Bonsoir, elle est partie !

Terrain de baseball

Au baseball, quand un frappeur envoie la balle à l’extérieur du terrain, mais à l’intérieur des lignes, cela s’appelle frapper un (coup de) circuit. On peut aussi dire que ce frappeur l’a sortie du stade, encore que le mot stade puisse avoir deux sens ici : la balle ainsi frappée sort des limites du terrain, certes, mais pas nécessairement de l’édifice qui abrite ce terrain. Passons.

L’expression la sortir du stade a (récemment ?) quitté les losanges pour passer dans la langue courante.

Dans la Presse+ du jour, on peut ainsi lire ceci : «Au baseball, disait Yogi Berra, ce n’est pas fini tant que ce n’est pas fini. C’est vrai. Stephen Bronfman a encore une chance de la sortir du stade. Il est capable. Il en a les moyens. Encore faut-il qu’il se présente au bâton de nouveau.» Dans ce cas, on ne s’attend pas à ce que Stephen Bronfman frappe bel et bien un circuit dans un uniforme de joueur, mais on laisse entendre qu’il peut réussir avec panache — qu’il la sorte du stade — le projet qu’il a entrepris de ramener une équipe de baseball professionnel à Montréal.

À la radio de Radio-Canada, à l’émission La soirée est encore jeune, on entend souvent l’expression dans la bouche de Jean-Sébastien Girard, généralement pour applaudir aux chroniques d’Olivier Niquet. Or Girard — attention : euphémisme massif devant — n’a jamais fait preuve d’une solide culture sportive. En utilisant l’expression, il montre qu’elle est devenue commune et il contribue à sa diffusion. Les amateurs de balle lui en sauront gré.

P.-S.—Oui, le titre de ce billet est une allusion à l’œuvre de Rodger Brulotte.

P.-P.-S.—Oui, on peut frapper un coup de circuit au champ gauche.

Mécaniques

Diderot dans la toponymie québécoise

Ce n’est pas pour se vanter, mais l’Oreille tendue, sur Twitter, a reçu hier un beau compliment : «Pour emprunter une expression de mon fils : tu flexes rare, là.»

Cela lui a rappelé cette phrase entendue en cours il y a deux ans : «Diderot, là, y flexe.»

Flexer ? Sous l’influence de l’anglais (to flex your muscles), rouler les mécaniques.

P.-S.—«Rare» ? (Vraiment) beaucoup, comme dans «J’étais rouge homard et brisé rare par l’univers» (Testament, p. 96).

 

Référence

Gendreau, Vickie, Testament. Roman, Montréal, Le Quartanier, «série QR», 60, 2012, 156 p.

Synonymie sportivoquébécoise

L’adjectif «diminutif» dans la Presse+ du 10 novembre 2020

Dans les médias sportifs québécois, on hésite parfois à dire d’un athlète qu’il est petit. On dira alors qu’il est diminutif.

L’illustration ci-dessus évoque un «diminutif quart-arrière» — c’est du football. Autre exemple : «Le bouillant et diminutif [Earl] Weaver [c’est du baseball] valait souvent le prix d’entrée à lui seul» (le Devoir, 22 janvier 2013, p. B6).

Si l’Oreille tendue se mettait en tête — elle ne le fera pas — de retrouver l’origine de ce synonyme supposé, elle commencerait par se pencher sur les œuvres complètes de Rodger Brulotte. Qui ne se souvient des innombrables diminutifs joueurs d’arrêt-court — c’est encore du baseball — dont il a commenté les moindres gestes au fil des ans ?

 

[Complément du 20 mai 2021]

Cet emploi de diminutif est plus ancien que ne le croyait l’Oreille. C’est ce qu’atteste une caricature, tombée par hasard sous ses yeux, signée Paul St-Jean et parue dans le journal la Patrie du 4 février 1945 (p. 75). Elmer Lach, le coéquipier de Toe Blake et de Maurice Richard — c’est du hockey —, serait «le meilleur centre de la N.H.L. [National Hockey League; Ligue nationale de hockey], prouvant que le joueur diminutif a encore une “grande place” dans notre jeu national».

Caricature d’Elmer Lach par Paul St-Jean, la Patrie, 4 février 1945, p. 75

Québécoise, encore un effort !

