Autopromotion 338

Cahiers Voltaire, 16, 2017, couverture

Depuis plusieurs années, l’Oreille tendue collabore aux Cahiers Voltaire, la revue annuelle de la Société Voltaire. Le numéro 16 a paru à l’automne 2017 (ISSN : 1637-4096; ISBN : 978-2-84559-127-1). Ci-dessous, sa table des matières.

L’Oreille y parle cette fois-ci d’une série de quatre romans du Québécois Patrick Senécal, Malphas (p. 189-192), et de deux films, l’un documentaire, Pour quelques arpents de neige… (1962), de Georges Dufaux et Jacques Godbout, l’autre de fiction, Quelques arpents de neige (1972), de Denis Héroux (p. 174-175). Elle y rend aussi compte de l’ouvrage Voltaire’s Revolution. Writings from his Campaigns to Free Laws from Religion de G.K. Noyer (p. 227-228).

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Habib, Claude, Marc Hersant et Myrtille Mericam-Bourdet, «Table ronde au Panthéon sur l’affaire La Barre, 16 novembre 2016», p. 7-28.

Noyer, G.K., «La campagne “Écrasez l’infâme” a-t-elle influencé l’Amérique ?», p. 29-69.

Cussac, Hélène, «Topoï sur le coryphée de la secte dans quelques histoires littéraires de la Troisième République», p. 71-84.

Adams, David, «Une appréciation inédite de Voltaire ?», p. 85-91.

Loty, Laurent, «Les Mémoires de Candide de Delisle de Sales, sur la Nation et la Confédération européenne en 1802», p. 93-104.

Chardonnet-Darmaillacq, Damien, «Voltaire Pygmalion ! La promotion intéressée du comédien LeKain», p. 105-114.

Plante, Gilles, «Le Paysan parvenu de Marivaux, ou l’art consommé de persifler Voltaire», p. 115-136.

«Débat. Voltaire face à sa propre mort (IV). Coordonné par Marc Hersant», p. 139-153 : Sylvain Menant, «Le poète et sa mort : quelques esquisses voltairiennes»; Jan Herman, «Anecdote sur la sépulture de monsieur de Voltaire à l’abbaye de Sellières».

«Enquête sur la réception de Candide (XV). Coordonnée par Stéphanie Géhanne Gavoty», p. 157-175. Contributions de Stéphanie Géhanne Gavoty, Édouard Langille, Benoît Melançon, Abderhaman Messaoudi.

Pascal, Jean-Noël, «Relectures. Quand un professeur de gymnastique espagnol mettait La Henriade en cantique…», p. 179-188.

Melançon, Benoît, «Le projet Voltaire», p. 189-192.

Brown, Andrew, Flávio Borda d’Água et Ulla Kölving, «Manuscrits en vente en 2016», p. 193-208.

Kölving, Ulla, «Bibliographie voltairienne 2016», p. 209-220.

«Thèses», p. 221-226. Rubrique coordonnée par Nicolas Morel. Contributions de Thibaut Julian, Helder Mendes Baiao, Jean Rime, Laetitia Saintes.

«Comptes rendus», p. 227-244. Rubrique coordonnée par Alain Sandrier. Contributions de Benoît Melançon, Audrey Faulot, Caroline Boindin, Nicolas Brucker, Laurence Vanoflen, Alain Sandrier, Stéphane Pujol.

 

[Complément du 30 décembre 2022]

L’Oreille a repris «Le projet Voltaire», sous le titre «Drame sadovoltairien chez Patrick Senécal», dans le livre qu’elle a fait paraître au début de 2020, Nos Lumières.

 

[Complément du 25 janvier 2023]

Les trois textes de l’Oreille sont maintenant disponibles en ligne.

Contribution au dossier «Enquête sur la réception de Candide (XV). Coordonnée par Stéphanie Géhanne Gavoty», Cahiers Voltaire, 16, 2017, p. 174-175.

