limousine (Québec) : poste de ministre (merci à @gpinsonm19). En France : strapontin

Longue maladie : cancer (plus rarement : sida)

Néo : presque ancien

OVNI : je manque de vocabulaire, reconnaît un journaliste

Périple (Québec) : déplacement de joueurs de hockey

Précision (Québec) : nous avons merdé, dixit, du bout des lèvres, le quotidien la Presse de Montréal

Saga : activité récurrente

Société civile : voir citoyens

Steppes : Russie

Terrains de football (unité de mesure) : étendu

Tsunami (un ~ de) : beaucoup

Visage de la pauvreté : pauvreté sans visage