Le masque qui révèle

Masque de Carey Price, 2021, par Jordon Bourgeault, détail

Carey Price, le cerbère des Canadiens de Montréal — c’est du hockey —, a un nouveau masque, conçu par Jordon Bourgeault. (Oui, il y a des gens que cela intéresse.) Que représente-t-il ? Entre autres choses, Maurice Richard, et particulièrement son regard, donc ses yeux. L’Oreille tendue ne le lui reprochera pas.

Price décrit son masque ici (à voir sur tablette).

P.-S.—En effet, ce Price-là.

 

[Complément du 21 décembre 2021]

La lecture du beau livre Masques (2011), de Richard Labbé, permet de constater que Price n’est pas le premier gardien à honorer ainsi un joueur du passé. Le Slovaque Jaroslav Halak, du temps où il jouait pour les Blues de Saint-Louis, a fait peindre sur ses masques les visages de deux anciens gardiens de cette équipe, Jacques Plante (p. 18) et Mike Liut (p. 74). Dwayne Roloson, chez les Islanders de New York, avait choisi de rendre hommage à Glenn «Chico» Resch et à Billy Smith (p. 34-35). Alors avec les Penguins de Pittsburgh, Marc-André Fleury fait «un clin d’œil» à Stéphane Fiset (p. 42-43). La tête de tigre du masque de Martin Biron renvoie à celui de Gilles Gratton (p. 81).

Le hockey, cette tradition.

 

Référence

Labbé, Richard, Masques, Montréal, Art global, 2011, 83 p. Ill.

Autopromotion 554

Maurice Richard, dessin de Théo Malo Melançon

Le 2 mars, à 19 h, dans le cadre de la série «Figures marquantes de notre histoire» de la Fondation Lionel-Groulx, l’Oreille tendue s’entretiendra avec Éric Bédard de Maurice Richard — c’est du hockey. Ce sera, pandémie oblige, en webdiffusion. Renseignements ici.

His Bobness à l’aréna

Les deux joueurs de hockey préférés de Bob Dylan selon le magazine Interview, 2012

En 2012, Bob Dylan donne une entrevue au magazine Interview. Dans «New Again : Bob Dylan», on apprend, sous la plume de Scott Cohen, que le chanteur a deux joueurs de hockey préférés : Sammy Williamson et Maurice «The Rocket» Richard.

Pour Richard, l’Oreille tendue voit à peu près de qui il s’agit.

Mais Sammy Williamson ? Il doit s’agir du Sam Williamson qui a joué, en 1951-1952, pour les Flyers de Hibbing, puisque Dylan a grandi dans cette ville du Minnesota. C’est un enfant qui aurait vu jouer Williamson; Dylan avait alors dix ans.

À chacun ses héros.

P.-S.—L’Oreille a appris l’existence de cet entretien grâce à un tweet de Jean-François Proulx. Merci.

La puck ne roulait pas pour Anne Hébert

Anne Hébert, Œuvres complètes. II, 2013, couverture

À peu près au milieu de son roman Kamouraska (1970), Anne Hébert écrit cette phrase : «L’abbé Foucas, exaspéré par l’air arrogant et méprisant du garçon, le bat sauvagement avec un bâton de hockey» (éd. de 2013, p. 292).

S’il est plausible que George Nelson ait été battu par un religieux du Petit séminaire de Québec durant les années 1820-1830, il l’est beaucoup moins qu’un «bâton de hockey» ait été utilisé.

Dans leur histoire des origines du hockey, Carl Gidén, Patrick Houda et Jean-Patrice Martel indiquent que le mot «hockey», durant les deux premières décennies du XIXe siècle, n’avait été écrit au Canada que par une seule personne, l’explorateur britannique John Franklin, en l’occurrence dans deux lettres de 1825 (2014, p. 6-7). L’attestation suivante date de 1839, encore une fois sous la plume d’un Anglais, Richard George Augustus Levinge, à Niagara Falls (2014, p. 20).

Mettons cet anachronisme d’Anne Hébert — l’emploi d’un mot qui ne devait pas avoir cours chez les francophones au moment où elle situe son intrigue — sur le compte de son enthousiasme pour le sport national (d’hiver) du Canada.

Ce n’est pas tout.

Tôt dans le roman, on peut lire, dans un passage consacré à des jeux d’enfants, ceci : «Crosse et toboggan» (éd. de 2013, p. 202). Dans leur édition critique du roman, Anne Ancrenat et Daniel Marcheix commentent ainsi le mot crosse : «Bâton recourbé utilisé dans certains jeux, ici le hockey, pour pousser la rondelle (désignée aussi par les termes “disque” et “palet”)» (éd. de 2013, p. 202, note 16). On peut penser que les petits d’Élisabeth Rolland s’apprêtaient plutôt à pratiquer, non pas le hockey, mais l’autre sport national du Canada, la crosse, sport qui se pratique avec une… crosse.

La puck ne roulait ni pour Anne Hébert ni pour ses éditeurs.

P.-S.—Le sens du titre de ce billet vous échappe ? Voyez ceci.

P.-P.-S.—Oui, l’Oreille tendue a déjà présenté l’ouvrage de Gidén, Houda et Martel. Voyez cela.

 

Références

Gidén, Carl, Patrick Houda et Jean-Patrice Martel, On the Origin of Hockey, Stockholm et Chambly, Hockey Origin Publishing, 2014, xv/269 p. Ill.

Hébert, Anne, Œuvres complètes d’Anne Hébert. II. Romans (1958-1970), Montréal, Presses de l’Université de Montréal, coll. «Bibliothèque du Nouveau Monde», 2013, 488 p. Les Chambres de bois. Édition établie par Luc Bonenfant suivi de Kamouraska. Édition établie par Anne Ancrenat et Daniel Marcheix. Avant-propos de Nathalie Watteyne.