Sur les films Pour quelques arpents de neige… (documentaire, Georges Dufaux et Jacques Godbout, 1962) et Quelques arpents de neige (fiction, Denis Héroux, 1972).

«Pot-pourri. Le projet Voltaire», Cahiers Voltaire, 16, 2017, p. 189-192; repris, sous le titre «Drame sadovoltairien chez Patrick Senécal», dans Nos Lumières. Les classiques au jour le jour, Montréal, Del Busso éditeur, 2020, p. 82-88.

Sur la série Malphas, de Patrick Senécal, quatre romans, 2011-2014.

Compte rendu de Voltaire’s Revolution, Cahiers Voltaire, 16, 2017, p. 227-228.

Sur Voltaire’s Revolution. Writings from his Campaigns to Free Laws from Religion, Amherst (New York), Prometheus Books, 2015, 397 p. Edited, Translated, and with an Introduction by G.K. Noyer.

 

Référence

Melançon, Benoît, Nos Lumières. Les classiques au jour le jour, Montréal, Del Busso éditeur, 2020, 194 p.

À tout hasard

Vous êtes universitaire. Un de vos proches prend sa retraite, peut-être votre directeur de thèse. Vous décidez de lui offrir un volume d’hommages. On vous demande de rédiger la préface.

Voici ce qu’il vous faut pour conclure.

C’est surtout l’homme, le chercheur, le professeur, le pédagogue et l’ami que nous voudrions évoquer pour finir. XXXX XXXX a profondément marqué ses étudiants et nous sommes honorés d’avoir figuré parmi eux. Il possède le don assez rare d’être un éveilleur d’idées, celui de faire germer chez l’interlocuteur le désir de renouveler une question, de modifier un éclairage. Sans jamais imposer un point de vue dogmatique, XXXXX XXXXX ouvre des pistes et relie des points de vue qu’on pouvait croire sans liens entre eux. Sans jamais représenter une fin en soi, l’érudition est toujours, chez lui, au service d’un problème intellectuel et culturel d’envergure. Par ailleurs très attentif à l’autre, le directeur de thèse ne manque jamais d’annoter avec le plus grand soin les travaux qu’on lui soumet. Ses remarques constituent un tremplin pour la pensée qui prend, ensuite, un nouvel envol. [Insérez une phrase de votre cru, voire une anecdote plaisante.] Terminons en saluant son humour : XXXXX XXXXX a toujours fui l’esprit de sérieux, qui accompagne souvent une pensée conformiste et annihile l’imaginaire, si nécessaire à l’invention de nouvelles méthodes critiques.

Non, l’Oreille tendue n’a pas inventé ce texte.

À votre service.

P.-S.—Ce qui précède évoquera peut-être un souvenir chez les lecteurs de ce blogue.

La clinique des phrases (k)

La clinique des phrases, logo, 2020, Charles Malo Melançon

(À l’occasion, tout à fait bénévolement, l’Oreille tendue essaie de soigner des phrases malades. C’est cela, la «Clinique des phrases».)

Soit le passage suivant d’une étude universitaire récente :

Étant donnée la proximité avec la frontière canadienne, comme on a pu le voir dans certains exemples cités plus haut, la rumeur a rapidement couru que l’enfant pourrait avoir été emmené au Canada.

Pourquoi écrire «certains exemples» ? (Règle générale, dans l’écriture universitaire, prudence oblige, on abuse de certain.) Il y a des exemples qui démontrent ce que l’on avance, et d’autres, pas. Donc :

Étant donnée la proximité avec la frontière canadienne, comme on a pu le voir dans les exemples cités plus haut, la rumeur a rapidement couru que l’enfant pourrait avoir été emmené au Canada.

Les «exemples» évoqués l’ont nécessairement été «plus haut» : «plus bas» n’aurait aucun sens. Corrigeons ce premier pléonasme :

Étant donnée la proximité avec la frontière canadienne, comme on a pu le voir dans les exemples cités, la rumeur a rapidement couru que l’enfant pourrait avoir été emmené au Canada.

