«Machin, Chose, Un tel, Une telle,
Tous ceux du commun des mortels
Furent d’avis que j’aurais dû
En bonn’justice être pendu
À la lanterne et sur-le-champ»
(Georges Brassens, «Celui qui a mal tourné»).
(Une définition du zeugme ? Par là.)
« Nous n’avons pas besoin de parler français, nous avons besoin du français pour parler » (André Belleau).
«Machin, Chose, Un tel, Une telle,
Tous ceux du commun des mortels
Furent d’avis que j’aurais dû
En bonn’justice être pendu
À la lanterne et sur-le-champ»
(Georges Brassens, «Celui qui a mal tourné»).
(Une définition du zeugme ? Par là.)
Mea maxima culpa. Il est arrivé à quelques reprises à l’Oreille tendue de parler du 450 comme si cela allait de soi pour tous ses lecteurs. Corrigeons la situation.
Qu’est-ce que le 450 ? Reprenons pour commencer la définition du Dictionnaire québécois instantané (2004).
Code téléphonique de la grande région montréalaise, mais à l’extérieur de l’île de Montréal (le code de Montréal est le 514). «514 et 450 : les deux solitudes» (la Presse, 20 décembre 2002).
1. Unité de mesure politique. Les élections se jouent ce soir dans le 450. «Les libéraux raflent presque tout dans le 450» (la Presse, 15 avril 2003). «Le “450” au pouvoir !» (la Presse, 20 mai 2003)
2. Terme générique désignant la source de tous les maux affectant le plateau Mont-Royal la fin de semaine. Les 450 vont manger sur la rue Duluth le samedi soir. Les 450 envahissent la rue Mont-Royal le dimanche après-midi. «[Le] 450 a colonisé l’ensemble du Québec» (le Devoir, 27-28 octobre 2001).
Se prononce toujours quatre-cinq-zéro, jamais quatre cent cinquante (p. 178).
Qu’ajouter à cela ? Cinq choses.
Que Montréal dispose toujours du 514, mais qu’on lui a aussi adjoint le 438. Le 438 est moins infamant que le 450, mais ce n’est quand même pas le 514.
Que le 450 est toujours aussi éloigné du 514. La preuve ? Quitter le second au profit du premier est un «exode» (la Presse, 24 mars 2014, p. A9).
Que le 514 est toujours, malgré les prétentions du 450, plus urbain que lui : «Urbain ou 450 ?» (la Presse, 9 juin 2012, cahier Maison, p. 8) Le blogue Vivez la vie urbaine est consacré à ces questions.
Que le 450 est devenu matière artistique. Il a son roman : Ô 450 ! Scènes de la vie de banlieue de Chantal Gevrey. Il a eu son émission de télévision, au réseau TQS : 450, chemin du golf. Il a sa chanson, «(450)», du défunt groupe folk pop André, plus téléphoniquement spécifique, sur le même thème, que «Banlieue» (Les Cowboys fringants) et «Rive-Sud» (Beau Dommage).
Que Céline Dion, chanteuse et mère de famille, est née native de la région aujourd’hui désignée par le 450.
Attention : il ne faut pas confondre le 450 et l’adjacent.
P.-S. — Pour les chansons, merci à @OursMathieu, @AmelieGaudreau, @riclaude et @andredesorel.
[Complément du 16 juin 2018]
Le Devoir du jour consacre un article au vingtième anniversaire du 450. L’Oreille y est citée. Merci.
[Complément du 2 janvier 2024]
Le 450 peut même être objet poétique, par exemple chez Ian Lauda, dans le Mécanisme intérieur (2023) :
Si loin si proche
tu es la porte du nord que tous recherchent
sans toi pas d’accès à ces choses merveilleuses
comme la fleur du luxe
ou les trésors du joyeux festin
sans toi
on demeure dans la périphérie des choses
dans le quatre-cinq-zéro (p. 42)
Références
Gevrey, Chantal, Ô 450 ! Scènes de la vie de banlieue, Montréal, Éditions Marchand de feuilles, 2005, 190 p.
