Dans la Ligue nationale de hockey, il fut un temps où les séries éliminatoires — le détail, disent certains — ne se rendaient pas jusqu’au mois de juin. C’était le bon vieux temps.
En 1979, on l’a vu, Dominique Michel déplorait leur longueur indue : «Chez nous l’hiver c’comme le hockey / Y a des finales jusqu’au mois d’mai.»
Chez Renald Bérubé (les Caprices du sport, 2010), une autre chronologie se donne à lire :
Le but de Leswick en prolongation en 1954 : il l’avait braillé sans retenue aucune, il avait le rouge de la peine au front en se rendant ce printemps-là, servant de messe, aux cérémonies de la semaine sainte — car les éliminatoires de la coupe Stanley et ladite semaine advenaient alors au même moment, à peu près toujours, à son grand dam. Fallait participer aux cérémonies, il ratait donc les matches diffusés à la radio. Entre le cierge pascal et le hockey, ses croyances n’hésitaient même pas, sinon pour les apparences nécessaires du qu’en-dira-t’on de la rectitude religieuse d’alors (p. 68).
Hockey et semaine sainte (mars-avril) : il est vrai qu’au Québec hockey et religion ont souvent partie liée.
(Le hockey est partout dans la culture québécoise et canadienne. Les chansons sur ce sport ne manquent pas, plusieurs faisant usage de la langue de puck. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)
Quand sur une passe de Butch Bouchard y prenait le puck derrière ses goals
On aurait dit qu’y portait le sort de tout l’Québec sur ses épaules
Pardonnez-moi si aujourd’hui j’vous en parle comme si y était mort
C’est qu’il était toute ma vie sous son chandail tricolore
C’est qu’il était toute ma vie sous son chandail tricolore
Mau-rice Rich-ard-ard-ard c’est pour toi que je chante
Mau-rice Rich-ard-ard-ard c’est pour toi que je chante
S’il voulait vaincre tous les records de ce fameux grand Canadien
Je vous assure que Bobby Orr f’rait mieux d’aiguiser ses patins
Ô mon Maurice ô mon idole ô mon numéro neuf en or
Sans toi mes samedis sont si dull que j’m’ennuie, je m’couche pis j’m’endors
Sans toi mes samedis sont si dull que j’m’ennuie, j’m’couche pis j’m’endors
Mau-rice Rich-ard-ard-ard c’est pour toi que je chante
Mau-rice Rich-ard-ard-ard c’est pour toi que je chante
Aujourd’hui derrière ton cigare perdu dans tes pantoufles de laine
Tu fais semblant d’vivre à l’écart de cette gloire qui fut la tienne
Mais je sais que sans aucun doute tu t’ennuies de plus en plus fort
Des quinze mille spectateurs deboutte au moind’body check de ta part
Des quinze mille spectateurs deboutte au moind’body check de ta part
Mau-rice Rich-ard-ard-ard c’est pour toi que je chante
Mau-rice Rich-ard-ard-ard c’est pour toi que je chante
Mau-rice Ri-chard
Mau-rice Ri-chard
P.-S.—Paroles traduites dans I. Sheldon Posen, «Sung Hero : Maurice “The Rocket” Richard in Song», dans Martin Lovelace, Peter Narváez et Diane Tye (édit.), Bean Blossom to Bannerman, Odyssey of a Folklorist : A Festschrift for Neil V. Rosenberg, St. John’s, Memorial University of Newfoundland, coll. «Folklore and Language Publications», 2005, p. 377-404.
[Complément du 12 mai 2025]
Nombre de créateurs se souviennent de cette chanson : Bernard Pozier (1991, p. 79), Claude Dionne (2012, p. 234, p. 241), Francis Desharnais et Pierre Bouchard (2013, p. 98), par exemple.
Pozier, Bernard, Les poètes chanteront ce but, Trois-Rivières, Écrits des Forges, coll. «Radar», 60, 1991. 84 p. Ill. Réédition : Trois-Rivières, Écrits des Forges, 2004, 102 p.
«Jacques Godbout était dans la salle et l’apercevant, je lui ai trouvé le profil de Voltaire, le regard métallique, les lèvres pincées, l’applaudissement prudent. Je ne sais pas si c’est empiéter sur sa vie privée que de décrire ici sa silhouette entrevue dans un lieu public. On ne sait plus sur quel pied danser dans nos droits et libertés, qui sont en train de devenir des corsets. Je me demande à quelle espèce marine, fluviale ou lacustre, appartient l’auteur de L’Aquarium et de L’Isle Verte.
[…]
Tout récemment, la statue de Voltaire, à Paris, a eu le nez fracassé».
François Hébert, Pour orienter les flèches. Notes sur la guerre, la langue et la forêt, Montréal, Trait d’union, coll. «Échappées», 2002, 221 p., p. 32.
En 1976, dans sa pièce Un pays dont la devise est je m’oublie, Jean-Claude Germain imagine le dialogue entre un homme fort, Louis Cyr (mort en 1912), et un hockeyeur, Maurice Richard (né en 1921). Cyr a parfaitement compris ce que Richard va représenter : «T’es Mau-ri-ce Ri-chard !… Ç’avait jamais été… pis ça sra jamais !… Çé !… Pis çé là astheure pour tout ltemps !» Cyr, c’est de l’historique; Richard, c’est du mythique.
Jean-Claude Germain est mort le 24 avril.
Référence
Germain, Jean-Claude, Un pays dont la devise est je m’oublie. Théâtre, Montréal, VLB éditeur, 1976, 138 p.
«une histoire contée dans un langage plus vrai que tous les autres, faite d’impressions vite évanouies et parlant d’une voix douce, ne demandant qu’à ce qu’on tende l’oreille, et qu’on la saisisse»