Du bozo

Bozo le clown, 1961, photo déposée sur Wikimedia Commons

Soit la phrase suivante, tirée de la Presse+ du 30 janvier 2024 :

N’importe quel bozo peut désormais télécharger une application sur son iPhone pour réaliser en vitesse une vidéo porno, hypertruquée mais hyperréaliste, mettant en scène l’objet de ses fantasmes.

Qui est donc ce «bozo» ? Dans la langue populaire du Québec, ce mot, emprunté à l’anglais, désigne quelqu’un qui se tient sur un des barreaux de l’échelle de la bêtise, Il est souvent connoté négativement : on pourra apprécier le ti-coune; pour le bozo, c’est plus difficile. C’est ce qu’indique l’exemple ci-dessus.

Il existe (au moins) deux exceptions : le personnage qui a donné son titre à la chanson «Bozo-les-Culottes», de Raymond Lévesque, et Bozo le clown devaient attirer la sympathie, sans toutefois se démarquer ni l’un ni l’autre sur le plan des compétences intellectuelles. S’agissant de la chanson, tout le monde n’était pas d’accord avec une lecture bienveillante.

 

Illustration : Bozo le clown, 1961, photo déposée sur Wikimedia Commons

Tentative d’exégèse musicale du jour

Jean-Sébastien Bach

Lisant le Chemin d’en haut, le roman récent de J. P. Chabot (2022), l’Oreille tendue tombe sur cette phrase tout à fait mystérieuse pour elle : «Personne d’autre connaissait ces groupes-là, à l’école, tout le monde écoutait de la musique de poil» (p. 167).

«Musique de poil» ?

L’Oreille consulte alors un moteur de recherche connu, où elle découvre un article de Jean Dion paru en 2011 : «Puis, à tête reposée, je songeai à cet autre génie qui faisait jouer de la musique de poil à fond la caisse dans son bazou et j’en arrivai à une conclusion provisoire : l’humain ne se sent jamais autant exister que lorsqu’il fait du bruit.» Autre citation : «Musique de drogués, musique de poil, musique de fucké !»

Cela fait bien peu pour essayer de comprendre. L’Oreille s’est alors tournée vers Twitter; on lui a offert plusieurs éléments de réponses. Que conclure de cette consultation ?

Le «poil» renvoie tantôt à la richesse pileuse de ses praticiens, tantôt à celle de ses fans, tantôt aux deux groupes.

Ce «poil» se prononcerait souvent «pouèl», «pouèle», «pouel» ou «pwell».

La «musique de poil» serait riche en décibels, d’où son association avec les «métalleux».

Elle serait née dans les années 1980.

Jusque-là, ça va à peu près. Les choses se compliquent quand on essaie de donner des exemples ou de définir plus précisément un genre musical.

On peut procéder par la négative. Pour J. P. Chabot, la «musique de poil» n’inclurait pas Thursday, The Used, Underoath, Thrice ou Rufio; «Personne d’autre connaissait ces groupes-là, à l’école» (p. 167).

Parmi les exemples évoqués : Bon Jovi, Europe, Metallica, Slayer, Twisted Sister, Poison, Megadeth, Voivod, Anthrax, Judas Priest, Lamb of God.

Led Zeppelin ? Iron Maiden ? Ça se discute(rait).

Pour terminer, trois vidéos à voir sur YouTube.

Des élèves de l’école Saint-Jean-de-Bosco, selon RBO :

 

Le groupe Les Cowboys fringants et sa chanson «Party d’pouel» (2021) :

 

Le groupe Dousseur de vivre, selon Les inconnus :

 

L’enquête reste ouverte, bien sûr.

 

Illustration : The Guardian, 21 septembre 2013

 

Référence

Chabot, J. P., le Chemin d’en haut. Roman, Montréal, Le Quartanier, «série QR», 171, 2022, 224 p.