Accouplements 270

Jean-François Chassay, la Forme d’une ville, le cœur d’une littérature, 2025, couverture

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Gendreau, Vickie, Testament. Roman, Montréal, Le Quartanier, «série QR», 60, 2012, 156 p.

«Dans la marée étudiante en révolte, il n’y a pas de pancartes avec des fautes» (p. 32).

Biz, la Chaleur des mammifères, Montréal, Leméac, 2017, 160 p.

«C’est vrai qu’ils écrivent bien. Y a même pas de fautes sur leurs pancartes» (p. 132).

 

P.-S.—L’Oreille tendue emprunte cet accouplement au plus récent livre de son ami Jean-François Chassay, la Forme d’une ville, le cœur d’une littérature (2025, p. 97 et p. 101-102).

P.-P.-S.—Les pancartes dont il est question sont celles des manifestations étudiantes de 2012. L’Oreille en a rassemblé quelques exemples ici et elle en a causé .

 

Référence

Chassay, Jean-François, la Forme d’une ville, le cœur d’une littérature, Montréal, Presses de l’Université de Montréal, coll. «Champ libre», 2025, 219 p.

L’oreille tendue de… Mauricio Segura

Maurice Segura, les Amandiers en fleurs, 2025, couverture

«À voix basse, ce qui m’oblige à tendre l’oreille, elle me raconte que pendant la dictature, au deuxième étage de ce lieu, à l’insu même des commerçants autour, des militaires torturaient à leur guise, de jour comme de nuit, sans que personne en sache rien, et qu’aujourd’hui encore aucune plaque n’en fait mention.»

Maurice Segura, les Amandiers en fleurs. Roman, Montréal, Boréal, 2025, 193 p., p. 38-39.

Il faut savoir y arriver

Sophie Bienvenu, les Orphelines, 2025, couverture

Soit la phrase suivante, tirée du roman les Orphelines (2025) de Sophie Bienvenu :

Quand son patron est arrivé avec un spray pour colorer les roses blanches dans des tons fluo, ça a été la proverbiale goutte d’eau. Vingt ans plus tard, elle contait pour la cinquantième fois l’anecdote comme si je n’avais pas été aux premières loges, et elle n’avait toujours pas dépompé (p. 80).

«Dépompé» ? Dans le français populaire du Québec, qui se fâche «pompe». Logiquement, qui décolère «dépompe».

À votre service.

P.-S.—Usito connaît «pomper», mais pas son antonyme.

 

Référence

Bienvenu, Sophie, les Orphelines. Roman, Montréal, Le Cheval d’août, 2025, 173 p.

Une roue peut en cacher une autre

Laurence La Palme, Jour de clarté, 2025, couverture

Soit cette phrase, tirée d’un roman d’espionnage de Laurence La Palme — c’est un pseudonyme —, Jour de clarté (2025) : «Puis il donna un coup de roue et nous nous retrouvâmes sur un chemin forestier» (p. 127).

L’homme qui conduit la voiture dont il est question n’a frappé personne avec une de ses quatre roues. Ce «coup de roue», venu de l’anglais, est plutôt un «coup de volant» («wheel»).

À votre service.

 

Référence

La Palme, Laurence, Jour de clarté. Roman. Tome 1, Montréal, Le Cheval d’août, 2025, 140 p.

Curiosité voltairienne (et british)

Anne Hébert, Kamouraska, éd. de 1973, couverture

«The Queen ! Toujours the Queen ! C’est à mourir de rire. Qu’est-ce que cela peut bien lui faire à Victoria-au-delà-des-mers qu’on commette l’adultère et le meurtre sur les quelques arpents de neige, cédés à l’Angleterre par la France ?»

Anne Hébert, Kamouraska. Roman, Paris, Seuil, 1973, 249 p., p. 44. Édition originale : 1970.

 

Au début du vingt-troisième chapitre de Candide (1759), le conte de Voltaire, «Candide et Martin vont sur les côtes d’Angleterre; ce qu’ils y voient», Candide discute avec Martin sur le pont d’un navire hollandais : «Vous connaissez l’Angleterre; y est-on aussi fou qu’en France ? — C’est une autre espèce de folie, dit Martin. Vous savez que ces deux nations sont en guerre pour quelques arpents de neige vers le Canada, et qu’elles dépensent pour cette belle guerre beaucoup plus que tout le Canada ne vaut.»

 

Voltaire est toujours bien vivant.