Autopromotion 023

Cités, no 23, 2005, «Le Québec, une autre Amérique», couverture

Il y a jadis naguère, l’Oreille tendue a publié, dans la revue Cités. Philosophie. Politique. Histoire, un texte intitulé, médicalement, «La glande grammaticale suivi d’un Petit lexique (surtout) montréalais» (2005).

Pour des raisons mystérieuses, le glossaire était en ligne depuis quelques années déjà (), mais pas le texte principal. C’est maintenant chose faite (ici). Ça fait moins désordre, encore que les deux soient séparés l’un de l’autre.

 

Référence

Melançon, Benoît, «La glande grammaticale suivi d’un Petit lexique (surtout) montréalais», Cités. Philosophie. Politique. Histoire, 23, 2005, p. 233-237 et 238-241. https://doi.org/10.3917/cite.023.0233; <https://doi.org/10.3917/cite.023.0238

Force de caractère entrepreneuriale

Il est beaucoup question ces jours-ci, dans les médias québécois, de résilience. On applique ce terme surtout à Pauline Marois, la chef du Parti québécois et sa nouvelle «dame de béton», qui traverse la tête haute une zone de turbulence causée par divers membres de sa famille politique, dont au moins une belle-mère.

En effet, résilience, mot venu du vocabulaire de la physique, désigne maintenant la «Capacité à vivre, à se développer, en surmontant les chocs traumatiques, l’adversité» (le Petit Robert, édition numérique de 2010). Il relève donc de la psychologie.

Voilà pourquoi on peut s’étonner devant pareille publicité :

«Vers l’entreprise résiliente», publicité, 2012

Mais doit-on s’étonner ? La capacité de récupération de la langue vivante par la publicité est infinie.

Érudition religieuse, ou pas

Nuage de jurons, Francis Desharnais et Pierre Bouchard, Motel Galactic. 2. Le folklore contre-attaque, 2012, case

Dans la Presse du 21 janvier, le chroniqueur sportif François Gagnon consacre un article aux effets des nouvelles technologies sur son métier. Il y fait notamment remarquer que ses lecteurs exigent maintenant d’être informés en temps réel. Sa réaction ? «Simonac ! Il y a cinq ans à peine, ces réponses étaient offertes dans la Presse du lendemain matin» (cahier Sports, p. 2).

Simonac, donc. Il s’agit d’un de ces sacres d’inspiration religieuse dont le Québec est si friand. Pour Léandre Bergeron, en 1981, qui retient la graphie simonaque, ce serait toutefois un juron «inoffensif» (p. 151).

Simonac / simonaque pose un intéressant problème d’exégèse sacrée.

D’une part, il semble témoigner d’une solide érudition ecclésiastique. Selon toute vraisemblance, il viendrait de l’adjectif simoniaque : «Coupable ou entaché de simonie», explique le Petit Robert, la simonie étant la «Volonté réfléchie d’acheter ou de vendre à prix temporel une chose spirituelle (ou assimilable à une chose spirituelle)» (édition numérique de 2010).

D’autre part, on entend parfois saint-simonac, par exemple dans le Matou d’Yves Beauchemin (éd. de 2007, p. 143). Un saint qui pratiquerait la simonie ? Ça ferait désordre, non ?

 

[Complément du 9 janvier 2018]

Comme dans la bande dessinée Motel Galactic, le dessinateur Côté, dans la Presse+ du 7 janvier dernier, propose la graphie simonak. Ça se défend.

 

[Complément du 4 mars 2019]

La romancière Sylvie Drapeau propose une autre graphie : «C’est de l’amour, cimonaque !» (l’Enfer, p. 90)

 

[Complément du 8 août 2019]

En 1976, dans la pièce Un pays dont la devise est je m’oublie, Jean-Claude Germain écrivait «simonacque» (p. 104).

 

Illustration : Francis Desharnais et Pierre Bouchard, Motel Galactic. 2. Le folklore contre-attaque, Montréal, Éditions Pow Pow, 2012, 101 p., p. 86.

 

Références

Beauchemin, Yves, le Matou. Édition définitive, Montréal, Fides, 2007, 669 p. Édition originale : 1981.

Bergeron, Léandre, Dictionnaire de la langue québécoise précédé de la Charte de la langue québécoise. Supplément 1981, Montréal, VLB éditeur, 1981, 168 p.

Drapeau, Sylvie, l’Enfer. Roman, Montréal, Leméac, 2018, 94 p.

Germain, Jean-Claude, Un pays dont la devise est je m’oublie. Théâtre, Montréal, VLB éditeur, 1976, 138 p.

Glissement sémantique

Les fils de l’Oreille tendue pratiquent, l’hiver venu, un sport de glisse. Cela l’oblige à fréquenter plus que d’habitude les autoroutes autour de Montréal.

Généralement, elle n’accorde qu’un coup d’œil distrait aux panneaux publicitaires qui bordent icelles. Cela lui suffit pour se convaincre du bel avenir des spas au Québec.

En revanche, un panneau vient d’apparaître, qui lui a donné un (petit) choc. Les usagers de l’autoroute 15 connaissent la halte routière qui répond au folklorique nom de «La-porte-du-nord» (traits d’union inclus). Comment annonce-t-on aux automobilistes qu’ils s’en approchent et qu’ils pourront s’y sustenter ? D’un mot : «Enfaim !»

Pour paraphraser le journaliste sportif du Devoir : excusez l’Oreille, elle va aller perdre connaissance.

Le plaisir, c’est dans la tête

Loco Locass, «Hymne à Québec», 2010, illustration

Soit, d’abord, les vers suivants, tirés d’une chanson de Loco Locass, «Hymne à Québec» (2010) :

Stadaconé, Kabak, Québec
Fortifiée depuis Frontenac
Assiégée, bombardée, détruite au mortier, mortifiée
Reconstruite, incendiée
Quatre mois par année dans les glaces prise et protégée
Pour l’historien ou le topographe
De pied en cap, Québec est toute sauf plate
Carnaval, festival, fête nationale
Hiver comme été les nuits sont malades mentales !

Soit, ensuite, ce tweet de @NieDesrochers :

Philippe Mollé a préparé de la pintade pour l’équipe. Mental. Je meurs ! #miam

Malade mental, ou simplement mental, donc, dans certains cas, au Québec, peut être un mélioratif. Qu’on se le dise.

P.-S. — Grammaticalement, il s’agit d’un cas compliqué : faut-il accorder malade mental en genre et en nombre, comme l’Oreille l’a fait (les nuits de Québec seraient «malades mentales») ? Ça se discute.