Les zeugmes du dimanche matin et de Philibert Humm

Philibert Humm, Roman fleuve, 2022, couverture

«Quand le tire-bouchon eut rempli son office, et le sang de la vigne nos verres, nous parlâmes des manquements de la Banque centrale européenne en matière de politique agricole commune et de la délicate recette de la poule au pot à la béarnaise.»

«Sur cette dernière assertion de la tante, nous tombâmes tous les cinq d’accord et de sommeil. Au matin, mon allergie avait disparu. Il avait suffi d’une ellipse

Philibert Humm, Roman fleuve, Paris, Éditions des Équateurs, coll. «Littérature», 2022, 288 p.

 

(Une définition du zeugme ? Par .)

L’oreille tendue de… Alain Mabanckou

Image tirée de Refrancisons-nous, 1951 (deuxième édition), p. 97

«Le déclin de la langue française est une obsession inventée par ceux qui pratiquent la politique de la citadelle assiégée — une citadelle dans laquelle je ne me trouve pas car j’ai appris à tendre l’oreille du côté de la rumeur du monde.»

Alain Mabanckou, mai 2023

 

Illustration : J.-F., F. [Frère Jean-Ferdinand], Refrancisons-nous, s.l. [Montmorency, Québec ?], s.é., coll. «Nous», 1951 (deuxième édition), 143 p., p. 97.

Pas derrière Zdeno Chára

Dans la Presse+ d’hier, rubrique «Mauvaise conduite», sept journalistes qui y couvrent le sport répondaient à la question «Quelle expression liée au sport vous irrite le plus ?» Réponses : le recours au «tu» collectif (Simon-Olivier Lorange), «éthique de travail» (Guillaume Lefrançois), «grande finale» (Mathias Brunet), «match sans lendemain» (Richard Labbé), «tir sans avertissement» (Justin Vézina), «équipe canadienne de soccer féminin» (Nicholas Richard), «vibrer les cordages» (Jean-François Tremblay).

L’Oreille tendue a beaucoup (trop) réfléchi à la langue du hockey. Que répondrait-elle à cette question ?

Elle choisirait probablement le verbe se blottir, si cher au cœur du commentateur Yvon Pedneault. Exemple : «X est allé se blottir derrière le défenseur.»

Au sens strict, cet usage peut se défendre, si l’on en croit les définitions du Petit Robert (édition numérique de 2018) : «Se ramasser sur soi-même, de manière à occuper le moins de place possible»; «Se mettre à l’abri, en sûreté.»

Cela étant, l’Oreille, quand elle entend se blottir, pense lit, couverture, confort. Le Petit Robert, encore : «Se blottir dans un coin, dans son lit, sous ses couvertures.»

Elle ne penserait jamais à cela en allant se placer derrière (l’ancien joueur) Zdeno Chára, 2,06 m, 116 kilos (souvent déposés peu délicatement sur un joueur adverse). Il y a des endroits plus accueillants dans la vie.

Bien sûr, vous vous blottissez où vous voulez sur la glace. Tous les dégoûts sont dans la nature.

 

Référence

Melançon, Benoît, Langue de puck. Abécédaire du hockey, Montréal, Del Busso éditeur, 2014, 128 p. Préface de Jean Dion. Illustrations de Julien Del Busso.

Benoît Melançon, Langue de puck. Abécédaire du hockey, 2014, couverture

Le zeugme du dimanche matin et d’André Carpentier

André Carpentier, Journal de mille jours, 1988, couverture

«Je doute si je suis jamais plus près de l’incendie ! Des ouvriers qui creusaient un trou devant la maison avec une excavatrice ont touché des fils de l’Hydro et ont arraché le fil d’alimentation de l’entrée d’électricité dans la salle de lavage. Si cela s’était produit durant mon absence […], j’aurais sans doute retrouvé la maison brûlée; les deux creuseurs ne voyaient, joli zeugma, ni la fumée ni l’utilité d’appeler les pompiers.»

André Carpentier, Journal de mille jours. Carnets 1983-1986, Montréal, XYZ éditeur et Guérin, coll. «Guérin littérature», 1988, 354 p., p. 207.

 

(Une définition du zeugme ? Par .)

Découverte bien tardive

Claude Steben, dans le rôle du Capitaine Cosmos, les Satellipopettes, 1978-1987

L’Oreille tendue savait déjà que l’expression «Deux morceaux de robot», au Québec, récompensait une bonne réponse.

Exemple :

«— Tu veux dire que le projet de troisième lien destiné aux automobiles à Québec n’a jamais eu de sens ?
— Deux morceaux de robot pour toi !»

L’Oreille ne s’était jamais toutefois demandé d’où venait cette expression.

L’exposition De Pépinot à la Pat’ patrouille. Notre enfance télévisuelle du Musée canadien de l’histoire lui a fourni l’explication.

Dans l’émission pour enfant les Satellipopettes (1978-1987, soit bien après l’enfance de l’Oreille), le Capitaine Cosmos, joué par Claude Steben, «est l’animateur d’un populaire jeu de questions et d’adresse opposant des élèves de deux écoles primaires. / Lorsqu’une équipe gagne, elle remporte un ou des morceaux en vue de construire son robot.»

À votre service.