Le niveau baisse ! (1936)

(«Le niveau baisse !» est une rubrique dans laquelle l’Oreille tendue collectionne les citations sur le déclin [supposé] de la langue. Les suggestions sont bienvenues.)

 

«D’autre part, comme le remarque si justement M. J. Lahargue, “il y a dans l’acquis scolaire un déchet considérable manifesté par une chute de niveau que nous exprimerions ainsi : les élèves qui étaient au niveau du cours moyen (parfois, rarement, du cours supérieur) sont redescendus jusqu’au cours élémentaire; ceux, trop nombreux, qui n’avaient pas dépassé le cours élémentaire, sont retombés au cours préparatoire”. Cette dégradation rapide du savoir que tous les maîtres connaissent et déplorent mérite de retenir notre attention.»

Source : A. Dumonteille, inspecteur de l’Enseignement primaire, dans l’École et la vie, 7 mars 1936, cité par @TractLinguistes

 

Pour en savoir plus sur cette question :

Melançon, Benoît, Le niveau baisse ! (et autres idées reçues sur la langue), Montréal, Del Busso éditeur, 2015, 118 p. Ill.

Benoît Melançon, Le niveau baisse !, 2015, couverture

Aux parapluies !

Charlotte Aubin, Toute ou pantoute, 2024, couverture

Soit les vers suivants, tirés du recueil de poésie Toute ou pantoute :

il mouille à siaux
j’aurais voulu l’anticiper
avant d’en avoir la certitude (p. 12).

Ces siaux sont des seaux, voire des chaudières.

Quand il mouille à siaux, dans le français populaire du Québec, c’est qu’il tombe des trombes d’eau. Protégez-vous.

Synonyme : «Il pleut à boire debout […]» (Amiante, p. 179).

À votre service.

 

Références

Aubin, Charlotte, Toute ou pantoute. Poésie, Montréal, Del Busso éditeur, 2024, 87 p. Ill.

Dulude, Sébastien, Amiante, Saguenay, La Peuplade, 2024, 209 p. Ill.

Les zeugmes du dimanche matin et d’Éric Chacour

Éric Chacour, Ce que je sais de toi, 2023, couverture

«Ils venaient avec leurs formules convenues et quelques souvenirs de ton père soigneusement dépoussiérés pour l’occasion, jugeaient intérieurement de votre état d’accablement. Ils scrutaient le sillon obscur creusé sous vos yeux par la fatigue, le frémissement s’emparant de vous au moment où ils prononçaient le nom du défunt, puis repartaient avec le goût mêlé des pâtisseries à la pistache et du devoir accompli» (p. 22-23).

«Faire le ménage, la cuisine, la lessive, les courses, des courbettes à sa patronne et du thé aux invités. Faire attention aux franges du tapis et aux verres en cristal. Faire le moins de bruit possible» (p. 176).

«Je pris mon air le plus détaché, elle son calepin» (p. 213).

«Elle avance dans les couloirs du Royal Vic en poussant son chariot et parfois quelques jurons» (p. 249).

Éric Chacour, Ce que je sais de toi, Québec, Alto, 2023, 289 p.

 

(Une définition du zeugme ? Par .)

Le niveau baisse ! (1951)

(«Le niveau baisse !» est une rubrique dans laquelle l’Oreille tendue collectionne les citations sur le déclin [supposé] de la langue. Les suggestions sont bienvenues.)

 

«les maux dont souffre l’Université actuelle, et qui ne sauraient se prolonger sans péril, se répartissent sous deux ordres.

Le premier mal, qui éclate à tous les yeux, qui s’accuse chaque jour comme une sorte de scandale et que les maîtres sentent peser sur eux comme une espèce de condamnation, c’est la baisse du niveau et de la qualité des études. Baisse relative, pour sûr — et l’on sait bien que la comparaison serait écrasante entre le bachelier d’aujourd’hui et celui du siecle dernier. Mais baisse absolue, en quelque sorte, et qui n’a pas besoin de comparaison chronologique pour apparaître, tellement l’état intellectuel de l’élève courant se situe au-dessous du plus pauvre minimum. L’école primaire présente au lycée, en priant qu’on ne regarde pas trop à l’orthographe, des enfants qui vont faire du latin ou des langues sans savoir distinguer un attribut d’un complément. Les grands élèves du secondaire cultivent le contresens, et pas seulement dans la version latine : les textes français eux-mêmes leur deviennent incompréhensibles.»

Source : la Croix, 15 février 1951, cité par @TractLinguistes

 

Pour en savoir plus sur cette question :

Melançon, Benoît, Le niveau baisse ! (et autres idées reçues sur la langue), Montréal, Del Busso éditeur, 2015, 118 p. Ill.

Benoît Melançon, Le niveau baisse !, 2015, couverture

Du bon usage des coins

Soit la phrase suivante, dans un entretien donné par René Homier-Roy :

«Quand je me suis mis à faire des entrevues, j’avais tendance à tourner les coins ronds dans l’écoute, à faire mine d’écouter sans vraiment y mettre l’intensité nécessaire» (p. 33).

Au Québec, qui va trop vite en affaires est réputé couper / tourner les coins ronds. Exemples ici et .

Conséquence ?

«En France, M. Legault est suivi par l’immigration à cause de ses déclarations faites avant son départ. Les journalistes lui demandent de clarifier ses idées. Un certain brouillard demeure. Ses solutions se démarquent encore par la rondeur de leurs coins» (la Presse+, 4 octobre 2024).

Joli.

P.-S.—Couper / tourner les coins ronds, ce n’est pas bien. Travailler fort dans les coins, c’est le contraire. Oui, c’est de la langue de puck.

 

Références

Melançon, Benoît, Langue de puck. Abécédaire du hockey. Édition revue et augmentée, Montréal, Del Busso éditeur, 2024, 159 p. Préface d’Olivier Niquet. Illustrations de Julien Del Busso.

«Les principes qui guident René Homier-Roy. Propos recueillis par Catherine Genest», Nouveau projet, 26, printemps-été 2024, p. 32-33.

Melançon, Benoît, Langue de puck, édition revue et augmentée de 2024, couverture