Lauda, Ian, le Mécanisme intérieur. Poésie, Montréal, Del Busso éditeur, 2023, 57 p.
Melançon, Benoît, en collaboration avec Pierre Popovic, Dictionnaire québécois instantané, Montréal, Fides, 2004 (deuxième édition, revue, corrigée et full upgradée), 234 p. Illustrations de Philippe Beha. Édition de poche : Montréal, Fides, coll. «Biblio-Fides», 2019, 234 p. La «Carte du Québec adjacent» reproduite ci-dessus se trouve p. 13.
Que peut être l’accent ?
Chantant
Musical
Savoureux
Sympathique
Charmant
Craquant
Adorable
Affecté
Méridional
Paysan
Léger
Fort
Lourd
Incompréhensible
Québécois
P.-S. — Des suggestions d’ajouts ?
[Complément du 19 mars 2014]
La taupe québécquoise de l’Oreille tendue lui a communiqué la liste des cooccurences proposées, pour accent, par le logiciel Antidote : particulier, prononcé, inimitable, traînant, étranger, doux, délicieux, rocailleux, nasillard, pointu, indéfinissable, terrible, mélodieux, guttural, rauque, bizarre, exotique, irrésistible, traînard, familier, lamentable, rude, hautain. L’Oreille avoue un faible pour indéfinissable.
Marie-Pier Frappier, elle, sur Twitter, lui a fait découvrir l’existence de la chanson «L’accent» des Fabulous Trobadors.
L’Oreille tendue — c’est de notoriété publique — aime beaucoup sacrer. À cet art, elle a consacré nombre d’entrées de ce blogue.
Elle s’étonne toujours devant les formes molles des sacres (tabarnouche pour tabarnak, par exemple), car on perd alors de vue la quincaillerie liturgique sur laquelle prend appui le juron québécois.
Cet étonnement s’étend à d’autres expressions, plus idiosyncrasiques que généralisées, dans lesquelles le matériel religieux est évoqué. Il est ainsi des gens qui diraient pentures de confessionnal (merci à @liseravary). Pour d’autres, plus ironiques, bon en chasuble (@MDumaisJDM) serait possible. On entend(ait) parfois petit Jésus de plâtre.
Le jour où l’Oreille aura recours à pareils euphémismes, vous pourrez lui crier dessus.
[Complément du 3 mars 2014]
Qui veut, pour jurer, s’en remettre à l’histoire sainte, mais préfère ne pas se servir de Son nom ou de celui de Son fils, peut toujours avoir recours à d’autres personnages bibliques : «Jared Leto sur le tapis rouge aux #oscars : comme si Jésus s’était loué un tux blanc pour échapper aux Romains. Étrange en Hérode !» (@_scorm)
[Complément du 15 avril 2014]
@revi_redac rappelle à l’Oreille des paroles d’une chanson de Richard Desjardins, «Le bon gars» :
Y vont m’aimer en Hérode
Excellent citoyen
Pas parfait mais pas loin
«Pourtant quelqu’un m’a dit
Que tu m’aimais encore»
(Carla Bruni, «Quelqu’un m’a dit»)
Le Parisien, 7 janvier 2014 : «Carla Bruni : concert annulé au Québec faute de fans.»
Le Journal de Montréal, 7 janvier 2014 : «Carla Bruni annule Québec et Gatineau.»
La Presse, 8 janvier 2014, cahier Arts, p. 2 : «Carla Bruni annule à Québec et à Gatineau.»
Le Nouvel Observateur, 8 janvier 2014 : «Carla Bruni fait un flop au Québec et annule ses concerts : doit-elle prendre sa retraite ?»
Le Devoir, 8 janvier 2014, p. B7 : «Carla Bruni allège sa tournée.»