Si «on a pu le voir», c’est précisément parce qu’on a cité des «exemples», ci-devant «plus haut». Enlevons un second pléonasme :

Étant donnée la proximité avec la frontière canadienne, comme on a pu le voir, la rumeur a rapidement couru que l’enfant pourrait avoir été emmené au Canada.

Si «on a pu le voir», c’est qu’«on l’a vu», non ? En outre, pourquoi «pouvoir» deux fois dans la même phrase («a pu le voir», «pourrait») ? Économisons :

Étant donnée la proximité avec la frontière canadienne, comme on l’a vu, la rumeur a rapidement couru que l’enfant pourrait avoir été emmené au Canada.

N’y a-t-il pas moyen d’alléger la fin de la phrase ?

Étant donnée la proximité avec la frontière canadienne, comme on l’a vu, la rumeur a rapidement couru que l’enfant aurait été emmené au Canada.

Pour un brin plus de clarté, déplaçons un morceau de la phrase :

Étant donnée la proximité avec la frontière canadienne, la rumeur, comme on l’a vu, a rapidement couru que l’enfant aurait été emmené au Canada.

Le «comme» est-il indispensable ? Cela se discute.

Étant donnée la proximité avec la frontière canadienne, la rumeur, on l’a vu, a rapidement couru que l’enfant aurait été emmené au Canada.

L’accord, au féminin, de «donnée» ? Il paraît ne pas correspondre à l’usage actuel, sans pour autant que l’on puisse le dire fautif. Pour Marie-Éva de Villers (Multidictionnaire de la langue française, cinquième édition, édition numérique) et pour Jean Girodet, il faudrait en effet préférer l’invariabilité. Citons le second : «Pour l’expression étant donné, la règle d’accord a été longtemps incertaine. De nos jours, l’usage le plus fréquent est le suivant : 1 Placé devant le nom. Étant donné reste invariable […]. 2 Placé derrière le nom. Étant donné s’accorde en genre et en nombre […]» (Dictionnaire Bordas. Pièges et difficultés de la langue française, Paris, Bordas, coll. «Les référents», 1988 [troisième édition], 896 p., p. 250). Modernisons :

Étant donné la proximité avec la frontière canadienne, la rumeur, on l’a vu, a rapidement couru que l’enfant aurait été emmené au Canada.

À votre service.

Autopromotion 296

Dossier «André Belleau II : le texte multiple», 2017, couvertureEn septembre 2015, l’Université du Québec à Montréal accueillait le colloque «André Belleau et le multiple». Ses Actes ont été rassemblés dans deux livraisons de la revue Voix et images. La première a paru à l’automne 2016 : «André Belleau I : relire l’essayiste» (Voix et images, numéro 124, automne 2016, p. 9-93; ISBN : 0318-9201). La seconde vient de sortir des presses : «André Belleau II : le texte multiple» (Voix et images, numéro 125, hiver 2017, p. 9-134; ISBN : 0318-9201). L’Oreille tendue, qui est une fan, y reprend sa «Bibliographie d’André Belleau».

Table des matières du dossier

Bélanger, David, Jean-François Chassay et Michel Lacroix, «André Belleau : le texte multiple», p. 7-12. https://doi.org/10.7202/1039911ar

Lefort-Favreau, Julien, «Portrait de l’intellectuel “intermédiaire”. Engagement de la parole et du geste chez André Belleau», p. 13-23. https://doi.org/10.7202/1039912ar

Parent, Marie, «Trahir Belleau, ou y a-t-il une intellectuelle dans la salle ?», p. 25-34. https://doi.org/10.7202/1039913ar

Dumont, François, «La poésie à distance», p. 35-45. https://doi.org/10.7202/1039914ar

Chassay, Jean-François, «André Belleau, lecteur de Norbert Wiener», p. 47-58. https://doi.org/10.7202/1039915ar

