De l’article Bar
De l’article Crossette
De l’article Diaphore
De l’article Mangeux de marde
De l’article Tintin en québécois
De l’article Zola épistolier
« Nous n’avons pas besoin de parler français, nous avons besoin du français pour parler » (André Belleau).
De l’article Bar
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De l’article Mangeux de marde
De l’article Tintin en québécois
De l’article Zola épistolier
(Accouplements : une rubrique où l’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)
Dans la livraison du 22 janvier de ses Notules, rubrique «Éphéméride», Philippe Didion cite une lettre de Flaubert à sa mère du 18 janvier 1851 :
Nous avons fait une tournée de dix jours aux Thermopyles et à Delphes, couchant dans des gîtes affreux et ne mangeant guère que du pain sec, grâce à la canaillerie de notre drogman. Celui-là paye pour les autres. — Je l’ai si bien secoué qu’il a avoué à notre hôte qu’il ne pouvait plus me regarder sans terreur. je crois en effet que je n’ai pas l’air doucereux en de certains moments. Du reste nous avons vu de belles et de magnifiques choses, nous avons engueulé le Parnasse et invoqué Apollon, aux Thermopyles j’ai perdu un éperon et fait débusquer un lièvre de dessous un buisson. J’ai vu l’antre de Trophonius que visita ce brave Apollonius de Thyane. — Nous étions couverts de peaux de bique et comme elles se déchiraient dans la journée, nous les raccommodions nous-mêmes le soir. Je faisais la grisette et Maxime, simulant le tourlourou, me faisait la cour, c’était bien gentil. Il me complimentait sur mes petites menottes et moi je le repoussais en lui disant que je n’aimais pas l’odeur du tabac. Nous devenons tellement bêtes que d’ici à peu nous allons jouer sans doute au gendarme et au voleur.
Les lecteurs de Jean-Marie Chassaignon auront tendu l’oreille vers cet «antre de Trophonius». Comment oublier l’adresse bibliographique de ses Cataractes de l’imagination ?
Cataractes de l’imagination, déluge de la scribomanie, vomissement littéraire, hémorrhagie encyclopédique, monstre des monstres. Par Épiménide l’Inspiré, Dans l’antre de Trophonius, au pays des visions, 1779, 4 vol.
Chassaignon et Flaubert, même combat ?
P.-S.—Les Notules ? Explication ici.
P.-P.-S.—Les Cataractes ? Par là.
P.-P.-P.-S.—Selon l’Encyclopédie de Diderot et D’Alembert (vol. XVI, p. 707), Trophonius était un «oracle fameux dans la Béotie». Il fallait «descendre» dans son «antre» pour recevoir sa «réponse».
Depuis la nuit des temps, l’Oreille tendue collabore à Épistolaire, la revue de l’Association interdisciplinaire de recherches sur l’épistolaire. De sa chronique, «Le cabinet des curiosités épistolaires», elle a tiré un recueil en 2011, Écrire au pape et au Père Noël.
La 42e livraison d’Épistolaire vient de paraître. L’Oreille y parle d’enveloppes, notamment chez Simenon, chez Echenoz et chez Diderot.
Table des matières
Haroche Bouzinac, Geneviève, «Avant-propos», p. 5.
«Zola épistolier»
Pagès, Alain, «Présentation du dossier», p. 9-10.
Mitterand, Henri, «Éditer des correspondances : le cas d’Émile Zola», p. 11-17.
Becker, Colette, «Lettres et théorie. L’exemple d’Émile Zola», p. 19-29.
Lumbroso, Olivier, «Aux sources de l’imaginaire cyclique chez Zola : les “lettres de jeunesse” et la Confession de Claude», p. 31-41.
Guermès, Sophie, «“Respirer un air plus pur” : les vertus curatives de l’Italie dans les Lettres à Alexandrine», p. 43-53.
Grenaud-Tostain, Céline, «Travelling sur “les hommes de bonne volonté” dans les lettres à Alexandrine», p. 55-66.
