Le Musée des beaux-arts de Montréal présente actuellement une somptueuse exposition, «Riopelle. À la rencontre des territoires nordiques et des cultures autochtones». Elle vaut le détour.
Les salles sont grandes, ce qui est indispensable pour des œuvres souvent de grande dimension. La cohérence thématique est forte : l’Oreille tendue connaissait certaines séries, dont «Icebergs» (1977), mais elle a découvert avec bonheur, entre autres choses, «Jeux de ficelles» (1971-1972). Les explications sont claires — sauf la toute dernière. Comme il se doit, elle porte sur un sujet qui fâche, l’appropriation culturelle.
Pour l’essentiel, les concepteurs de l’exposition avaient réussi jusque-là à éviter le jargon, mais pas ici. Les visiteurs ont droit à un «dialogiques» qui fleure bon son Bakhtine. Le mot «postcoloniales» est mis entre guillemets, sans être défini. On ne s’en étonne pas, vu la confusion sémantique autour du terme, mais on peut néanmoins le déplorer.
Et les «objets» ont une «agentivité». Cela pose deux problèmes. Il n’est pas sûr, d’une part, que tous les visiteurs du MBAM soient familiers des plus récents développements en matière de concepts socioculturels; pourquoi utiliser pareil mot dans le contexte d’une exposition grand public ? D’autre part, si l’agentivité est la «Faculté, pour un agent, d’agir et d’influencer les évènements et les êtres» (Office québécois de la langue française, 2017), il est difficile de voir quel sens pourrait avoir ceci : «les communautés autochtones […] redonnent leur agentivité à ces objets». L’agentivité des «communautés autochtones» ? Oui. L’«agentivité» des «objets» ? Que nenni.
Un peu plus et ces «objets» se voudraient dotés d’«agentivité».