Divergences transatlantiques 040

Éric Dupont, la Fiancée américaine, 2015, couverture

Soit le verbe restituer.

Le Petit Robert (édition numérique de 2014) lui connaît trois sens : «Rendre à qqn (ce qu’on lui a pris, confisqué, volé)»; «Reconstituer à l’aide de fragments subsistants, de déductions, de documents»; «Libérer, dégager (ce qui a été absorbé, accumulé).» Antonyme : «Garder.»

Outre ses sens, il en est un autre au Québec. Exemple, tiré de la Fiancée américaine (2012) d’Éric Dupont :

Mais c’était chose commune pour les petites filles de Rivière-du-Loup de vomir ou de s’évanouir à la vue de sœur Marie-de-l’Eucharistie. Celle-ci fut d’ailleurs étonnée qu’on lui amène à l’infirmerie une petite qui avait déjà vomi.

Quelques heures à peine après avoir restitué son déjeuner […] (éd. de 2015, p. 157).

Oui : vomir.

 

Référence

Dupont, Éric, la Fiancée américaine. Roman, Montréal, Marchand de feuilles, 2015, 877 p. Édition originale : 2012.

Écho du jour

Éric Dupont, la Fiancée américaine, 2015, couverture

L’Oreille tendue lit ces jours-ci la Fiancée américaine (2012), un des romans d’Éric Dupont.

Elle y trouve la phrase suivante : «Le dimanche au matin, [les Lamontagne] occupaient le banc numéro quatre de l’église Saint-François Xavier, à une dizaine de mètres du lieu où l’Américaine avait donné naissance à Louis en mourant» (p. 147).

Ce «Le dimanche au matin» — pas «Le dimanche matin» — évoque pour l’Oreille ses parents et grands-parents, qui marqu(ai)ent par là, comme le fait Dupont, une double récurrence — du jour et du moment de la journée.

S’agit-il d’un usage québécois ? L’Oreille ne saurait l’affirmer, même si elle en a l’impression.

 

Référence

Dupont, Éric, la Fiancée américaine. Roman, Montréal, Marchand de feuilles, 2015, 877 p. Édition originale : 2012.

Description peu flatteuse du jour

Éric Dupont, la Fiancée américaine, 2015, couverture

«Pas assez fous pour mettre le feu, mais pas assez fins pour l’éteindre !»

Éric Dupont, la Fiancée américaine. Roman , Montréal, Marchand de feuilles, 2015, 877 p., p. 146. Édition originale : 2012.

P.-S. — S’agissant du sens du mot innocent au Québec, l’Oreille tendue avait évoqué la prédilection de sa mère pour cette phrase.

 

[Complément du 27 mai 2016]

Autre occurrence, avec précision géographique et évaluation linguistique, chez le même auteur : «Pas assez fous pour mettre le feu, mais pas assez fins pour l’éteindre, c’est ce qu’ils disaient de ses oncles à Rivière-du-Loup. Avouez que c’est coloré comme langage» (p. 846).

 

[Complément du 11 décembre 2018]

Troisième occurrence, montréalaise celle-là, dans la pièce Nos ghettos (2018) :

Ici, on ne va pas casser une vitrine
sous prétexte qu’on embourgeoise le quartier
Personne n’est assez fou pour mettre le feu
ni assez fin pour l’éteindre (p. 47)

J-F Nadeau, Nos ghettos. Avec des chansons de Stéfan Boucher, Montréal, Atelier 10, coll. «Pièces», 17, 2018, 107 p. Ill. Suivi de «Contrepoint. De l’écume et des commerces ethniques» par Marie-Sophie Banville.

 

[Complément du 26 septembre 2021]

Variation simenonienne : «Écoutez, monsieur le commissaire, je ne suis pas très intelligente, mais je ne suis pas tellement bête.»

Simenon, Georges, l’Amie de madame Maigret, Paris, Presses Pocket, coll. «Presses Pocket», 1066, 1974, 187 p., p. 116. Édition originale : 1952.

Le niveau baisse ! (1946)

(«Le niveau baisse !» est une rubrique dans laquelle l’Oreille tendue collectionne les citations sur le déclin [supposé] de la langue. Les suggestions sont bienvenues.)

 

«En des âges plus calmes, [Étienne Parent] eût été un excellent écrivain académique au surplus : par malheur, la langue du temps [XIXe siècle], je veux dire la langue du Canada français, faute de contact intime avec les véritables écrivains contemporains, s’appauvrissait de plus en plus […].»

Source : Berthelot Brunet, Histoire de la littérature canadienne-française, Montréal, L’Arbre, 1946, 186 p., p. 22.

 

Pour en savoir plus sur cette question :

Melançon, Benoît, Le niveau baisse ! (et autres idées reçues sur la langue), Montréal, Del Busso éditeur, 2015, 118 p. Ill.

Benoît Melançon, Le niveau baisse !, 2015, couverture