Accouplements 157

Nicholson Baker, Checkpoint, 2004, couverture
(Accouplements : une rubrique où l’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

L’Oreille tendue est une fan de baladodiffusion et de Malcolm Gladwell — et donc de Revisionist History, le podcast de Gladwell. Au cours de sa cinquième saison, qui se termine ces jours-ci, une série de quatre épisodes a été consacrée à la carrière du militaire états-unien Curtis LeMay, notamment à son rôle dans les bombardements du Japon à la fin de la Deuxième Guerre mondiale (épisodes 4, 5, 6 et 7). Il y a aussi été question de la guerre de Corée et de l’invention du napalm.

L’Oreille tendue est une fan de l’écrivain Nicholson Baker, dont elle relit ces jours-ci plusieurs romans. Dans Checkpoint (2004), le personnage de Ben s’intéresse à l’histoire de la Guerre froide — «So you’re, ah, sunk pretty darn deep into the fifties and sixties now» (p. 37) —, aux bombardements du Japon (p. 61) et au napalm (p. 11-12).

L’un et l’autre rappellent que le napalm a été testé sur le terrain de sport de… Harvard.

L’Oreille est doublement ravie.

P.-S.—Le plus récent essai de Baker, Baseless. My Search for Secrets in the Ruins of the Freedom of Information Act (2020), porte, entre autres choses, sur la guerre de Corée. Tout est dans tout, et réciproquement.

 

Références

Baker, Nicholson, Checkpoint. A Novel, New York, Alfred A. Knopf, 2004, 115 p.

Baker, Nicholson, Baseless. My Search for Secrets in the Ruins of the Freedom of Information Act, New York, Penguin, Random House, 2020, 464 p.

Accouplements 156

Nicholson Baker, U and I. A True Story, 1991, couverture

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Et vous, vos jaquettes, vous en faites quoi ?

Block, Lawrence, The Burglar Who Painted Like Mondrian. A Bernie Rhodenbarr Mystery, New York, HarperCollins, 2005. Édition numérique. Édition originale : 1983.

«Like so many non-collectors, he’d disposed of the dust jackets of most of his books, unwittingly chucking out the greater portion of their value in the process. There are any number of modern firsts worth, say, a hundred dollars with a dust jacket and ten or fifteen dollars without it. Onderdonk was astonished to learn this. Most people are

Baker, Nicholson, U and I. A True Story, New York, Random House, 1991, 179 p.

«For Christmas my mother gave me Picked-Up Pieces, a collection that included the golf essay that had cracked her up a few years earlier : she said she liked the cover a lot, which was a wide-angle black-and-white shot of [John] Updike in his front yard holding out a handful of fallen leaves. I was secretly disappointed by the gift, because I wanted to own paperback fiction, not hardback collection of book reviews, and I threw out the jacket because I wanted the hardback books I did have on my shelf to look more like the books in university libraries, which, unlike the embarrassingly crinkly tenants of public institutions, weren’t shelved with their jackets on» (p. 29).

Autopromotion 516

L’ami Laurent Turcot a sa chaîne sur YouTube, L’histoire nous le dira.

En 2018, l’Oreille tendue y a causé de Voltaire et du Canada, puis de Maurice Richard — c’est du hockey. En 2019, il y a été question du Siècle des lumières, en l’occurrence de l’Encyclopédie de Diderot et D’Alembert, de son livre Le niveau baisse ! (et autres idées reçues sur la langue), de Jackie Robinson et d’Ella Fitzgerald. Cette année, il y a eu Marivaux, un célèbre tableau d’Anicet Charles Gabriel Lemonnier, puis le plus récent livre de l’Oreille, Nos Lumières (2020).

Aujourd’hui, hommage à André Belleau (1930-1986) :

P.-S.—L’Oreille a aussi sa chaîne vidéo. Elle est bien plus modeste.

 

Références

Melançon, Benoît, Le niveau baisse ! (et autres idées reçues sur la langue), Montréal, Del Busso éditeur, 2015, 118 p. Ill.

Melançon, Benoît, Nos Lumières. Les classiques au jour le jour, Montréal, Del Busso éditeur, 2020, 194 p.

À lire jusqu’à la fin

Église St. Michael, Montréal

Carnet d’un promeneur dans Montréal (2020), de Dinu Bumbaru, est un beau livre, plein d’informations et de découvertes.

Formé en architecture et en conservation, Bumbaru défend le patrimoine montréalais depuis plusieurs années, notamment à Héritage Montréal. Il se déplace à pied et en autobus (p. 13, p. 75, p. 93) et, de ses promenades, il a rapporté des milliers de dessins; il en donne près de 200 à voir dans ce livre, qu’il accompagne de courts textes.

Sans élever le ton, il suit l’évolution de l’occupation de l’espace montréalais. Il ne semble guère enthousiaste devant le nouveau Centre hospitalier de l’Université de Montréal (p. 18, p. 61, p. 69), mais il apprécie l’édifice des Hautes études commerciales (p. 133). Il a ses lieux de prédilection : Outremont, l’avenue du Parc, le boulevard Saint-Laurent. Par touches brèves, il fait renaître des lieux disparus (p. 24, p. 79, p. 171), il s’inquiète de l’avenir (p. 52, p. 102, p. 188), il critique (p. 77, p. 85, p. 120, p. 126, p. 165, p. 198), il rappelle l’histoire de l’architecture de la ville (noms propres, dates, événements). Il saisit aussi bien le modeste alignement de balcons à Outremont (p. 111) que la place de l’oratoire Saint-Joseph dans le paysage monumental (p. 191-193). Et, surtout, ces choses vues (Victor Hugo est en épigraphe) donnent le goût de découvrir certains sites ou de retourner voir avec de nouveaux yeux des lieux connus.

Ce promeneur est sensible au concret et, donc, aux bagels. Sans aller jusqu’à comparer les new-yorkais aux montréalais, il évoque les «bageleries» où on les cuisine (p. 75) et une église qui les honorerait. Qui ne lirait pas l’ensemble du livre pourrait s’interroger sur l’existence de l’«église St. Michael of the Bagels», dans le Mile End (p. 117). On apprend plus tard qu’il s’agit «de l’église St. Michael dite “of the Bagels”» (p. 140). Ce «dite» change considérablement la perspective religieuse.

Voilà une autre bonne raison de lire Dinu Bumbaru jusqu’à la fin.

 

Illustration : église St. Michael, photo déposée sur Wikimedia commons

 

Référence

Bumbaru, Dinu, Carnet d’un promeneur dans Montréal, Montréal, La Presse, 2020, 198 p. Ill.