Le zeugme du dimanche matin et de Simon Paré-Poupart

Simon Paré-Poupart, Ordures !, 2024, couverture

«Il y a Jo, qui a été filmé par un citoyen de Boucherville alors qu’il dansait sur des bacs verts, en plein trip de mush; Racette, qui passe sa vie entre les vidanges, la désintox et l’itinérance; le Chat, qui se fait régulièrement embarquer par la police au milieu de sa run; Brodeur, qui lance les bacs à compost dans le recyclage…»

Simon Paré-Poupart, Ordures ! Journal d’un vidangeur, Montréal, Lux, coll. «Lettres libres», 2024. Édition numérique.

 

Merci à Luc Jodoin.

 

(Une définition du zeugme ? Par .)

Chantons la langue avec Chilly Gonzales

Chilly Gonzales, album French Kiss, 2023, pochette

(Il n’y a pas que «La langue de chez nous» dans la vie. Les chansons sur la langue ne manquent pas. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Chilly Gonzales, «French Kiss», album French Kiss, 2023

 

Je vous french kiss
Avec la langue de Molière
Ça vous excite
Quand je vous baise dans l’oreille
Je parle anglais comme Tony Blair
Je parle allemand Adolf Hitler
Mais en français j’prononce les r
Éclair, tonnerre, pomme de terre
Je lis dans mon lit, je suis littéraire
Je lis Carrère, j’écoute Makala
J’mange du camembert
J’fume du cannabis
C’est mon somnifère
Bla bla bla, et cetera, patati patata
J’viens du Canada
J’aime les castors
Mais à la frontière
Je suis franchouillard
Check mon passeport
Chansonnier-parolier
Mais j’suis pas Benjamin Biolay
Je rap en triolet
Votre langue est intimidante, ok ?
C’est en français que Chilly chante, ok ?
Ca m’a pris longtemps
Beaucoup de romans, beaucoup de films d’Yves Montand
Avec mon petit accent si charmant
Je comprends que je manque de maîtrise
Mais heureusement j’assume mes bêtises
Votre passé simple n’est pas si simple
Le mien est compliqué comme un labyrinthe (Yes !)
Beaucoup trop jeune pour Verlaine ou Prévert
Je préfère lire Despentes (Yes !)
Beaucoup trop vieux pour parler en verlan
Je n’ai pas dix-sept ans
Mais je vous french kiss comme un vrai cé-fran
François Mitterrand
Je vous french kiss
Avec ma langue française
Je vous french kiss
En dansant la javanaise
Bien dans mes charentaises
En robe de chambre comme Robespierre
J’suis trop fier
De parler la langue de Voltaire, Flaubert, Baudelaire et Bangalter
Je vous french kiss
Éclair au chocolat
Je vous french kiss
Pomme de terre en robe de chambre
En robe de chambre comme Robespierre
Je vous french kiss
L’Hexagone, l’ex à Gonzales, Chilly Gonz à l’Hexagone

 

Traduction (quasi) simultanée

Tomson Highway, Dry Lips Oughta Move to Kapuskasing, 1989, couverture

Quand elle était petite — ça ne date pas d’hier —, l’Oreille tendue a souvent entendu l’expression «shit la marde». C’était un bel exemple de traduction (quasi) simultanée : le passage de «shit» à «marde» était presque instantané (et inutile, non ?).

Cela lui est revenu à la lecture de Dry Lips Oughta Move to Kapuskasing, une pièce de théâtre, en anglais, en cree et en ojibway, de Tomson Highway (1989). On y trouve en effet «shit la marde» décliné de plusieurs façons : sans point d’exclamation (p. 29), ou avec (p. 81, p. 103), sans «holy» (p. 34), ou avec (p. 29, p. 81, p. 103), parfois ramené à «shit la ma…» (p. 122). On déplorera cependant un «shit la merde» (p. 95) du plus mauvais goût.

Voilà l’Oreille retombée en enfance.

 

Référence

Highway, Tomson, Dry Lips Oughta Move to Kapuskasing, Saskatoon, Fifth House, 1989, 134 p.