Lorem barnak, générateur de jurons québécois

LOREM BARNAK est «Le générateur de jurons Québécois» (remarque de pion : «québécois» ne devrait évidemment pas avoir de majuscule initiale, puisqu’il s’agit d’un adjectif). Explication :

Une combinaison du célèbre texte de remplissage «Lorem ipsum» et du juron emblématique «tabarnak», Lorembarnak rend hommage au riche paysage culturel des sacres Québécois [bis] en générant sur demande des chaînes d’obscénités aléatoires.

Vous vous-êtes cogné l’orteil si fort que vous en perdez vos mots ? On vous a chargé de composer quelques paragraphes pour un projet qui vous met en beau maudit ? Vous sentez monter la frustration en essayant d’assembler un nouveau meuble suédois ? Peu importe l’occasion, Lorembarnak sera là pour répondre à tous vos besoins à base de texte.

La chose est connue : l’Oreille tendue aime beaucoup sacrer, et sacrer beaucoup. Elle aime aussi beaucoup écrire sur les jurons du cru. A-t-elle couvert l’ensemble des propositions de LOREM BARNAK ?

Elle a baptême, enfant d’chienne, sacrament, maudite marde, cibole (mais pas cibolac), (saint-)simonaque, viande à chien, christie, gériboire, mosus, maudit, (saint-)ciboire, jésus de plâtre, bout d’viarge, bâtard, viarge, mautadit, câlisse, patente à gosse, torvisse, maudine, batince, sacristi, verrat, taboire, sapristi, câlique, câline (de bine), calvaire, crime, tabarnouche, tabarslaque, tabarouette — et bien sûr tabarnak.

Il lui manque cibouleau, estique / estic et ostifie (mais elle a ostie et astie), bout d’criss (mais elle a criss), sacréfice, boswell, esprit, torrieux (qu’elle utilise volontiers), jésus marie joseph, charrue, charogne.

Encore un effort !

Fil de presse 033

Logo, Charles Malo Melançon, mars 2021

Petit ménage dans la besace bibliolinguistique de l’Oreille tendue.

Aphatie, Jean-Michel et Michel Feltin-Palas, J’ai un accent, et alors ?, Paris, Michel Lafont, 2020.

Avanzi, Mathieu, avec la complicité d’Alain Rey et Aurore Vincenti, Comme on dit chez nous. Le grand livre du français de nos régions, Paris, Le Robert, 2020, 240 p.

Babylonia. La Rivista per l’insegnamento e l’apprendimento delle lingue, 1, 2020. Dossier «Le français en Suisse… 20 ans après. Französisch in der Schweiz… 20 Jahre danach. Il francese in Svizzera… 20 anni dopo. Il franzos en Svizra… 20 ons suenter», sous la direction d’Amelia Lambelet, Jean-François de Pietro, Jeanne Pantet et Zorana Sokolovska.

Beaudoin-Bégin, Anne-Marie et Pascale Constantin, le Boss des bécosses. Les expressions du Québec en BD, Montréal, Auzou, 2020.

Boissieu, Christian de, les 100 Mots de la politique monétaire, Paris, Presses universitaires de France, coll. «Que sais-je ?», 3969, 2020, 128 p.

Bouchard, Chantal, la Langue et le nombril. Une histoire sociolinguistique du Québec, Montréal, Presses de l’Université de Montréal, coll. «Nouvelles études québécoises», 2020, 296 p. Nouvelle édition mise à jour. Édition originale : 1998.

Campese, Sandrine, Un petit dessin pour parler comme les grands, Paris, Le Robert, 2020, 128 p.

Derrida, Jacques, le Calcul des langues. Distyle, Paris, Seuil, coll. «Bibliothèque Derrida», 2020, 108 p. Édition établie par Geoffrey Bennington et Katie Chenoweth.

Develey, Alice et Jean Pruvost, Les mots qui ont totalement changé de sens. Un mou énervé !, Paris, Le Figaro édition, coll. «Mots & caetera», 2020.

Encel, Frédéric, les 100 Mots de la guerre, Paris, Presses universitaires de France, coll. «Que sais-je ?», 4192, 2020, 128 p.

European Journal of Language Policy, 12, 1, 2020.

Francophonie, pour l’amour d’une langue, Bruxelles, Nevicata, en partenariat avec l’OIF, coll. «L’âme des peuples», 2020, 104 p.

Fuchs Catherine et Sylvie Garnier, Lexique raisonné du français académique. Tome 1. Les collocations verbo-nominales, Paris, Ophrys, 2020, 320 p.

