Autopromotion 081

L’Oreille tendue rentre du travail. Elle va faire un tour sur Twitter. Elle tombe sur le tweet suivant :

Finaliste aux Huffies

Elle découvre alors qu’elle est finaliste, catégorie «Sports», aux «Huffies». Le Huffington Post demande en effet à ses lecteurs de se prononcer : «Votez pour les Québécois à suivre sur les médias sociaux en 2014.»

À l’approche de l’année 2014, l’équipe du Huffington Post Québec veut vous faire découvrir les prochaines stars du Web 2.0. Facebook, Twitter, blogues, Pinterest, Tumblr… peu importe le média 2.0, l’idée est de sortir des sentiers battus pour faire émerger de nouveaux noms.

«Star», l’Oreille ? Elle en rougit de tous ses lobes.

On vote ici.

P.-S. — Les textes de l’Oreille sur le sport sont regroupés dans la catégorie du même nom. Plus précisément sur la langue du hockey, il y a la rubrique «Dictionnaire des séries».

P.-P.-S. — Merci à @oniquet pour la sélection.

 

[Complément du 16 décembre 2013]

Ça y est : le vote est terminé.

L’Oreille tendue remercie les 122 personnes qui ont pris la peine de voter pour elle : 64 pour («J’aime»), 58 contre («Je n’aime pas»). Avec un score net de 6, l’Oreille se classe quatrième sur cinq. C’est mieux qu’à son plus récent tournoi de boxe.

P.-S. — Précision pour les amateurs de statistiques, tirée du Huffington Post Québec : «le résultat final sera comptabilisé uniquement en fonction des mentions “J’aime” récoltées par les finalistes, et non pas du total “J’aime” moins “Je n’aime pas”». Pour l’Oreille, c’est kifkif : elle est et restera quatrième au classement, qu’on l’aime ou pas.

P.-P.-S. — Parmi les cinq finalistes, c’est l’Oreille qui a reçu le moins grand nombre de «Je n’aime pas». C’est déjà ça.

Le mépris de la STM

Il y a quelques années, l’Oreille tendue s’est abonnée au fil Twitter de la Société de transport de Montréal (STM). Vu le nombre de pannes sur son réseau, ça s’explique facilement.

Depuis, elle reçoit tous les messages de la STM en double, l’un en français, l’autre en anglais. Elle n’a évidemment jamais demandé une chose pareille.

L’Oreille, à plusieurs reprises, a marqué son mécontentement sur Twitter. Elle sait, de sources conjugales proches et généralement fiables, que d’autres ont porté plainte directement à la STM. Conséquences de ces plaintes ? Aucune.

Sans être juriste, on peut affirmer que cela contrevient aux dispositions de la Charte de la langue française sur le bilinguisme dans les services publics. Celle-ci prévoit en effet des dérogations aux communications en anglais avec leurs clients / utilisateurs. Ces dérogations sont précisément encadrées et, sauf erreur, il faut les demander; on ne peut pas se les faire imposer.

Depuis quand la Société de transport de Montréal est-elle bilingue ? Au secours ! Help !

P.-S. — Sur le même sujet, @OursMathieu est plus lapidaire : «Niaiserie.»

 

[Complément du 2 décembre 2013]

Rien n’y fait : ni les tweets, ni les plaintes, ni les entrées de blogue. L’Oreille a donc écrit, par l’intermédiaire du Devoir, au nouveau président du conseil de la STM, Philippe Schnobb. Elle attend une réponse, sans trop y croire.

L’Oreille chez les Bleuets

Dimanche dernier, la moitié de la progéniture de l’Oreille tendue jouait un match de football important à Saguenay, ci-devant Chicoutimi. En bon père de famille, l’Oreille s’est déplacée pour la voir jouer. Notes de périple.

De Montréal à Saguenay, 467 kilomètres, l’autobus a mis pile-poil, malgré deux arrêts, cinq heures trente minutes. À vue d’Oreille, le chauffeur avait le pied pesant. On lui assure pourtant que non.

Dans l’autobus — on dit peu car ou autocar dans la Belle Province — des parents, une mère lisait Papillon. L’Oreille n’avait pas pensé à Henri Charrière depuis plus de trente ans.

Pour sa part, elle lisait la traduction (inédite) d’un ouvrage du philosophe italien Maurizio Ferraris, Anima e iPad (2011). Elle la lisait sur papier, pas sur sa tablette, mais elle en discutait en temps réel, grâce à son iPhone, avec son collègue Marcello Vitali-Rosati. C’était, en bonne partie, la démonstration de l’argument de l’auteur. (Traduction inédite ? Dossier à suivre.)