Cambron, Micheline, «André Belleau à la radio ou la théorie littéraire dialoguée», p. 59-70. https://doi.org/10.7202/1039916ar

Dion, Robert, «André Belleau à l’épreuve de l’étranger. L’exemple de l’Allemagne», p. 71-84. https://doi.org/10.7202/1039917ar

Livernois, Jonathan, «“Un coup délivré de Trudeau…” À propos de la correspondance entre André Belleau et Pierre Vadeboncoeur (1978-1985)», p. 85-94. https://doi.org/10.7202/1039918ar

Nepveu, Pierre, «Rabelais au pluriel. André Belleau et l’unité perdue», p. 95-102. https://doi.org/10.7202/1039919ar

Lacroix, Michel, «Douze textes brefs sur Belleau», p. 103-116. https://doi.org/10.7202/1039920ar

Melançon, Benoît, «Bibliographie d’André Belleau», p. 117-134. https://doi.org/10.7202/1039921ar

Les cataractes de l’érudition

Fichiers de bibliothèque

 

«Les murs du cabinet de travail, le plancher, le plafond même portaient des liasses débordantes, des cartons démesurément gonflés, des boîtes où se pressait une multitude innombrable de fiches, et je contemplai avec une admiration mêlée de terreur les cataractes de l’érudition prêtes à se rompre.

“Maître, fis-je d’une voix émue, j’ai recours à votre bonté et à votre savoir, tous deux inépuisables. Ne consentiriez-vous pas à me guider dans mes recherches ardues sur les origines de l’art pingouin ?

— Monsieur, me répondit le maître, je possède tout l’art, vous m’entendez, tout l’art sur fiches classées alphabétiquement et par ordre de matières. Je me fais un devoir de mettre à votre disposition ce qui s’y rapporte aux Pingouins. Montez à cette échelle et tirez cette boîte que vous voyez là-haut. Vous y trouverez tout ce dont vous avez besoin.”

J’obéis en tremblant. Mais à peine avais-je ouvert la fatale boîte que des fiches bleues s’en échappèrent et, glissant entre mes doigts, commencèrent à pleuvoir. Presque aussitôt, par sympathie, les boîtes voisines s’ouvrirent et il en coula des ruisseaux de fiches roses, vertes et blanches, et, de proche en proche, de toutes les boîtes les fiches diversement colorées se répandirent en murmurant comme, en avril, les cascades sur le flanc des montagnes. En une minute elles couvrirent le plancher d’une couche épaisse de papier. Jaillissant de leurs inépuisables réservoirs avec un mugissement sans cesse grossi, elles précipitaient de seconde en seconde leur chute torrentielle. Baigné jusqu’aux genoux, Fulgence Tapir, d’un nez attentif, observait le cataclysme; il en reconnut la cause et pâlit d’épouvante.

“Que d’art !” s’écria-t-il.

Je l’appelai, je me penchai pour l’aider à gravir l’échelle qui pliait sous l’averse. Il était trop tard. Maintenant, accablé, désespéré, lamentable, ayant perdu sa calotte de velours et ses lunettes d’or, il opposait en vain ses bras courts au flot qui lui montait jusqu’aux aisselles. Soudain une trombe effroyable de fiches s’éleva, l’enveloppant d’un tourbillon gigantesque. Je vis, durant l’espace d’une seconde, dans le gouffre, le crâne poli du savant et ses petites mains grasses; puis l’abîme se referma, et le déluge se répandit sur le silence et l’immobilité. Menacé moi-même d’être englouti avec mon échelle, je m’enfuis à travers le plus haut carreau de la croisée.»

Anatole France, l’Île des Pingouins, dans Œuvres, Paris, Gallimard, coll. «Bibliothèque de la Pléiade», 406, 1994, tome IV, p. 1-248, «Préface», p. 10-11. Édition établie, présentée et annotée par Marie-Claire Bancquart. Édition originale : 1908.