Accouplements 158

Louise Dupré, Théo à jamais, 2020, couverture

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Dupré, Louise, Théo à jamais. Roman, Montréal, Héliotrope, 2020, 233 p.

«Quelques mois plus tôt, j’avais refusé de participer à une émission sur les adolescents, je ne me voyais pas parler d’Elsa et de Théo à la radio. La recherchiste avait semblé étonnée, tout le monde rêvait d’avoir quinze minutes de gloire, qu’est-ce qui n’allait pas chez moi ?» (p. 134)

Melançon, Benoît, «Un intellectuel heureux ?», dans Pour Jacques. Du beau, du bon, Dubois, Bruxelles, Labor, coll. «Espace Nord», 1998, p. 169-174. https://doi.org/1866/32050

«Il faut savoir apprécier la beauté de la chose : un professeur d’université deviserait à la télévision avec un imitateur tenant le rôle d’un comédien, lui-même jouant le rôle d’un dramaturge imaginé pour une pièce de théâtre de Sacha Guitry adaptée par Jean-Claude Brisville et filmée par Molinaro. (Le pauvre Beaumarchais aurait été absolument oublié dans cette galère.) Devant le refus du professeur de se prêter à cette mascarade, surprise — et panique : l’émission est le lendemain — de la recherchiste, qui semblait ne pas comprendre que l’on n’accepte pas d’emblée son invitation et que l’on se prive de l’occasion d’aller causer à la télé» (p. 170-171).

Autopromotion 516

L’ami Laurent Turcot a sa chaîne sur YouTube, L’histoire nous le dira.

En 2018, l’Oreille tendue y a causé de Voltaire et du Canada, puis de Maurice Richard — c’est du hockey. En 2019, il y a été question du Siècle des lumières, en l’occurrence de l’Encyclopédie de Diderot et D’Alembert, de son livre Le niveau baisse ! (et autres idées reçues sur la langue), de Jackie Robinson et d’Ella Fitzgerald. Cette année, il y a eu Marivaux, un célèbre tableau d’Anicet Charles Gabriel Lemonnier, puis le plus récent livre de l’Oreille, Nos Lumières (2020).

Aujourd’hui, hommage à André Belleau (1930-1986) :

P.-S.—L’Oreille a aussi sa chaîne vidéo. Elle est bien plus modeste.

 

Références

Melançon, Benoît, Le niveau baisse ! (et autres idées reçues sur la langue), Montréal, Del Busso éditeur, 2015, 118 p. Ill.

Melançon, Benoît, Nos Lumières. Les classiques au jour le jour, Montréal, Del Busso éditeur, 2020, 194 p.

À lire jusqu’à la fin

Église St. Michael, Montréal

Carnet d’un promeneur dans Montréal (2020), de Dinu Bumbaru, est un beau livre, plein d’informations et de découvertes.

Formé en architecture et en conservation, Bumbaru défend le patrimoine montréalais depuis plusieurs années, notamment à Héritage Montréal. Il se déplace à pied et en autobus (p. 13, p. 75, p. 93) et, de ses promenades, il a rapporté des milliers de dessins; il en donne près de 200 à voir dans ce livre, qu’il accompagne de courts textes.

Sans élever le ton, il suit l’évolution de l’occupation de l’espace montréalais. Il ne semble guère enthousiaste devant le nouveau Centre hospitalier de l’Université de Montréal (p. 18, p. 61, p. 69), mais il apprécie l’édifice des Hautes études commerciales (p. 133). Il a ses lieux de prédilection : Outremont, l’avenue du Parc, le boulevard Saint-Laurent. Par touches brèves, il fait renaître des lieux disparus (p. 24, p. 79, p. 171), il s’inquiète de l’avenir (p. 52, p. 102, p. 188), il critique (p. 77, p. 85, p. 120, p. 126, p. 165, p. 198), il rappelle l’histoire de l’architecture de la ville (noms propres, dates, événements). Il saisit aussi bien le modeste alignement de balcons à Outremont (p. 111) que la place de l’oratoire Saint-Joseph dans le paysage monumental (p. 191-193). Et, surtout, ces choses vues (Victor Hugo est en épigraphe) donnent le goût de découvrir certains sites ou de retourner voir avec de nouveaux yeux des lieux connus.

Ce promeneur est sensible au concret et, donc, aux bagels. Sans aller jusqu’à comparer les new-yorkais aux montréalais, il évoque les «bageleries» où on les cuisine (p. 75) et une église qui les honorerait. Qui ne lirait pas l’ensemble du livre pourrait s’interroger sur l’existence de l’«église St. Michael of the Bagels», dans le Mile End (p. 117). On apprend plus tard qu’il s’agit «de l’église St. Michael dite “of the Bagels”» (p. 140). Ce «dite» change considérablement la perspective religieuse.

Voilà une autre bonne raison de lire Dinu Bumbaru jusqu’à la fin.

 

Illustration : église St. Michael, photo déposée sur Wikimedia commons

 

Référence

Bumbaru, Dinu, Carnet d’un promeneur dans Montréal, Montréal, La Presse, 2020, 198 p. Ill.