Cela étant, l’Oreille avait bien sûr pris avec elle son iPad (elle a un blogue à tenir). Devant la panoplie de câbles dans sa chambre d’hôtel, elle a presque regretté de ne pas avoir pris son ordinateur.

Hôtel Delta, Saguenay, novembre 2013

On a souvent signalé la prononciation particulière, par les habitants du Saguenay, du mot plaisir, quelque chose comme plééézir. C’est vrai. (Et c’est tout.)

Le résultat du match ? C’est par ici.

P.-S. — «Chez les Bleuets» ? C’est ainsi qu’on désigne les habitants du Saguenay. On ne dit pas «Chez les Myrtilles».

Ces livres qu’elles ne liraient que d’une main

Manuel scolaire québécois, couverture

En 1990, dans la revue Littératures classiques, Roger Chartier publiait un article intitulé «Loisir et sociabilité : lire à haute voix dans l’Europe moderne». Il déplorait la rareté des représentations (textuelles, iconographiques) des scènes de lecture dans les archives occidentales, surtout pour le XVIIIe siècle. En l’absence de ces représentations, il est difficile de faire l’historique de l’imaginaire de la lecture à travers les âges.

Roger Chartier était intéressé par toutes les formes de scènes de lecture — textes publiés, fictifs ou pas, textes inédits, tableaux, gravures, etc. —, dans toutes les cultures. Les concepteurs de la base de données The Reading Experience Database (RED) sont plus timorés que lui. Ils ont choisi, au milieu des années 1990, de mettre en ligne, dans une base de données collective, des représentations de lecture uniquement textuelles et uniquement en anglais; la fiction en est exclue.

Que diraient les concepteurs de RED et Roger Chartrier du projet «Hysterical Literature» lancé en août 2012 par Clayton Cubitt, cette série de lectures à haute voix ?

Résumons.

Une femme est assise, seule, à une table, devant un mur noir. Elle tient à la main un livre (en papier, numérique). Elle est filmée en noir et blanc par Cubitt, dans des vidéos qui font entre 4 minutes 8 secondes et 11 minutes 42 secondes; il y en a huit au total, appelées «sessions».

La femme se présente, soit seulement par son prénom, soit par son prénom et son nom. (Le prénom donne son titre à la «session».) Elle indique le titre et l’auteur du livre qu’elle tient à la main. Elle commence à lire à haute voix. Plus ou moins rapidement, son rythme de lecture s’altère. Sous la table, un vibromasseur est en effet à l’œuvre. (Il arrive qu’on entende le bruit de son moteur, plus ou moins fortement, mais sans jamais voir qui le guide.) La femme jouit (ou du moins le donne à croire). Dans presque tous les cas, une voix d’homme, qu’on suppose celle du réalisateur, s’assure que tout va bien. C’est fini.

Que lisent-elles, ces huit femmes ? Surtout, mais pas seulement, des histoires de couples ou de désir, de Toni Morrison, de Supervert, de Walt Whitman, de Tom Robbins, de Bret Easton Ellis, de Jeanette Winterson, d’A.N. Roquelaure et d’Anthony Burgess. (Peu importe, semble-t-il.)

N’étant ni spécialiste d’art contemporain ni portée sur les gender studies, l’Oreille tendue n’essaiera pas de tirer de grandes conclusions de sa fréquentation des vidéos de Cubitt.

Elle note cependant que lire à haute voix en Amérique au XXIe siècle est manifestement affaire de plaisir (de rires, de joie), de rythmes et de concentration (à maintenir). Cela est vrai du lecteur — de la lectrice — comme du spectateur, même s’il ne s’agit ni du même plaisir (des mêmes rires, de la même joie), ni des mêmes rythmes, ni de la même concentration.

P.-S. — C’est en lisant un tweet de @Lectodome que l’Oreille a découvert ce projet. Merci.

P.-P.-S. — Les dix-huitiémistes auront reconnu, dans le titre de ce billet, une allusion à une expression reprise par Jean-Jacques Rousseau dans le premier livre de ses Confessions : «j’avais plus de trente ans avant que j’eusse jeté les yeux sur aucun de ces dangereux livres qu’une belle dame de par le monde trouve incommodes, en ce qu’on ne peut, dit-elle, les lire que d’une main» (éd. Voisine 1980, p. 43). On la retrouve aussi dans le titre d’un brillant essai de Jean M. Goulemot paru d’abord en 1991.