Kohnen, Myriam, «Les Lettres à Alexandrine : entretiens sur l’exil (1898-1899)», p. 67-78.
Oulié, Renaud, «La correspondance entre Léon Hennique et Émile Zola : une relation aux sources du mouvement naturaliste», p. 79-91.
Giraud, Frédérique, «Dénombrer et caractériser : les relations épistolaires d’Émile Zola», p. 93-109.
Macke, Jean-Sébastien, «Pour une édition électronique de la correspondance d’Émile Zola», p. 111-116.
«Perpectives»
Allorant, Pierre, «La correspondance et ses secrets. Une approche juridique», p. 119-121.
Anton, Sonia, «Les lettres du “poilu” Louis Destouches», p. 123-129.
«Chroniques»
Pagès, Alain, «La correspondance d’Émile Zola : histoire d’une édition (1907-2014)», p. 133-142.
Pagès, Alain, «La correspondance d’Émile Zola. Bibliographie générale», p. 143-150.
Melançon, Benoît, «Le cabinet des curiosités épistolaires», p. 151-153. Histoires d’enveloppes. [HTML] [PDF]
Charrier-Vozel, Marianne, «Vie de l’épistolaire», p. 155-159.
Cousson, Agnès (édit.), «Bibliographie», p. 161-196. Contributions de Luciana Furbetta, Benoît Grévin, Clémence Revest, Andrzej Rabsztyn, Sonia Anton et Benoît Melançon.
«Recherche»
«Comptes rendus», p. 197-219.
[Complément du 19 janvier 2017]
La revue Épistolaire a sa chaîne sur YouTube. On peut notamment y voir un entretien sur la correspondance de Zola entre Geneviève Haroche Bouzinac et Alain Pagès.
La première partie du périple de l’Oreille tendue a été parisienne et normande. La seconde — pas la deuxième, malheureusement — sera strictement parisienne.
19 novembre 2016
Place Saint-Sulpice
Neige sur la Lutèce d’antan.
Quais de la Seine, rive gauche
Notre-Dame est un des monuments de l’architecture religieuse française.
Quais de la Seine, rive gauche
Premier article d’une liste de vœux pour Paris. Faire disparaître la tour Montparnasse, pas la gare. (L’Oreille tendue sait qu’elle se répète.)
Quais de Seine, rive droite
C’est aussi cela la mondialisation.
Quais de Seine, rive droite
Voir passer un bus qui vous emmène gratuitement de Paris chez Ikea. Avoir une pensée pour Nicolas Dickner.
Rue Jacques-Cœur
Si l’Oreille tendue comprend bien, on fabrique des grilled cheese à Paris. Est-ce à dire qu’ils sont urbains ?
Rue Castex
Un demi-Castex-et-Surer.
Devant le Bazar de l’hôtel de ville
Un mendiant sollicite les passants à distance : sa sébile cartonnée est accrochée au bout d’une canne à pêche. Pour le dire en bourdieusien : voilà quelqu’un qui a parfaitement assimilé la logique de la distinction. Il mendie, mais pas comme tout le monde. On peut imaginer qu’il espère sortir du lot et tirer une plus-value de sa singularité. Cela reste à démontrer. (L’Oreille a le vague sentiment que ce mendiant est là depuis quelques années. La mémoire n’est plus ce qu’elle était.)
À l’hôtel
Lisant à distance un journal montréalais, l’Oreille tendue, qui a consacré une partie de sa thèse de doctorat aux lettres de Diderot à Sophie Volland, découvre qu’Alexandre Jardin recommande la lecture de ces lettres. Que doit-elle désormais penser d’elle-même ?
20 novembre 2016
Tour Eiffel
L’art de l’égoportrait.
Musée du Quai de Branly-Jacques Chirac
Un peu par hasard, l’Oreille visite l’exposition The Color Line. Les artistes africains-américains et la ségrégation. Objectif de l’entreprise ?
Quel rôle a joué l’art dans la quête d’égalité et d’affirmation de l’identité noire dans l’Amérique de la Ségrégation ? L’exposition rend hommage aux artistes et penseurs africains-américains qui ont contribué, durant près d’un siècle et demi de luttes, à estomper cette «ligne de couleur» discriminatoire.