Gaudu, François, les 100 Mots du droit, Paris, Presses universitaires de France, coll. «Que sais-je ?», 3889, 2020, 128 p.

Glottopol. Revue de sociolinguistique en ligne, 34, juillet 2020. Dossier «Les “langues de France”, 20 ans après», sous la direction de Christian Lagarde.

Grant, Anthony P., The Oxford Handbook of Language Contact, Oxford, Oxford University Press, 2020, 792 p.

Guitton, René, les 100 Mots de Rimbaud, Paris, Presses universitaires de France, coll. «Que sais-je ?», 4174, 2020, 128 p.

Hébert, Pierre, Bernard Andrès et Alex Gagnon (édit.), Atlas littéraire du Québec, Montréal, Fides, 2020, xvii/496 p.

L’Information grammaticale, 166, juin 2020. Dossier «La variation régionale en grammaire», sous la direction de Mathieu Avanzi et André Thibault.

Journal of Historical Sociolinguistics, 6, 2, octobre 2020. Dossier «Comparative Sociolinguistic Perspectives on the Rate of Linguistic Change», sous la direction de Terttu Nevalainen, Tanja Säily et Turo Vartiainen.

Lacroix, Frédéric, Pourquoi la loi 101 est un échec, Montréal, Boréal, 2020, 264 p.

Laflèche, Guy, l’Office québécois de la langue française et ses travailleuses du genre, Laval, Éditions du singulier, 2020.

Le Goffic, Pierre, Grammaire de la subordination, Paris, Ophrys, 2019, 306 p.

Linx. Revue des linguistes de l’Université Paris Ouest Nanterre La Défense, 80, 2020. Dossier «L’héritage de Jean Dubois et Françoise Dubois-Charlier», sous la direction de Laetitia Leonarduzzi.

Multilingua, 39, 5, septembre 2020. Dossier «Linguistic Diversity in a Time of Crisis : Language Challenges of the COVID-19 Pandemic», sous la direction de Jie Zhang and Jia Li.

Neologica, 14, 2020, 274 p. Dossier «Perception, réception et jugement des néologismes».

Nore, Françoise, Bizarre, vous avez dit bizarre. Cabinet de curiosités de la langue française, Paris, Opportun, 2020, 256 p.

Peled, Yael et Daniel M. Weinstock (édit.), Language Ethics, Montréal et Kingston, McGill-Queen’s University Press, 2020, 264 p.

Pruvost, Jean, l’Histoire de la langue française [Un vrai roman], Paris, Le Figaro littéraire, coll. «Mots&Caetera», 2020.

Recherche en langue française, 2, 2020.

Reinke, Kristin (édit.), Attribuer un sens. La diversité des pratiques langagières et les représentations sociales, Québec, Presses de l’Université Laval, coll. «Culture française d’Amérique», 2020, 320 p.

Remysen, Wim et Sandrine Tailleur (édit.), l’Individu et sa langue. Hommages à France Martineau, Québec, Presses de l’Université Laval, coll. «Les voies du français», 2020, 296 p.

Römer, Thomas, les 100 Mots de la Bible, Paris, Presses universitaires de France, coll. «Que sais-je ?», 4057, 2020, 128 p.

Siouffi, Gilles (édit.), Histoire de la phrase française. Des Serments de Strasbourg aux écritures numériques, Arles, Actes Sud, 2020, 376 p.

Soulié, Julien et M. la Mine, Et cetera, et cetera. La langue française se raconte, Paris, Éditions First, 2020, 144 p.

Trimaille, Cyril, Christophe Pereira, Karima Ziamari et Médéric Gasquet-Cyrus (édit.), Sociolinguistique des pratiques langagières de jeunes. Faire genre, faire style, faire groupe autour de la Méditerranée, Saint-Martin-d’Hères, UGA éditions, 2020.

Verdier, Marie (édit.), le Tour du monde du français, Paris, La Librairie Vuibert, 2019, 192 p.

Verreault, Claude et Claude Simard, la Langue de Charlevoix et du Saguenay—Lac-Saint-Jean : un français qui a du caractère, Québec, Presses de l’Université Laval, coll. «Langue française en Amérique du Nord», 2020, 168 p.

Wakim, Nabil, l’Arabe pour tous. Pourquoi ma langue est taboue en France, Paris, Seuil, 2020, 208 p.

Walter, Henriette, les Petits Plats dans les grands. La savoureuse histoire des mots de la cuisine et de la table, Paris, Robert Laffont, 2020, 288 p.