De l’implicite dans la conversation

Tanguy Viel, La fille qu’on appelle, 2021, couverture

«Et si quelqu’un autour d’eux avait suivi leur conversation, à partir de là il l’aurait trouvée bien opaque, incapable de saisir ce qui se disait vraiment sous des mots aussi abstraits que “on” ou “quelque chose”, rompus qu’ils semblaient être, les deux hommes, à cette grammaire des pronoms et des points de suspension, comme deux mafieux qui auraient pour code d’honneur de ne jamais désigner les choses par leur nom. Ce qu’on pouvait comprendre en revanche, c’est qu’ils avaient déjà eu ce genre de conversation, pour ne pas dire la même, sinon comment se seraient-ils compris dans l’usage d’un lexique si réduit, dont les données concrètes semblaient cachées dans les recoins d’une langue qui déployait sous elle l’évidence d’une réalité partagée ?» (p. 47-48)

Tanguy Viel, La fille qu’on appelle. Roman, Paris, Éditions de Minuit, 2021, 173 p.

Actualité cinématographique des Lumières

L’Oreille tendue est dix-huitiémiste de son état. Non seulement elle s’intéresse à la culture du XVIIIe siècle, mais aussi aux traces de cette culture aujourd’hui. En 2020, elle a même publié un livre sur le sujet, Nos Lumières.

Quand, à l’été 2021, les réseaux sociaux se sont mis à jouer avec une photo prise au Festival de Cannes, elle a ajouté son grain de sel, sur Twitter. Qui voit-on sur cette photo ? «Sade, Casanova, le chevalier d’Éon, Voltaire.»

Festival de Cannes, 2021

Prise à la première du film House of Gucci, une autre photo a attiré des dix-huitiémistes.

House of Gucci, 2021

Commentaire de Russell Goulbourne, encore sur Twitter : «Diderotistes, Voltairistes, Rousseauistes.» Réponse de Benjamin Hoffmann : «Sadiens, Casanovistes, Balzaciens.»

Qui a dit que le Siècle des lumières était terminé ?

 

Référence

Melançon, Benoît, Nos Lumières. Les classiques au jour le jour, Montréal, Del Busso éditeur, 2020, 194 p.

Benoît Melançon, Nos Lumières, 2020, couverture

L’oreille tendue de… Marcel Pagnol

Marcel Pagnol, le Temps des amours, éd. 2004, couverture

«Il les écouta tout en marchant, la tête basse, et l’oreille tendue : puis il déclara tout bêtement que “ce n’était pas mal”, puis me fit stupidement remarquer que cette hache devait être bien petite pour n’avoir fourni qu’une plume, et il nous expliqua fort sérieusement qu’une cognée de bûcheron pèse dans les trois kilos, et qu’avec trois kilos d’acier on pouvait faire deux cents boîtes de plumes sergent-major.»

Marcel Pagnol, le Temps des amours, Paris, De Fallois, coll. «Fortunio», 2004, 259 p., p. 97-98. Édition originale : 1977.