L’Oreille, qui s’attendait à y trouver ses amis Jackie Robinson — c’est du baseball — et Ella Fitzgerald — c’est du jazz —, n’a pas été déçue. Le premier est photographié en compagnie de Branch Rickey. De la seconde, on peut voir un portrait, par Beauford Delaney (1968), que l’Oreille ne connaissait pas.
Il y avait bien plus important et bouleversant, notamment des images de lynchage.
Puis, juste avant de sortir, un exemplaire de la traduction française de Between the World and Me (2015) de Ta-Nehisi Coates, livre qu’admire l’Oreille tendue.
Rue de la Gaieté
Donner quelques pièces à la famille de quatre personnes qui dort sur le trottoir et mesurer l’inanité de ce geste.
21 novembre 2016
Avenue du Maine
L’Oreille aurait attendu un bar à cigares.
Grand Palais
Vue tout à l’heure la riche exposition Hergé. Il y a le bédéiste, évidemment, mais aussi l’amateur d’art contemporain et, surtout — découverte pour l’Oreille —, l’illustrateur publicitaire. En plus, le père de Tintin aimait Ella Fitzgerald.
P.-S. — Un mur est fait des éditions de Tintin dans d’autres langues que le français. Heureusement, l’album «en québécois» ne paraît y être. Heureusement.
Rue du Vieux-Colombier
L’Oreille découvre l’expression à l’ouest : «Être à l’ouest, déphasé, complètement désorienté, déboussolé», dit le Petit Robert (édition numérique de 2014). En son premier sens («déphasé»), elle pourrait évoquer le champ gauche prisé au Québec.
22 novembre 2016
L’Oreille ne croit pas en l’idée d’une subversion en art. Encore moins quand la subversion est publicisée par la Monnaie de Paris.
Références
Coates, Ta-Nehisi, Between the World and Me, New York, Spiegel & Grau, 2015, 152 p. Ill.
Melançon, Benoît, Diderot épistolier. Contribution à une poétique de la lettre familière au XVIIIe siècle, Montréal, Fides, 1996, viii/501 p. Préface de Roland Mortier. https://doi.org/1866/11382
Profitant de la parution des lettres de François Mitterrand à Anne Pingeot, Fabien Deglise, dans le Devoir du jour, publie un texte sur la lettre d’amour (p. F1-F2). Il a interrogé l’Oreille tendue, parmi d’autres, sur l’avenir (ou son absence) de cette forme.
S’agissant toujours d’épistolaire, @PhDidi1713 transmet cette citation de Marisha Pessl à l’Oreille (merci).
Ces lettres auraient charmé toute nouvelle élève ordinaire. Au bout d’un ou deux jours de résistance verbeuse, telle une vierge naïve du dix-huitième siècle, la fille se serait glissée sur la pointe des pieds dans le sombre Scratch en mordant d’excitation sa lèvre inférieure cerise pour y attendre Charles, l’aristocrate en perruque qui l’aurait conduite (jupe-culotte retroussée) à sa perte.
[…]
Papa avait un jour dit que les lettres manuscrites (désormais assimilables au triton crêté sur la liste des espèces menacées) étaient l’un des rares objets qui recèlent de la magie en ce monde : «Même l’idiot ou le faible, ceux dont on ne supporte à peine la présence, sont tolérables dans une lettre, et peuvent même y devenir modérément amusants.»
Pourtant, ces lettres me semblaient étranges et peu sincères, trop «Madame de Merteuil au vicomte de Valmont, Château de…», exagérément «Paris, 4 août 17…» (p. 123-124)
Alors, «espèce menacée» ou pas ?
Références
Mitterrand, François, Lettres à Anne. 1962-1995, Paris, Gallimard, coll. «Blanche», 2016, 1280 p.
Pessl, Marisha, la Physique des catastrophes, Paris, Gallimard, coll. «Folio», 4835, 2009, 832 p. Traduction de Laetitia Devaux.