«De l’extérieur, on n’y voyait que du feu, et du carton bien découpé.»
Belle virgule, qui fait le zeugme moins zeugme.
Stéphanie Kaufmann, Ici et là. Récits, Québec, L’instant même, 2009, 110 p., p. 56.
« Nous n’avons pas besoin de parler français, nous avons besoin du français pour parler » (André Belleau).
«De l’extérieur, on n’y voyait que du feu, et du carton bien découpé.»
Belle virgule, qui fait le zeugme moins zeugme.
Stéphanie Kaufmann, Ici et là. Récits, Québec, L’instant même, 2009, 110 p., p. 56.
Fourrer, au Québec, a tous les sens qu’on lui donne en français hexagonal. De surcroît, un usage, jugé familier dans le Petit Robert, et un que ne décrit pas ce dictionnaire y sont fréquemment attestés, et les deux concernent une forme de connaissance.
Il y a se fourrer au sens de se tromper. Exemple tiré de la Vie d’Anne-Sophie Bonenfant, roman dont l’Oreille tendue parlait hier : «Bon, faut croire que c’est un souvenir fabriqué, ou plutôt des souvenirs superposés, genre que je me fourre entre deux gâteaux […]» (p. 67). La mémoire paraît confondre deux gâteaux. Sa connaissance n’est pas solide.
Et il y a le sens familier évoqué plus haut : fourrer est alors synonyme de la connaissance dite biblique (Gn 4:1).
Il ne faut pas confondre.
[Complément du 15 octobre 2016]
Les narratrices du recueil de nouvelles Des femmes savantes de Chloé Savoie-Bernard (2016) aiment beaucoup ce verbe en son deuxième sens. Elles emploient aussi un substantif que ne connaissait pas l’Oreille tendue pour désigner les occasions où on le pratique : «On jouissait comme des cochons. À la fin de nos fourres, on se donnait des high five, on se félicitait» (p. 37). C’est noté.
[Complément du 18 mars 2020]
Qui est digne de fourrer, ou de l’être, est évidemment fourrable — ou pas : «anyway je ne suis pas fourrable ces temps-ci, je ne suis pas sortable, je ne suis pas grand-chose» (la Morte, p. 13).
Références
Arsenault, Mathieu, la Morte, Montréal, Le Quartanier, «série QR», 141, 2020, 131 p.
Blais, François, Vie d’Anne-Sophie Bonenfant. Roman, Québec, L’instant même, 2009, 241 p.
Savoie-Bernard, Chloé, Des femmes savantes. Nouvelles, Montréal, Triptyque, 2016, 120 p.
Publicité dans le Devoir de ce samedi : «Blank. Vêtements fièrement fabriqués ici» (12-13 décembre 2009, p. A22). Le site Web de l’entreprise est plus clair : «Blank. Vêtements fièrement fabriqués au Québec.»
Il est vrai que la fierté est fréquente au Québec.
Il fut un temps où le slogan de la ville de Montréal était «La fierté a une ville». Pour encourager — du moins en théorie — l’économie hors des grands centres, le gouvernement du Québec a créé un Fonds d’intervention économique régional (FIER). Les exemples de fierté municipale, régionale ou provinciale ne manquent pas.
Ce n’est pas (tout à fait) à cela que pensent Les Cowboys fringants quand ils chantent, dans «Toune d’automne», sur l’album Break syndical (2002) : «Chu fier que tu m’aies pas ram’né / Un beau-frère de l’Alberta / Ça m’aurait un peu ébranlé.»
Fier, c’est aussi, tout bêtement, être content.
Je suis fier d’avoir reçu l’argent du FIER désigne donc aussi bien le sentiment patriotique qu’un plaisir bien personnel.
[Complément du 30 mars 2022]
C’est ce deuxième sens qu’on entend, en 1863, dans Forestiers et voyageurs, de Joseph-Charles Taché : «Je n’ai pas besoin de vous dire si j’étais fier d’abandonner un pays si tourmenté» (éd. de 2014, p. 219).
Référence
Taché, Joseph-Charles, Forestiers et voyageurs. Mœurs et légendes canadiennes, Montréal, Boréal, coll. «Boréal compact classique», 137, 2014, 267 p. Texte conforme à l’édition de 1884, avec une postface, une chronologie et une bibliographie de Michel Biron. Édition originale : 2002.