 

[Complément du 1er avril 2017]

Remarque de pion.

Dans le Devoir du jour, Dominic Tardif rend compte de l’ouvrage Amants. Catalogue déraisonné de mes coïts en sept cent quarante et une pénétrations, signé Anne Archet (2017). Il écrit ceci :

Ne vous méprenez pas. Malgré ses polissonnes allures de livre que l’on ne tient qu’à une main, malgré cette admiration qu’entretient Anne Archet pour la contrepèterie et le calembour hérité des moralistes français des XVIIe et XVIIIe siècles, Amants n’est rien de moins qu’un authentique baril de TNT balancé dans la proprette vitrine de l’amour avec un grand ou un petit a (p. F1).

On l’a vu : non pas des livres qu’on «ne tient qu’à une main», mais bel et bien des livres qu’«on ne lit que d’une main». Ce n’est pas tout à fait la même chose.

 

Références

Archet, Anne (pseudonyme), Amants. Catalogue déraisonné de mes coïts en sept cent quarante et une pénétrations, Montréal, Éditions du Remue-Ménage, 2017, 204 p. Dessins de Mathilde Corbeil.

Chartier, Roger, «Loisir et sociabilité : lire à haute voix dans l’Europe moderne», Littératures classiques, 12, janvier 1990, p. 127-147. https://doi.org/10.3406/licla.1990.1238

Goulemot, Jean M., Ces livres qu’on ne lit que d’une main. Lecture et lecteurs de livres pornographiques au XVIIIe siècle, Paris, Minerve, 1994, 182 p. Ill. Deuxième édition revue, augmentée et corrigée.

Rousseau, Jean-Jacques, les Confessions, Paris, Garnier, coll. «Classiques Garnier», 1980, cxlii/1094 p. Ill. Introduction, bibliographie, notes, relevé des variantes et index par Jacques Voisine, édition révisée et augmentée. Édition originale : 1782 et 1789 (posthume).

Autopromotion 079

Lire vous transporte

Plus tôt aujourd’hui, la Société de transport de Montréal, l’Association des libraires du Québec et le réseau des bibliothèques de la Ville de Montréal annonçaient le lancement de l’opération Lire vous transporte :

Ce projet pilote d’une durée de trois mois consiste à offrir, à l’intérieur de plusieurs bus et abribus, une bibliothèque numérique gratuite composée d’une quarantaine de livres d’expression française.

[…]

Grâce à ce projet, il sera possible de télécharger sur un téléphone intelligent, une tablette ou une liseuse, par l’entremise d’un code QR ou un URL, le premier chapitre de chacun des livres proposés dans cinq catégories : jeunesse et aventure, enquêtes, romans historiques et découvertes, évasion, cuisine et voyages, romans d’amour et autres histoires. Le lecteur se verra, par la suite, offrir la possibilité d’emprunter le livre en version papier ou numérique dans l’une des 45 bibliothèques de la Ville de Montréal ou de l’acheter, également en version papier ou numérique, sur le site RueDesLibraires.com. Une fonction permettra également de géolocaliser la bibliothèque ou la librairie la plus proche (source : Ville de Montréal).

En images ?

 

 

L’Oreille tendue est ravie d’avoir été invitée à participer à ce projet, pour son livre les Yeux de Maurice Richard. Une histoire culturelle (éd. de poche, 2012).

Cela dure jusqu’au 20 janvier 2014.

 

Référence

Melançon, Benoît, les Yeux de Maurice Richard. Une histoire culturelle, Montréal, Fides, 2006, 279 p. 18 illustrations en couleurs; 24 illustrations en noir et blanc. Nouvelle édition, revue et augmentée : Montréal, Fides, 2008, 312 p. 18 illustrations en couleurs; 24 illustrations en noir et blanc. Préface d’Antoine Del Busso. Traduction : The Rocket. A Cultural History of Maurice Richard, Vancouver, Toronto et Berkeley, Greystone Books, D&M Publishers Inc., 2009, 304 p. 26 illustrations en couleurs; 27 illustrations en noir et blanc. Traduction de Fred A. Reed. Préface de Roy MacGregor. Postface de Jean Béliveau. Édition de poche : Montréal, Fides, coll. «Biblio-Fides», 2012, 312 p. 42 illustrations en noir et blanc. Préface de Guylaine Girard.

Les Yeux de Maurice Richard, édition de 2012, couverture