Ceci n’est pas une poupée

Marie-Hélène Voyer, Mouron des champs, 2022, couverture

À catin, dans le Petit Robert (édition numérique de 2018), on lit ceci : «(1732) RÉGION. (Normandie, Centre; Canada [critiqué]) Poupée. “leurs catins de cire avec de belles robes de bal sur le dos” (G. Roy).»

Il a beau être «critiqué», le mot se trouve donc chez Gabrielle Roy,  mais aussi chez Michael Delisle (Dée, p. 19), Samuel Archibald (Arvida, p. 77) et Maxime Raymond Bock (Morel, p. 70), pour ne prendre que ces exemples.

Dans Mouron des champs (2022), le magnifique et dur recueil de poésie que vient de faire paraître Marie-Hélène Voyer, catin apparaît trois fois (p. 68, p. 93, p. 109).

La grand-mère paternelle de l’Oreille tendue n’employait que ce mot.

P.-S.—Le mot désigne aussi, note le dictionnaire numérique Usito, un «Pansement entourant un doigt malade».

 

Références

Archibald, Samuel, Arvida. Histoires, Montréal, Le Quartanier, coll. «Polygraphe», 04, 2011, 314 p. Ill.

Delisle, Michael, Dée, Montréal, BQ, 2007, 128 p. Édition originale : 2002.

Raymond Bock, Maxime, Morel. Roman, Montréal, Le Cheval d’août, 2021, 325 p.

Voyer, Marie-Hélène, Mouron des champs suivi de Ce peu qui nous fonde, Saguenay, La Peuplade, coll. «Poésie», 2022, 196 p.

Accouplements 185

Catherine Voyer-Léger et Marie-Hélène Voyer, couvertures, 2022, collage

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Voyer-Léger, Catherine, Nouées, Montréal, Québec Amérique, coll. «III», 2022, 157 p.

«Nouées de mère en fille. Inextricables, tissées serrées, jusqu’à nous étouffer. De mère en fille. Nouées dans une caresse suffocante quand de petites mains de quatre ans nous pressent la gorge parce qu’elles comprennent mal les limites entre le doux et la douleur. De mère en fille, nos angoisses tressées ensemble pour le meilleur et pour le pire. Indispensables l’une à l’autre et toujours un peu de trop en même temps» (p. 148-149).

Voyer, Marie-Hélène, Mouron des champs suivi de Ce peu qui nous fonde, Saguenay, La Peuplade, coll. «Poésie», 2022, 196 p.

«combien de temps encore ma voix pesante
nouée de vous ?» (p. 49)

 

[Complément du jour]

Ceci encore, toujours chez Marie-Hélène Voyer :

«je nage dans des eaux inédites
nouée et dénouée de vous» (p. 158)

Du bazou

Maxime Raymond Bock, Morel, 2021, couverture

En août 1938, le poète québécois De Saint-Denys Garneau écrit à son ami Jean Le Moyne qu’il dispose dorénavant d’un «vieux bazou» (De Saint-Denys Garneau, p. 375).

Dans le roman Morel (2021), de Maxime Raymond Bock, on lit ceci : «Un voisin s’est parqué en sens inverse, à moitié monté sur le trottoir, pour câbler un bazou qui a rendu l’âme» (p. 22).

Bazou, donc : «Automobile démodée ou en mauvais état», selon Usito.

Si l’on en croit Sylvain Hotte, une motoneige peut aussi être un bazou (Attaquant de puissance, p. 64).

À votre service (mécanique).

P.-S.—«Câbler un bazou» ? Faire démarrer un tacot par survoltage.

 

[Complément du 2 janvier 2022]

Le bazou est, évidemment, une minoune. Exemple : «Québec s’en prend aux “minounes”» (la Presse, 8 décembre 2011, p. A18).

 

[Complément du 23 janvier 2022]

En français de référence : un tacot.

 

[Complément du 2 avril 2023]

Vue aujourd’hui, dans le cadre de l’excellente exposition «Hochelaga. Montréal en mutation», de Joannie Lafrenière, au Musée McCord Steward, cette photo.

«Achetons vieux bazous», photographie de Joannie Lafrenière, Musée McCord Steward, Montréal, 2 avril 2023

 

[Complément du 26 mai 2023]

Patrice Desbiens publiait récemment le recueil Fa que. En épigraphe, on trouve une citation de De Saint-Denys Garneau. Page 14, on lit le poème «Les vieux bazous». Tout est dans tout, et réciproquement.

En couverture ? Un bazou.

Patrice Desbiens, Fa que, 2023, couverture

 

Références

Biron, Michel, De Saint-Denys Garneau. Biographie, Montréal, Boréal, 2015, 450 p. Ill.

Desbiens, Patrice, Fa que, Montréal, Mains libres, 2023, 69 p. Ill.

Hotte, Sylvain, Attaquant de puissance, Montréal, Les Intouchables, coll. «Aréna», 2, 2010, 219 p.

Raymond Bock, Maxime, Morel. Roman, Montréal, Le Cheval d’août, 2021, 325 p.

L’oreille tendue de… Antoine Boisclair

Antoine Boisclair, Un poème au milieu du bruit, 2021, couverture

«Nous lisons un poème en silence, à l’écart de l’agitation quotidienne et du bruit, nous tendons l’oreille à la voix qui se tait au fond des mots. Dans Un poème au milieu du bruit, nous renouons avec cette langue où “les choses muettes nous parlent”, comme l’écrivait Hofmannsthal, de manière à mieux mesurer leur profondeur ou leur part d’ombre.»

Antoine Boisclair, Un poème au milieu du bruit. Lectures silencieuses, Montréal, Éditions du Noroît, 2021, quatrième de couverture.